La COP30 de Belém au Brésil est, une fois de plus, présentée comme la COP de la dernière chance tandis que les pessimistes et les détracteurs de l’action climatique estiment que ces rendez-vous ne servent à rien. Une décennie après l’Accord de Paris qui fixait un objectif climatique clair et compris de tous, le premier bilan de l’action climatique semble loin d’être satisfaisant, la COP de 2025 a pourtant encore un rôle à jouer. C’est ce qu’explique Jean-Baptiste Poncelet qui dirige le pôle Action Carbone solidaire de la Fondation GoodPlanet. Il a participé à plusieurs COP clefs dont celle de Paris en 2015 en tant qu’observateur de la société civile.

Dix ans après l’Accord de Paris, la 30ème Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques ou « COP 30 » se tient à Belém au Brésil du 10 au 21 novembre.
Elle s’ouvre dans un contexte inédit et quelque peu alarmant : celui d’une remise en cause du multilatéralisme et de la science sur fond de climato-scepticisme croissant et d’une multiplication des événements climatiques extrêmes.
Or, si la COP30 suscite autant d’attentes, c’est que l’urgence climatique n’a jamais été aussi tangible. D’une part, la COP30 doit dresser un premier bilan de l’Accord de Paris, qui avait en son temps su relancer la dynamique de l’engagement en faveur du climat. Ce dernier s’est étiolé et les actes n’ont pas été à la hauteur des promesses. Et, de l’autre, en se tenant au Brésil, au plus près de l’Amazonie, après deux précédentes COP marquées par le poids du lobby des énergies fossiles, le sommet de Bélem espère redonner une impulsion forte à l’action climatique. La COP30 réussira-t-elle à sauver la gouvernance internationale et la mobilisation contre le réchauffement ? Est-ce la COP de la dernière chance ?
Les grands acquis de l’Accord de Paris
Il est nécessaire de revenir dix ans en arrière pour se rappeler que l’Accord de Paris signé en France en 2015 témoignait du renouveau de l’engagement de la communauté internationale en faveur de la préservation du climat. Elle entérinait l’intention des nations de cantonner autant que possible la hausse des températures à 2 degrés. C’est en cela que la 21ème Conférence des parties (COP) de la convention cadre des nations unies sur les changements climatiques (CNUCC) qui s’est tenue en France en 2015 était une avancée majeure.
L’accord dit de Paris est considéré comme le premier traité international « universel » en matière de lutte contre le réchauffement planétaire. « Universel » car il fut le premier à intégrer la quasi-totalité de la communauté internationale (195 pays signataires + l’Union européenne) et à lui imposer des obligations précises et substantielles.
10 ans après, où en sommes-nous ?
La somme des engagements des Etats signataires ne permet pas aujourd’hui d’inscrire la planète dans une trajectoire de 1,5°C ni même de 2°C de réchauffement telle que convenue à Paris.
S’il est important de souligner que la trajectoire menait le monde vers un horizon à +4°C avant la COP 21, les dernières analyses des « contributions nationales » (CDN) conduisent vers un réchauffement de +2,8°C. Même si c’est un progrès, le compte n’y est donc pas !
[À lire aussi Pourquoi la COP29 est « un échec », entretien avec le chercheur CNRS Xavier Arnauld de Sartre]
« La trajectoire menait le monde vers un horizon à +4°C avant la COP 21, les dernières analyses des « contributions nationales » (CDN) conduisent vers un réchauffement de +2,8°C »
Sur le plan financier, les 100 milliards de dollars promis à Paris n’ont pas été fournis. Par ailleurs, à l’issue de la COP 29 en 2024, l’objectif avait été relevé à 300 milliards de dollars par an d’ici 2035, ambition réhaussée certes mais encore insuffisante au regard des besoins qui se chiffrent à 1300 milliards par an ! On est donc là aussi bien loin du compte.
L’élan donné en 2015 ne s’est donc pas traduit par des faits et ce malgré l’urgence à agir et une mobilisation sans précédent. C’est là tout l’enjeu de cette 30ème COP : remobiliser la communauté internationale et agir dès maintenant.
La relève de l’ambition passera par la mobilisation de tous les acteurs
À l’heure où nous écrivons ces lignes, les Nations Unies attendent encore de nombreuses « contributions » (CDN) des Etats. Celles-ci, dont celle de l’Union européenne, doivent fixer une réelle ambition et nous remettre sur les rails des 2°C. La marge de manœuvre se réduit mais il est encore temps d’agir selon les scientifiques du groupe intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC). Plus tard, il sera trop tard !
Mais, les dernières décennies ont montré que tout ne peut pas reposer sur les États. À côté de ceux-ci, d’autres acteurs doivent continuer à se mobiliser à leurs échelles respectives : entreprises, collectivités, universités, ONG et citoyens etc. Car, réduire les émissions de gaz à effet de serre consiste avant tout à repenser nos modes de vie, de production, de consommation et in fine de vivre-ensemble. Créer de nouveaux modèles, montrer puis démontrer qu’agir est à la fois possible et réplicable sont des aspects essentiels de la lutte contre le changement climatique. Cela permet notamment de ne pas succomber au fatalisme. C’est pourquoi la COP30 doit aussi être celle qui rappelle qu’il ne faut pas se résigner, bien que la transition énergétique et écologique prenne du temps, elle reste souhaitable et réalisable.
