Nouvelle vague de chaleur sur la France, comment y faire face ?

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Maisons flottantes sur l'étang de la Galiotte, Carrières-sous-Poissy, Yvelines © Yann Arthus-Bertrand

En plein cœur de l’été 2025, une nouvelle vague de chaleur arrive sur la France. Des températures pouvant dépasser les 35 °C sont attendues début août dans certaines régions de la France métropolitaine. Ainsi, depuis l’an 2000, le pays a connu plus d’une trentaine d’épisodes de fortes chaleurs. Progressivement, la France apprend à faire face à ces épisodes plus fréquents qui sont à la fois le symptôme et la conséquence du changement climatique. L’adaptation aux nouvelles conditions climatiques concerne tout le monde et semble prendre du temps. Elle va au-delà de la simple question de l’installation de la climatisation.

Le changement climatique, une nouvelle réalité à prendre en compte

Les études scientifiques les plus récentes montrent que le monde s’est déjà réchauffé de + 1,5 °C depuis le début de l’ère industrielle. Ne pas franchir cette limite était pourtant l’objectif de l’Accord de Paris de 2015, présenté à l’époque comme ambitieux. Aujourd’hui, face à des émissions de gaz à effet de serre qui tardent à ralentir et à diminuer, l’évolution du climat tend vers les projections les plus pessimistes des climatologues, celles d’un monde qui pourrait se réchauffer de 4°C. Bien qu’il faille toujours agir au maximum pour atténuer le réchauffement, il faut aussi désormais s’y adapter.

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Des vagues de chaleur plus fréquentes, précoces et intenses

Depuis 1947, la France a connu une cinquantaine de vagues de chaleur. Elles se sont intensifiées depuis l’an 2000. En effet, seulement 17 ont été recensées entre 1947 et 2000, contre 33 entre 2000 et 2025. Sur une période deux fois plus courte, il y a eu deux fois plus d’épisodes de forte chaleur, selon les données de Météo France. Alors qu’un pic de chaleur dure généralement une journée voire deux, « une vague de chaleur désigne un épisode de températures nettement plus élevées que les normales pendant plusieurs jours », toujours d’après Météo France. La canicule quant à elle se définit comme « un épisode de températures élevées de jour comme de nuit sur une période prolongée (au moins 3 jours) qui est susceptible de constituer un risque sanitaire notamment pour les personnes fragiles. »

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Les vagues de chaleur depuis 1947 en France. Infographie Méteo France DR Météo France

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2003, un été précurseur exceptionnellement chaud

L’année 2003 a été un tournant en raison de l’impact sanitaire de la canicule qui a sévi entre le 1er et le 20 août. Il s’agit de l’été le plus chaud depuis plus de 75 ans, avec des températures supérieures de +2,7 °C en moyenne. Sur la période caniculaire d’août, 14 800 décès sont imputables à la chaleur, soit une mortalité 60 % plus élevée que la normale. Les premières victimes ont été les personnes âgées. En cause : l’impréparation des personnes, des familles, des établissements d’accueil et des autorités.

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À partir de 2003, la menace des canicules a été prise au sérieux avec notamment la création de la « Vigilance canicule ». Ce dispositif permet de surveiller les vagues de chaleur, d’effectuer de la prévention auprès des personnes vulnérables. On est habitué au désormais régulier rappel des règles d’hydratation, boire régulièrement, se montrer vigilant à l’égard des personnes âgés et des enfants et de rester à l’abri de la chaleur. Mais, la prise en compte des fortes chaleurs dépasse la protection individuelle car elle implique l’ensemble de la société.

Adapter la société aux fortes chaleurs

Plutôt que d’attendre la survenue des fortes chaleurs, il faut agir en les anticipant. Tel est l’enjeu de l’adaptation des villes, car ces dernières, en raison de l’artificialisation et d’une moindre végétation, sont plus sensibles aux fortes températures. Depuis quelques années, le phénomène mieux connu est appelé « îlot de chaleur urbain ». L’ADEME rappelle que « en ville, l’air est en moyenne 2 à 3 °C plus chaud que dans la campagne alentour, parfois jusqu’à 10 °C ! Ce phénomène d’îlot de chaleur urbain s’explique par la concentration des activités humaines, la présence de matériaux foncés absorbant la chaleur le jour et la restituant la nuit, etc ».

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Pour y faire face, de plus en plus de communes misent sur la végétalisation, le retour des espaces verts et des points d’eau afin de recréer un peu de fraîcheur. Il est aussi possible de créer de l’ombre par le biais des aménagements. Toutefois, « il ne suffit pas de changer de revêtement et de planter des arbres pour régler le problème, avertit Perrine Prigent, conseillère municipale déléguée à la valorisation du patrimoine, à l’amélioration des espaces publics et à la place de l’eau à Marseille. Il faut aussi penser à l’après : les essences choisies supporteront-elles le climat local, actuel et futur ? Ont-elles besoin de beaucoup d’eau ? Qui va entretenir les plantations ? Si ces questions ne sont pas anticipées, la végétation risque de dépérir assez vite. »

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L’adaptation des villes doit se faire en ayant en tête les conditions climatiques futures, et elle ne nécessite pas forcément de repartir de zéro. « Une autre erreur serait de ne pas prendre soin des arbres existants », ajoute Élodie Briche, coordinatrice R&D Urbanisme durable à l’ADEME. Cette dernière donne en exemple la métropole d’Orléans qui « a inscrit en 2021 la protection des cœurs d’îlots et autres espaces végétalisés dans son plan local d’urbanisme. »

Clim’ ou pas clim’ ?

