Qui a tué l’ours? L’enquête se heurte à l’omerta en Ariège

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Photo publiée sur le compte Twitter de la ministre de la Transition écologique, Elisabeth Borne, le 9 juin 2020, d'un ours abattu en Ariège © Compte Twitter de la ministre de la Transition écologique/AFP/Archives Handout

Ustou (France) (AFP) – Dans les montagnes d’Ariège, malgré les 45.000 euros de récompense offerts, les langues ne se délient pas et l’incertitude demeure. L’ours abattu a-t-il été traqué, tué par un ou plusieurs tireurs ?

« C’est de la terreur, (les opposants à l’ours) font régner la peur pour que les gens ne parlent pas. Ils ont peur des représailles. Il y a un risque qu’on ne connaisse pas l’auteur des faits », s’alarme Alain Reynes, figure du mouvement pro-ours et président de l’association Pays de l’ours. Il réclame le remplacement de l’ours tué.

« J’espère bien qu’on ne saura jamais, lance Eric André, un éleveur dont trois brebis ont été tuées par l’ours depuis mi-juin. C’est un sujet très sensible, ça va mal se terminer ». « Et cette récompense, c’est une manœuvre digne des nazis, c’est lamentable », peste-t-il.

Après la découverte d’un ours de 4 ans et 100 kg, tué par balle dans une zone escarpée à 1.800 mètres d’altitude près de la station de ski de Guzet, l’association Sea Shepherd a promis une récompense en échange d’informations menant à l’arrestation du ou des tueurs du plantigrade.

Secret

Les personnes interrogées jusqu’ici par les enquêteurs « ne sont pas très coopératives. Les gendarmes se heurtent au mur du silence », a dit à l’AFP une source proche du dossier.

Les gardiens du secret ont reçu la semaine dernière le soutien appuyé de la présidente du Conseil départemental de l’Ariège Christine Tequi.

« La montagne restera certainement muette. Ce serait alors la meilleure réponse qui peut être apportée à ceux qui pensent que tout s’achète sans se soucier de la haine et de la violence que leur initiative est susceptible d’engendrer », a-t-elle écrit.

Philippe Lacube, chef de file emblématique des opposants à l’ours, dénonce « ces méthodes ». « La délation, ce sont les heures les plus sombres de notre histoire. Ce n’est pas dans notre culture de montagnards », souffle-t-il.

Attaques continues

« Depuis la mort de cet ours, les attaques de brebis continuent dans cette zone. Les éleveurs sont excédés. Chaque jour, on a entre deux et quatre brebis tuées. J’ai la hantise d’un autre accident, d’un suicide, les gens sont à bout », dit Philippe Lacube.

Initialement de 10.000 euros, la récompense est passée à 45.000 euros en une semaine. « C’est du jamais vu, nous recevons des dons spontanés de partout, y compris des Pyrénées », fait remarquer la présidente de Sea Shepherd France Lamya Essemlali.

« Si on savait que l’info circule, que les enquêtes sont facilement élucidées, on n’aurait pas eu recours à un tel procédé. L’objectif est d’aider l’enquête à aboutir. Il y a une attente de justice de l’opinion publique ».

Un calme apparent enveloppe le Cirque de Gérac, où l’ours a été tué. La mort de l’ours scandalise les randonneurs, qui rêvent d’en apercevoir un . « On ne peut pas éliminer tout ce qui gène », soupire un Toulousain qui scrute l’horizon avec ses jumelles.

Samedi à Foix, une manifestation a réuni quelques militants pro-ours. Sur leurs pancartes, on pouvait lire « Non à la mafia anti-ours » ou « Dénoncer un meurtre est une obligation morale et citoyenne ».

C’est la première fois qu’un ours est abattu depuis qu’un chasseur a tué l’ourse Canelle, en 2004.

Et le deuxième ours qui meurt dans les Pyrénées cette année, après que Cachou a été retrouvé mort en avril sur un versant espagnol. Autopsié, les résultats de l’expertise n’ont pas été officialisés.

« Il faut obtenir réparation : le remplacement de l’ours, sinon les braconniers auront gagné », plaide Alain Reynes.

L’ours abattu a été retrouvé sur la commune d’Ustou, « un fief des anti-ours », rappelle Patrick Leyrissoux, administrateur de Ferus, autre association historique pro-ours.

Pour lui, les éleveurs exagèrent et attribuent à l’ours plus de brebis qu’il ne peut en tuer. « Dans les autres pays européens on a 1,5 brebis tuée et indemnisée par ours, par an. L’an dernier dans les Pyrénées, c’était 31 par ours et par an. On doit avoir des ours polaires (100% carnivores) peints en marron », ironise-t-il.

© AFP

3 commentaires

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    • MAGNE

    Merci SEA SHEPHERD (et ses donateurs) de mettre la pression pour que la Biodiversité avec 1 grand B reprenne sa place . Nous sommes UN TOUT : humains ,faune, flore ,air ,eau….

    • Michel CERF

    Ce qui est digne des nazis c’est d’exterminer les espèces qui dérangent et d’envoyer ses brebis à l’abattoir .

    • Méryl Pinque

    Je ne saurais mieux dire que Michel Cerf.