Les vignerons grecs s’essayent au vieillissement en rivière

vignerons grecs vieillissement rivière

Un caisson métallique contenant 500 bouteilles de vin Xinomavro est plongé dans l'Arapitsa, le 5 septembre 2021 à Naoussa, dans le Nord de la Grèce © AFP Sakis MITROLIDIS

Naoussa (Grèce) (AFP) – Sur la rivière Arapitsa à Naoussa, dans le Nord de la Grèce, une grue plonge une caisse de métal remplie de 500 bouteilles de vin, que les viticulteurs locaux espèrent voir vieillir et se bonifier dans les eaux fraîches et limpides.

Loin de la mer et de tout lac, les producteurs ont choisi le lit de l’Arapitsa pour créer des celliers aquatiques et tenter le premier vieillissement d’un vin grec dans une rivière.

L’élevage du vin en mer est une vraie tendance, en particulier en France, où des bouteilles ont déjà été immergées par 10 à 90 mètres de fonds dans l’Atlantique pour six à 24 mois.

Sous l’eau, les conditions de conservation sont censées être idéales à une température constante, fraîche et dans une obscurité presque intégrale. La maturation est plus rapide, selon des viticulteurs français qui ont expérimenté le procédé.

L’expérience a été également menée au fond du lac Léman en Suisse, mais l’immersion en rivière semble innovante.

Sous les chants traditionnels grecs, 22 vignerons de Naoussa regardent fièrement le procédé qui, pensent-ils, donnera des arômes différents à leur production de Xinomavro, une variété de raisin à peau foncée en majorité plantée dans le Nord de la Grèce.

« Les bouteilles sont placées à 12 mètres de profondeur et nous voulons les garder là pour douze ans au moins », décrit à l’AFP Georges Fountoulis, le président de la coopérative de vins Vaeni Naoussa, qui représente 50% de la production de vins de la région.

Un test annuel sera effectué pour vérifier l’évolution du procédé, précise-t-il.

Plantées sur les pentes du mont Vermio, les vignes de Naoussa produisent essentiellement du Xinomavro, littéralement « acide noir », pour la couleur sombre des grains et le taux d’acidité élevé de cette variété.

Le Xinomavro est l’un des quatre principaux cépages de Grèce, avec l’Assyrtiko, le Moschofilero et l’Agiorgitiko.

« Le Bourgogne de Grèce »

Environ 5.500 tonnes de Xinomavro sont produites annuellement dans la région.

« Naoussa est la ville du vin, la Bourgogne de la Grèce comme on l’appelle ici », a indiqué à l’AFP le maire de Naoussa Nikolas Karanikolas.

« C’est une expérience et nous allons attendre de voir comment l’identité du vin va évoluer dans ces conditions. Nos vignerons sont bien organisés, ouverts et toujours innovants. Ils exportent leurs vins dans plus de 45 pays », a ajouté M. Karanikolas.

Les oenologues ne savent pas quel sera le résultat du test mais ils se montrent enthousiastes par l’ensemble du procédé.

« Nous savons que l’oxygène est insoluble dans l’eau, nous estimons la température moyenne à 16 degrés Celsius. La qualité de l’eau est excellente et nous voulons voir comment le soleil et l’environnement naturel de la rivière affecteront le vin », souligne l’oenologue George Diamantakos.

La région est essentiellement constituée de petites exploitations familiales à la production limitée.

Dans un passé proche, presque toutes les maisons faisaient leur propre vin.

« On surnomme le Xinomavro le +Barolo du pauvre+, mais on est très fiers de nos produits », glisse Petros Karydas, en référence au célèbre vin d’Italie, dont le cépage principal est le Nebbiolo.

M. Karydas s’occupe d’un domaine qui produit 12.000 bouteilles de vin par an et qui exporte au Royaume-Uni et aux États-Unis.

Impact du changement climatique

Joachim Chrysochoou a lui aussi poursuivi la tradition familiale viticole au sein d’un domaine qui produit 350.000 bouteilles chaque année.

Il fabrique pour sa part l’unique vin blanc placé dans le cellier aquatique, issu du cépage Prekniariko, qui a repris vie dans ses vignes.

Mais sa fille Nana Chrysochoou, œnologue, est plus préoccupée par le changement climatique que par les résultats de cette expérience.

« Année après année, nous voyons les conséquences néfastes du changement climatique sur nos vignes », s’indigne-t-elle auprès de l’AFP.

« Cette année, nos pieds ont connu un véritable choc à cause de la canicule prolongée et de la sécheresse. Je ne sais pas si on pourra continuer à récolter dans 20 ans si les mêmes conditions climatiques se poursuivent », s’inquiète-t-elle.

©AFP

Gel: au moins 2 milliards d’euros de manque à gagner pour la viticulture

Pour le vin français, une course contre la montre pour s’adapter au changement climatique

Ecrire un commentaire