Les impacts dévastateurs du réchauffement au crible de 195 pays

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Sécheresse près de Dohuk, en Irak, en novembre 2021 © AFP/Archives Ismael ADNAN

Paris (AFP) – Alors que le réchauffement de la planète s’accélère, 195 pays commencent lundi l’adoption d’un rapport scientifique de référence sur ses impacts dévastateurs, qui peindra sans aucun doute une image sombre de l’avenir auquel l’humanité doit se préparer.

Après plus d’un siècle et demi de développement économique consacrant les énergies fossiles, le monde a gagné environ +1,1°C par rapport à l’ère pré-industrielle, multipliant déjà canicules, sécheresses, tempêtes ou inondations dévastatrices.

Dans le premier volet de leur rapport publié en août dernier, les experts climat de l’ONU (Giec) estimaient que le mercure atteindrait autour de 2030, soit dix ans plus tôt qu’escompté, le seuil de +1,5°C, objectif le plus ambitieux de l’accord de Paris.

Avant un troisième opus en avril sur les solutions pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, le deuxième dont les négociations débutent lundi se penche sur les impacts du réchauffement, et la façon de s’y préparer (« l’adaptation »).

Il doit décliner ces conséquences sur tous les continents et dans tous leurs aspects: santé, sécurité alimentaire, pénurie d’eau, déplacement de populations, destruction des écosystèmes…

« La vie sur la planète est frappée par le changement climatique et de nombreux systèmes atteignent leurs limites (…). Nous aussi avons nos limites. Comme les autres espèces, notre espace de vie se réduit », a commenté il y a quelques jours Hans-Otto Pörtner, co-président du groupe de près de 300 scientifiques ayant préparé ce rapport.

Une version préliminaire de ce texte, que l’AFP avait obtenue en juin dernier, montrait que la vie telle que nous la connaissons allait inéluctablement être transformée, à court terme.

Sur presque tous les continents, le monde voit d’ailleurs déjà de ses propres yeux les catastrophes à l’oeuvre.

Comme l’an dernier avec les flammes ravageant l’Ouest américain, la Grèce ou la Turquie, des flots submergeant des régions d’Allemagne ou de Chine, ou un thermomètre qui frôle les 50°C au Canada.

« Bon coup de pied au… » –

Face à ce constat et à la nécessité de réduire les émissions de près de 50% d’ici à 2030 pour ne pas dépasser +1,5°C, le monde a promis lors de la COP26 de Glasgow en novembre d’accélérer la lutte contre le réchauffement.

« Pas assez » pour éloigner « la catastrophe climatique qui frappe toujours à la porte », avait alors réagi le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres qui réclame notamment la sortie du charbon.

Alors que les Etats sont appelés à renforcer leur ambition d’ici à la COP27 en Egypte fin 2022, « j’espère que ce rapport sera un bon coup de pied où je pense pour certains », a déclaré à l’AFP l’envoyé américain pour le climat John Kerry.

Même si « on ne devrait pas avoir besoin de nouvelles statistiques inquiétantes pour savoir ce qu’il faut faire ».

C’est le 28 février que sera dévoilée cette nouvelle évaluation du Giec, après deux semaines de réunion virtuelle des 195 États membres qui passeront au crible, ligne par ligne, mot par mot, le « résumé pour les décideurs », condensé politiquement sensible des milliers de pages du rapport scientifique complet.

Evolution comparée au précédent rapport d’il y a sept ans, l’attention portée à l »adaptation », c’est-à-dire les solutions pour faire face aux impacts des dérèglements climatiques.

« L’accent sur les solutions (d’adaptation) n’est pas simplement une liste de courses de ce qui pourrait être fait, mais également une évaluation de l’efficacité et de la faisabilité » des mesures, a expliqué l’autre co-présidente du groupe du Giec Debra Roberts.

Mais « il y a des limites à l’adaptation », souligne à l’AFP le climatologue Laurent Bopp, un des auteurs du rapport.

« Dans certaines zones, si les températures dépassent des niveaux très élevés, la vie humaine n’est plus possible.