Financer la transition écologique et solidaire
Derrière une intention commune de préserver le climat se pose la question des moyens pour y parvenir. Depuis des années, les sujets liés au financement de la transition, ainsi que des « pertes et dommages », sont au cœur des discussions. En effet, derrière la crise climatique, se cachent des questions d’inégalités entre les pays industrialisés et les pays en développement, de vulnérabilité des pays face aux risques et de responsabilité historique dans l’utilisation des énergies fossiles. En dépit du fait que le changement climatique soit un défi global, tous les pays n’ont pas le même niveau de responsabilité dans les émissions de gaz à effet de serre.
[À lire aussi François Gemenne : « la COP30 abordera des thèmes peu traités jusqu’ici dans les autres COP, comme la déforestation et l’agriculture »]
L’Accord de Paris doit être compris comme un mécanisme de solidarité et de coopération permettant notamment de partager le poids de la crise climatique. Les pays industrialisés sont les premiers responsables de la situation actuelle puisqu’ils ont relâché massivement des tonnes de gaz à effet de serre depuis la première révolution industrielle (fin du 18ème siècle). En parallèle les pays du Sud, bien que moins responsables du phénomène en raison de leur développement ultérieur, subissent de plein fouet les effets du changement climatique. Cet état de fait se traduit par un concept clef du système climatique onusien : le principe de responsabilité commune mais différenciée. En vertu de ce principe les pays riches doivent contribuer à soutenir les pays du sud dans leur transition vers un modèle décarboné et pour s’adapter aux effets déjà présents du changement climatique. L’un des enjeux de la COP30 sera donc de trouver et de flécher les financements pour la transition et l’adaptation. C’est un point clef des négociations et de la confiance entre les États du Sud et ceux du Nord.
Toutefois, à Belém les Etats doivent plus que jamais prendre leur responsabilité en confirmant leurs engagements financiers : augmenter significativement l’enveloppe et passer des 300 milliards promis en 2024 aux 1200 milliards nécessaires. En outre ils doivent préciser comment seront alloués ces fonds : vers l’atténuation (baisse des émissions) et l’adaptation.
Parmi les leviers de financement, la finance carbone valorise les réductions d’émissions de GES pour financer des projets d’atténuation, notamment via les marchés du carbone. Elle ne saurait bien sûr se substituer à l’aide publique au développement qui demeure le mécanisme clef de la coopération internationale pour faire face à l’urgence climatique.
La Fondation GoodPlanet déploie des projets relevant de la finance carbone depuis plus de 20 ans. Ces projets visant à réduire les émissions de GES en France et à l’international : en Inde à travers l’installation de plusieurs milliers de biodigesteurs pour réduire les émissions issues de la déforestation ou encore à Madagascar et au Cameroun grâce à plusieurs projets de gestion des déchets (à l’origine d’émissions de méthane, un gaz ayant un grand pouvoir réchauffant). La fondation GoodPlanet y intègre, aux côtés des enjeux climatiques, le respect de la biodiversité et des populations locales.
En matière d’adaptation au changement climatique la Fondation a contribué, principalement grâce à du mécénat, au développement de l’agroforesterie en France et en Amérique du Sud en particulier en permettant la plantation de milliers d’arbres pour assurer la robustesse des systèmes agricoles.
A travers tous ces projets, la Fondation a ainsi contribué à éviter l’équivalent des émissions annuelles d’une ville française de 500 000 habitants. Grâce aux contributeurs particuliers et aux entreprises qui financent ces projets, la Fondation démontre une fois de plus le rôle clef des ONG et des acteurs de terrain dans la transition écologique et solidaire.
Agir et donner envie d’agir
La solution à la crise climatique constitue un défi immense mais aussi une opportunité de faire évoluer nos modèles de société vers plus de sobriété, de résilience et de respect du Vivant. Les ONG sont déjà à l’œuvre. Aux décideurs rassemblés à Belém de prendre enfin leur responsabilité. La réponse à cette crise ne pourra être que collective.
Jean-Baptiste Poncelet, directeur du pôle Action Carbone Solidaire de la Fondation GoodPlanet
L’explication en vidéo par Jean-Baptiste Poncelet
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2 commentaires
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Duke
Bonjour,
Ce qui est énervant c’est la façon dont les scientifiques en désaccord avec le GIEC, votre seule source d’information, sont décrits par les gens comme vous: « les pessimistes et les détracteurs de l’action climatique estiment que ces rendez-vous ne servent à rien »…
Que les COP ne servent à rien, c’est une Lapalissade vérifiée depuis longtemps!
Quand on analyse les conclusions des travaux des scientifiques du GIEC on s’aperçoit qu’elles sont totalement différentes de celles figurant dans le rapport annuel pour les décideurs qui lui n’est rédigé par aucun scientifique.
Ce que vous décrivez comme un consensus scientifique est une aberration, je vous partage la citation d’un scientifique que vous taxeriez aujourd’hui sans vergogne de « détracteur », voire de complotiste:
« Le génie a horreur du consensus parce que, lorsque le consensus est atteint, la pensée s’arrête. »
Bien à vous,
lucette TERRENOIRE
Bonjour, les grandes oubliées sont les zones humides terrestres ; 3% de nos espaces terrestres, dont 50% de détruites et 25% en dégradation … la stratégie des aires protégées correspond à 30% des 25% restantes. Or ce sont elles qui maintiennent l’eau dans les sols et favorisent un climat tempéré. Sans eau pas de vie. Personne n’en parle … Oubliées .. pourquoi ?