Le besoin de se rafraîchir fait se poser la question de l’équipement les bâtiments de climatiseurs. Si pendant longtemps, la climatisation en France était peu répandue et avant tout destinée aux régions du sud, elle se banalise. Un quart des ménages (25 %) et 40 % des surfaces de bâtiments destinés au tertiaire (notamment les commerces) sont équipés de systèmes de climatisation.

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Bien que celle-ci permette de supporter la chaleur, elle contribue à la surchauffe des villes. La clim’ réchauffe directement les villes par les gaz rejetés en dehors des bâtiments tout en étant également grande consommatrice d’électricité. Les gaz employés dans le refroidissent de l’air sont de puissants gaz à effet de serre. Or, si l’électricité employée  n’est pas décarbonée, elle participe au dérèglement climatique.

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Néanmoins, pour la France, « la production photovoltaïque d’électricité devrait être suffisante à l’horizon 2035 pour alimenter ces solutions actives de rafraîchissement, sous réserve notamment de faire fonctionner ces équipements durant les horaires de production solaire et de maîtriser les températures de consigne », d’après l’ADEME et RTE. L’ADEME préconise de limiter autant que possible la climatisation en misant avant tout sur « le confort d’été » des bâtiments, c’est-à-dire au moment de leur conception ou rénovation par le choix des matériaux, de leur orientation, de leur enveloppe. Cette approche repose sur des « solutions passives pour aider à mieux supporter les vagues de chaleur dans les bâtiments. »

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Les logements ne sont pas les seuls concernés, les dernières vagues de chaleur ont fortement impacté les écoles et les prisons, révélant la nécessité de les rénover tant pour en réduire l’empreinte énergétique que pour aider leurs occupants à surmonter les épisodes de chaleur.

« Les protections solaires extérieures doivent permettre de doser l’apport de lumière nécessaire sans vivre dans le noir en journéetout en faisant circuler l’air plus frais la nuit. Elles devront aussi empêcher les risques d’intrusion ou ceux liés aux intempéries, moustiques… », indique Hakim Hamadou, expert à l’ADEME Auvergne-Rhône-Alpes au Service Bâtiment et co-auteur de l’avis de l’ADEME sur le confort d’été.

Changer ses comportements

Enfin, si les solutions techniques et technologiques ne suffisent pas, il convient de rappeler que modifier nos comportements est possible en décalant par exemple les heures de travail ou d’activités aux moments les plus frais de la journée (matin et soirée). Et de faire des plus chauds des moments de répit.

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La physiologie humaine rappelle les limites.  Cependant le droit français ne fixe pas de seuil de températures au-delà duquel travailler s’avère dangereux. « La chaleur peut constituer un risque pour les salariés. La réglementation ne prévoit pas de température à partir de laquelle il convient d’agir en prévention, ou bien, au-delà de laquelle il serait interdit de travailler », résume l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS). Il donne des repères pour agir : « les valeurs de 30 °C pour une activité sédentaire et 28 °C pour un travail nécessitant une activité physique peuvent être utilisées comme repères pour agir en prévention. Toutefois, certaines situations de travail peuvent être dangereuses en-dessous de 28 °C ou maîtrisées au-delà de 30 °C car la température de l’air ne suffit pas à évaluer les risques liés aux ambiances thermiques chaudes. »

La chaleur représente non seulement un risque pour la santé et la productivité mais aussi pour l’’économie, selon plusieurs études. Pour l’année 2025, les vagues de chaleur pourrait diminuer de 0.5 point la croissance du PIB pour l’Union européenne.

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Par ailleurs, il est encore possible de limiter la hausse des températures. L’ADEME rappelle que « s’adapter ne signifie pas relâcher les efforts sur l’atténuation au changement climatique. Moins le thermomètre grimpera, moins le défi du rafraîchissement sera grand. »

Julien Leprovost

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Pour aller plus loin

La vague de chaleur d’août 2003 : que s’est-il passé ?

Canicule, pic ou vague de chaleur ? | Météo-France

Vagues de chaleur : la climatisation va-t-elle devenir indispensable ? – ADEME Infos

[Avis de l’ADEME ] Vagues de chaleur : la climatisation va-t-elle devenir indispensable ? – Agence de la transition écologique

AVIS de l’ADEME : Vagues de chaleur : la climatisation va-t-elle devenir indispensable ?

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