En Mongolie, un hiver extrême décime les cheptels des nomades

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Un chien hurle à la mort à côté de carcasses gelées de moutons et de chèvres, pendant des températures extrêmement froides à Bayanmunkh, dans la province de Khentii, le 22 février 2024 en Mongolie © AFP Byambasuren BYAMBA-OCHIR

Bayanmunkh Sum (Mongolie) (AFP) – En Mongolie, pourtant habituée aux températures polaires, un hiver particulièrement rude cette année a décimé deux millions d’animaux d’élevage et mis sur la paille des bergers désormais privés de leur principal moyen de subsistance.

La Mongolie, enclavée entre la Chine et la Russie, s’étend sur un vaste territoire grand comme trois fois la France et composé de montagnes et de plateaux vallonnés.

Les températures en hiver peuvent chuter par endroits jusqu’à -50°C.

Mais un froid extrême couplé aux plus importantes chutes de neige dans le pays depuis 1975 ont créé cette année des conditions invivables pour le bétail des nomades de Mongolie.

Ceux-ci représentent environ un tiers de la population du pays, qui compte près de 3,3 millions d’habitants.

« L’hiver a débuté par de fortes chutes de neige, mais elle a fondu à cause d’une hausse soudaine des températures », indique à l’AFP l’un d’entre eux, Tuvshinbayar Byambaa.

« Puis les températures ont à nouveau chuté et la neige fondue s’est transformée en glace » si épaisse qu’elle prive les animaux d’accès à la nourriture plus en profondeur, déplore Tuvshinbayar Byambaa.

Résultat : des carcasses gelées d’animaux morts de faim se sont amoncelées dans la steppe.

« Dzud » dévastateur

Le gouvernement mongol évalue leur nombre à plus de deux millions de bêtes, un chiffre amené à augmenter avec la prolongation de l’hiver jusqu’en avril selon un rapport des Nations unies. Fin 2023, la Mongolie comptait 64,7 millions de têtes, dont des moutons, chèvres, chevaux et vaches, selon les données officielles.

Ce phénomène naturel dévastateur qui rend inaccessible l’herbe au bétail est connu sous le nom de « dzud ».

Caractérisé par un hiver extrêmement rigoureux et de fortes chutes de neige, le « dzud » survient habituellement une fois tous les douze ans environ, mais ce phénomène semble se reproduire bien plus fréquemment désormais, en raison du changement climatique, indique les Nations unies.

Six dzuds ont déjà frappé le pays ces dix dernières années, y compris lors de l’hiver 2022-2023 lorsque 4,4 millions d’animaux sont morts de faim.

Mais le phénomène a été exacerbé cet hiver par une sécheresse estivale qui a raréfié les pâturages l’été dernier et empêché les bêtes de se nourrir suffisamment pour supporter ensuite les rigueurs hivernales.

« Prier pour un temps plus chaud »

Selon l’ONU, 70% du territoire de la Mongolie est actuellement touché par un « dzud » ou s’approche du climat caractéristique d’un dzud.

Or, à la même époque en 2023, ce chiffre s’élevait à 17%.

Dans la steppe, la glace qui empêche les bêtes d’accéder à l’herbe ne laisse aux éleveurs d’autre choix que de s’endetter pour acheter de la nourriture à leur bétail.

Mais les éleveurs nomades bloqués par la neige se retrouvent pris au piège dans des zones particulièrement froides et ne peuvent se rendre dans les villes où s’achète la pâture.

« Les changements météorologiques sont si soudains ces derniers temps », se lamente Tuvshinbayar Byambaa.

« Il devient trop difficile d’être éleveur », estime le berger. « L’été, nous souffrons de la sécheresse et des inondations. Puis vient l’hiver et le dzud ».

Le gouvernement mongol a promis de venir en aide aux éleveurs en leur distribuant du foin, afin d’éviter de nouvelles pertes.

Comme Tuvshinbayar Byambaa, les nomades prient pour qu’un temps plus chaud vienne mettre fin à ce phénomène climatique.

« Tous les éleveurs prient pour qu’un temps plus chaud fasse fondre cette glace et que nos animaux atteignent l’herbe », confie Tuvshinbayar Byambaa.

« Je vais perdre mes animaux si la neige ne fond pas dans les mois à venir », avertit-il.

Lors de l’hiver 2010-2011, un « dzud » dévastateur avait tué plus de 10 millions de bêtes, soit à l’époque près d’un quart du cheptel total de la Mongolie.

© AFP

2 commentaires

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    • Francis

    Les mongols ne sont pas capables de produire et stocker du foin pour nourrir leurs animaux pendant l’hiver ? C’est plus compliqué pour des nomades que pour des sédentaires, mais leur gouvernement pourrait avoir une politique agricole qui réponde aux besoins et contraintes du pays !

    • Jean-Pierre Bardinet

    « Ce phénomène semble se reproduire bien plus fréquemment désormais, en raison du changement climatique». Je l’attendais, celle-là. Car, pour la propagande réchauffiste, des froids intenses ne peuvent être causés que par un réchauffement/dérèglement/changement climatique et ils ne peuvent en aucun cas venir de la variabilité naturelle.