Juliette Hamon, autrice de Oser partir seule ! : « voyager seule, c’est vraiment ressentir une grande liberté »

Couverture du livre de Juliette Hamon

Juliette Hamon partage ses aventures sur son compte Instagram @labretonneenstop

Dans son livre Oser partir seule ! Le guide pour les aventurières qui voyagent en solitaire aux éditions Larousse, Juliette Hamon donne des conseils et rassure les femmes qui voudraient se lancer dans l’aventure en solitaire.

Il y a deux ans, en février 2023, Juliette Hamon connue sous le pseudo @labretonneenstop, quittait sa Bretagne natale, sac sur le dos et pouce en l’air pour partir faire le tour du monde à pied et en stop. Depuis, l’aventurière de 27 ans, a vécu plusieurs semaines avec une famille nomade des steppes mongoles, participé à des mariages au Pakistan ou encore travaillé dans une ferme de myrtille en Australie. Mais au milieu de tout ça, Juliette Hamon écrivait son livre de conseils, Oser partir seule ! Le guide pour les aventurières qui voyagent en solitaire aux éditions Larousse disponible en librairie depuis mars. Pour GoodPlanet Mag’, la jeune auto-stoppeuse revient sur son livre, le volontourisme et la santé mentale en voyage.

Pourquoi avoir ressenti le besoin d’écrire un livre de conseils pour les femmes voyageant seules et non un journal de bord de vos aventures ?  

Ça a été tout un dilemme. Honnêtement, en écrivant un livre qui s’adresse aux aventurières et aux femmes, j’avais peur d’accentuer la binarité homme-femme et l’idée que voyager en tant que femme seule puisse être plus dangereux. Et en fait, plus je partageais sur les réseaux sociaux, plus je discutais avec des amis ou même d’autres personnes que je rencontrais sur ma route, plus je me rendais compte qu’encore aujourd’hui, il y a quand même des grosses différences dans l’expérience et le vécu des femmes qui voyagent seules par rapport à celui des hommes.

« Je ne considère pas que ce soit uniquement un livre de conseils »

Je me suis dit que ces conseils étaient importants. Ce sont ceux que j’ai pu avoir et qui m’ont beaucoup aidé avant de partir en enlevant des zones d’ombre sur mes doutes et mes questionnements. J’avais envie de mettre ma petite pierre à l’édifice.

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Pendant son tour du monde Juliette Hamon ne prend avec elle que ce qui lui est réellement utile ©Juliette Hamon

Mais je ne considère pas que ce soit uniquement un livre de conseils. À mon sens, c’est aussi un peu partager des réflexions que j’ai et qui se sont construites grâce à d’autres aventurières. Pour moi, c’est un peu un mélange des deux.

Pourquoi voyager seule ?

En fait, j’adore voyager à plusieurs. Et il m’arrive souvent, pendant cette aventure de voyager à deux ou avec des personnes que je rencontre.

« Voyager seule, c’est vraiment ressentir une grande liberté »

Mais j’ai l’impression que voyager seule c’est vraiment ressentir une grande liberté. Ça m’oblige à me poser fondamentalement la question de savoir ce que j’ai vraiment envie de faire. Et c’est aussi et surtout parce que j’ai l’impression qu’en étant seule, je suis beaucoup plus ouverte à la rencontre et au lieu dans lequel je suis. J’ai l’impression que je vais connecter de manière beaucoup plus profonde avec les personnes que je rencontre.

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Il y a plein de fois où j’étais sur la terrasse d’un café, juste à regarder un peu les gens passer, en souriant. Et finalement, on discute, ils vont m’inviter à aller boire un café chez eux. J’ai rencontré plein de personnes. Et toutes ces rencontres, je suis presque sûre, que je ne les aurais jamais faites si j’étais avec quelqu’un.

La santé mentale a une place importante dans votre livre, pourquoi ?

C’était important pour moi d’en parler parce que j’ai l’impression qu’il y a parfois un peu cette idéalisation du voyage comme l’espace qui soignerait tous les maux. On me demandait souvent : « est-ce que tu es parti parce que tu avais envie de fuir quelque chose ? » Je trouve intéressant le fait qu’il y ait vraiment cette perception du voyage comme un espace où tout va bien aller.

« Le voyage n’est pas un espace magique où tout se résout »

Mais je trouve ça hyper important aussi de parler du fait que le voyage n’est pas un espace magique où tout se résout. C’est surtout un temps où on est ouvert à plein de choses et qu’il y a beaucoup de hauts et de bas. Enfin, Je pense que si on part en se disant ça, potentiellement, on est plus enclin à les accepter que s’ils surviennent en plein milieu du voyage et qu’on se retrouve avec cette forme de culpabilité de ne pas se sentir bien.

