Ukraine : le Brésil va exporter plus de maïs, mais craint de manquer d’engrais russes

Moisson Brésil Russie conflit agriculture

Moisson du maïs le 5 septembre 2019 à Ruropolis au Brésil © AFP/Archives NELSON ALMEIDA

Rio de Janeiro (AFP) – Aubaine pour ses exportations de maïs ou inquiétude pour ses importations massives d’engrais, le Brésil, producteur agricole de premier plan, attend avec préoccupation que se précise l’impact de la guerre de la Russie contre l’Ukraine, pour l’instant très imprévisible.

Depuis le début des attaques sur l’Ukraine par la Russie fin février, le doute plane sur la capacité des deux pays, respectivement quatrième et cinquième exportateurs mondiaux de maïs lors de la saison 2019-2020, d’après les chiffres du département américain de l’agriculture (USDA), à assurer les livraisons de la céréale, dont les cours ont fortement grimpé.

Cela pourrait représenter à court terme une aubaine pour les producteurs du Brésil, troisième exportateur mondial de maïs.

Après avoir connu une forte baisse l’an dernier en raison des conditions climatiques, la récolte brésilienne 2021/2022 de maïs pourrait augmenter de 29% par rapport à la précédente, a annoncé jeudi dernier la Compagnie nationale d’approvisionnement (Conab) dans son rapport mensuel.

« Le prix du maïs a atteint un des niveaux les plus élevés jamais observés et il est attractif pour le producteur brésilien, un facteur qui contribue à la progression de la surface de plantation » pour le maïs de seconde récolte, la plus importante de la saison, explique à l’AFP João Pedro Lopes, de la firme d’analyse des marchés des matières premières StoneX.

Concernant les ventes à l’étranger, « l’augmentation de la production brésilienne, alignée à une demande mondiale en hausse et un taux de change favorable, devrait permettre une augmentation de 67% des exportations » de maïs brésilien en 2022, souligne l’organisme gouvernemental.

La première économie d’Amérique latine pourrait grimper à la deuxième place des exportateurs en 2021-2022 si sa bonne récolte se confirme, selon les estimations de l’USDA.

L’approvisionnement en engrais

Les effets du conflit se font d’ailleurs déjà sentir sur les exportations brésiliennes : « La demande étrangère pour un envoi immédiat de maïs brésilien s’est manifestée soudainement, ce qui n’est pas normal pour le premier semestre (lors duquel le Brésil n’exporte pas, ndlr) et la demande s’est aussi accélérée pour le second semestre », relève Paulo Roberto Molinari, analyste chez Safras e Mercado.

Cesario Ramalho, président institutionnel de l’Association brésilienne des producteurs de maïs (Abramilho), appelle à la prudence pour la suite: « Nous n’avons pas de garantie sur la question du transport maritime des marchandises », gravement perturbé par la guerre, « ni sur celle de l’approvisionnement en engrais », explique-t-il à l’AFP.

Le Brésil importe environ 80% des engrais qu’il utilise et 20% d’entre eux proviennent de la Russie, son premier fournisseur, dont les capacités à exporter sont affectées par les sanctions économique occidentales, tout comme son voisin le Bélarus, autre grand fournisseur d’engrais, lui aussi durement sanctionné.

La semaine dernière, la ministre brésilienne de l’Agriculture Tereza Cristina a affirmé que le Brésil disposait de stocks suffisants jusqu’au mois d’octobre – tout en indiquant que le pays négociait déjà avec d’autres importants exportateurs d’engrais.

Activités minières en terres indigènes

Dans son Plan national sur les engrais pour 2050, qui vient d’être lancé et auquel l’AFP a eu accès, le gouvernement brésilien entend aussi stimuler la production domestique de ces produits et investir dans la « découverte de nouveaux gisements » de minéraux dans le pays, et dans leur exploitation.

Le sujet a également été évoqué lundi dernier par le président brésilien Jair Bolsonaro, pour qui le conflit entre la Russie et l’Ukraine représente « une opportunité » pour faire approuver un projet de loi polémique autorisant l’activité minière sur les terres indigènes en Amazonie notamment, actuellement en discussion au Congrès.

En forte hausse, le coût des engrais préoccupe le secteur agricole: en février, le prix de la tonne d’engrais importée par le Brésil avait déjà bondi de 129% par rapport à février 2021.

Gros demandeurs de rations animales à base de maïs ainsi que de soja, dont les prix ont aussi augmenté, les élevages de poulets et de porcs, viandes pour lesquelles le Brésil était respectivement premier et quatrième fournisseur mondial en 2020, voient également leurs coûts de production s’accroître.

« Ceci peut avoir un impact sur la quantité produite, en raison de marges plus faibles », souligne Fernando Ferreira, du cabinet d’investissements XP Investimentos.

© AFP

Également sur GoodPlanet Mag’ :

Ukraine-Russie : les industriels craignent que les pénuries freinent la transition écologique

De l’urine recyclée pour les futurs engrais

Déforestation : le bœuf brésilien mis au ban par des supermarchés européens

COP26 : doutes sur l’engagement du Brésil à lutter contre la déforestation

Un commentaire

Ecrire un commentaire

    • Francis

    J’ignore quelle est la plante récoltée sur la photo d’illustration, mais ce n’est certainement pas du maïs.