Si dans certaines zones côtières, le niveau des mers monte de plus d’un mètre, la protection avec des digues n’est plus possible non plus.

Donc dans certains scénarios, on peut s’attendre à des migrations de populations importantes », ajoute-t-il.

Scientifiques et ONG appellent à prendre toutes les décisions nécessaires pour limiter au maximum les conséquences irréversibles.

Avec le nouveau rapport, « la réalité de ceux qui vivent dans les situations les plus vulnérables sera impossible à ignorer », espère Kaisa Kosonen, de Greenpeace.

« Les faits incontestables qui seront présentés rendront le manque d’actions et d’engagements des grands émetteurs plus évident, et les appels à la justice encore plus fort ».

© AFP

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2 commentaires

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    • Jack

    Je lis cette étude publiée dans The European Physical Journal le 13/01 dernier:
    https://link.springer.com/article/10.1140/epjp/s13360-021-02243-9
    Avec cette conclusion:
    « L’analyse est ensuite étendue à certains indicateurs de réponse globale d’événements météorologiques extrêmes, à savoir les catastrophes naturelles, les inondations, les sécheresses, la productivité des écosystèmes et les rendements des quatre principales cultures (maïs, riz, soja et blé). Aucun de ces indicateurs de réponse ne montre une nette tendance positive aux événements extrêmes.
    En conclusion sur la base des données observationnelles, la crise climatique que, selon de nombreuses sources, nous vivons actuellement, n’est pourtant pas évidente ».
    Le catastrophisme incessant du GIEC commence à lasser. « A force de crier au loup… »
    Ne serait-il pas temps de rechercher de nouvelles sources d’informations plus fiables ?

    • Balendard

    Les travaux du GIEC, ceux du Shift Project, le livre de Jeremy Rifkin ont le mérite d’exister et de nous alerter sur ce qui se prépare Mr Jack

    En tant que porte-parole des Lutins thermique j’estime qu’il va falloir mettre en place une économie de guerre. Ceci sachant que l’ennemi est le gaz carbonique émis par nos chaines énergétiques conjugués à leurs coûts inacceptables sur le plan social. Il va falloir pour ces deux raisons laisser progressivement de côté nos chaînes énergétique actuelles. Cela en mettant en avant le solaire voltaïque aux avants postes et en limitant quantitativement dans la mesure du possible le vent source de nuisances en particulier avec la gamme de fréquence de 0,3 hertz qui rendent les gens et nos animaux d’élevage malades. Ceci aussi en évitant dans la mesure du possible vu le mauvais rendement de la transition, de transformer une forme d’énergie en une autre forme en raison du rendement déplorable de la transition. Il faudra à ce sujet choisir le mode de stockage ayant un rendement acceptable en y associant bien évidemment la notion de coût.
    Quant à la « Solar Water Economy » plus proche des actions qu’il va falloir prendre, elle va je pense rassurer à la fois celui qui finance et celui qui rembourse. Ceci en assurant paix et justice grâce à une meilleure cohabitation entre les hommes et les fluides. Moins complexe à la mise en œuvre que le nucléaire actuel, elle correspond mieux, vu l’urgence qu’il y a à agir à nos problèmes. Elle ne passe pas par les hautes températures comme cela est le cas des chaînes énergétiques telles que l’astronautique, les turbines à vapeur et les réseaux de puissance associés au nucléaire. A l’heure du réchauffement climatique et de ses conséquences sur notre environnement cela peut être considéré comme un avantage d’autant qu’elle aurait même plutôt tendance à refroidir notre environnement dans les villes.
    Il serait triste de s’orienter vers le nucléaire, cette chaîne par nature dangereuse en raison de sa radioactivité. Indirectement associée quoiqu’on dise au militaire, elle passe, facteur aggravant, par les hautes températures et demande une formation complexe en partie perdue. Chaque étape de sa réalisation demande en effet la réalisation d’un dossier qui doit être validée par le contrôle du constructeur, les anomalies devant être traités avec des organismes de validation en aval. Une lenteur qui trouve sa consécration à Flamanville. Une formation dans ces domaines serait, vu l’urgence, trop longue à restaurer.

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