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Voyager seule permet de faire des rencontres. ©DUFA Devyatov

Il me semble donc important d’en parler afin de déculpabiliser. Avoir des hauts et des bas en voyage, c’est normal. Le voyage, c’est la vie en général.

Dans Oser partir seule ! Le guide pour les aventurières qui voyagent en solitaire, vous parlez des dangers du tourisme de masse. Pourquoi faut-il en sortir ?

Il y a plusieurs choses. Je pense que déjà le tourisme de masse s’intensifie de plus en plus. Parce qu’on va avoir, par exemple, des liaisons aériennes qui vont desservir un même endroit. Du coup, il va y avoir une forte concentration de touristes à ces endroits-là. Il y a aussi les réseaux sociaux qui montrent de plus en plus certains endroits. Donc pareil, ça attire de plus en plus vers ces lieux.

« Plus il y a du tourisme à un endroit spécifique, plus des grands groupes internationaux vont s’y implanter »

La deuxième chose, c’est qu’on a tendance à nous faire croire que le tourisme va, par exemple, profiter à l’économie locale. Alors qu’il y a beaucoup d’études qui montrent qu’au contraire, généralement, plus il y a du tourisme à un endroit spécifique, plus des grands groupes internationaux vont s’y implanter. C’est un peu le serpent qui se mord la queue. Finalement, les locaux vont peu bénéficier de ce tourisme.

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Après comment en sortir ? C’est compliqué comme question honnêtement, parce que je pense qu’il n’y a vraiment pas de recette magique. En-tout-cas moi, je ne l’ai pas.

Si vous aviez un conseil pour éviter de tomber dans le tourisme de masse se serait lequel ?

En incitant les personnes à aller dans des endroits inexplorés ou se rendre sur des sites connus à des moments de moindre affluence. Éviter le tourisme de masse, c’est peut-être déjà partir à des saisons différentes. 

« Éviter le tourisme de masse, c’est surtout essayer de réfléchir aux raisons qui nous motivent à aller dans une destination »

Je pense qu’éviter le tourisme de masse, c’est surtout essayer de réfléchir aux raisons qui nous motivent à aller dans une destination. Et ensuite de garder les critères principaux qui nous tiennent vraiment à cœur et d’essayer de trouver une alternative qui coche ces cases-là.

Dans votre livre vous parlez du risque de tomber dans le « volontourisme », pouvez-vous nous en dire un peu plus, que mettez-vous derrière ce mot et surtout comment l’éviter ?

Il y a eu l’essor ces dernières années notamment de la volonté de faire du volontariat tout en voyageant. C’est ce qu’on appelle volontourisme. Un peu dans cette optique qui ne part pas forcément d’une mauvaise intention mais d’une quête de sens. Il y a eu de plus en plus de personnes qui ont eu envie de s’investir à l’international. Notamment chez les jeunes occidentaux. Sauf que la pratique pose question. Déjà, elle a créé des situations un peu négatives. Il y a eu, par exemple, des abus dans les parcs en Afrique pour protéger les animaux sauvages. Les organisations gagnaient énormément d’argent avec ces personnes qui voulaient venir s’engager et qui payaient pour venir faire un volontariat. Du coup, ça revenait à des situations totalement néfastes. Il y a eu un trafic d’animaux pour pouvoir ensuite prétendre qu’on les protégeait.

« Si on a peu de temps, l’idéal serait peut-être de partir à l’aventure et ensuite de s’engager près de chez soi pour pouvoir avoir un impact peut-être un peu plus fort. »

Mais il y a aussi le fait que parfois, même si c’est une organisation qui est tout à fait louable, la question se pose par exemple en termes écologiques. Est-ce que partir une semaine à l’autre bout du monde faire du volontariat en prenant l’avion ça n’annule pas l’effet escompté ?

Parler du volontourisme me parait important. Parce que je pense qu’il y a de plus en plus de personnes qui ont envie de s’engager. Parfois, on envisage tout de suite le fait d’aller aider plus loin. Ou alors on veut combiner notre envie de découvrir des endroits avec le fait d’aider. J’aurais tendance à dire que si on a peu de temps, l’idéal serait peut-être de partir à l’aventure et ensuite de s’engager près de chez soi pour pouvoir avoir un impact peut-être un peu plus fort. C’est à nous individuellement de réfléchir. Est-ce que ma présence va apporter quelque chose ? Est-ce que le fait que je me rende sur place ne sera pas forcément bénéfique et peut être même nuisible ?

Madeleine Montoriol

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Pour aller plus loin

Oser partir seule ! Le guide pour les aventurières qui voyagent en solitaire par Juliette Hamon aux éditions Larousse.

article mit à jour le 16/06/2025

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