La transition énergétique accentue la pression sur l’approvisionnement en métaux, dont le cuivre

cuivre alerte approvisionnement

Rejets de la mine de cuivre de Chuquicamata, Chili (22°17' S – 68°52' O). © Yann Arthus-Bertrand

L’Agence Internationale de l’Énergie (IEA) alerte sur les conséquences de la forte demande dans les métaux nécessaires à la transition vers des énergies bas carbone. L’IEA a publié mercredi 21 mai un rapport sur le sujet qui prévient que l’approvisionnement dans les minéraux nécessaires à l’électrification et la décarbonation risque de ne pas pouvoir suivre la demande, notamment en ce qui concerne le cuivre.

Pour l’année 2024, la demande dans plusieurs métaux clefs pour l’électrification a été plus forte que prévue. Le secteur de l’énergie représente 85 % de la hausse de la demande pour certains métaux comme le lithium, le cobalt, le nickel ou encore le graphite employés dans les batteries. Ainsi, pour le lithium, la croissance de la demande a été de 30 % pour an au cours deux dernières années alors que les projections étaient trois fois moindres.

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« Dans un monde soumis à un très haut-niveau de tensions géopolitiques, les minéraux critiques sont devenus un sujet pour la sauvegarde de la sécurité énergétique et économique mondiale », déclare le directeur de l’IEA Fatih Birol. La production des panneaux solaires, des éoliennes et des batteries requiert de nombreux métaux. Actuellement, la Chine fournit 70 % des 20 premiers métaux employés dans les technologies utilisés pour produire de l’électricité verte.

Le cuivre, métal sous tension et enjeu dans la transition

Dans le rapport Global Critical Minerals Outlook 2025 (Perspectives mondiales sur les minéraux critiques 2025), l’IEA avertit sur le fait que l’offre n’arrive pas à suivre la demande. Les auteurs notent que sur plusieurs ressources « l’équilibre entre l’offre et la demande jusqu’en 2035 s’améliore par rapport aux précédentes projections. En revanche, des préoccupations majeures demeurent [sur plusieurs métaux], notamment sur le cuivre ». Alors que pour 2035, la capacité mondiale d’approvisionnement, hors-recyclage, est évaluée à 21,8 millions de tonnes, la demande anticipée est estimée à 28,3 millions de tonnes. Cet écart risque d’entraîner une pénurie de ce métal nécessaire à la production d’appareils électriques.

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Les conséquences multiples s’avèrent complexes. Le renchérissement de la matière incite à ouvrir davantage de mines (l’exploitation d’un gisement devenant d’autant plus rentable que son prix de vente augmente) au mépris de l’impact environnemental de l’extraction. Un coût plus cher des métaux rend également plus couteuse la transition, la ralentissant par conséquence. Cela peut aussi favoriser le recyclage (et aussi les vols de métaux). Enfin, il ne faut pas négliger les tensions géopolitiques potentielles avec par exemples des restrictions d’exportations. L’IEA souligne le fait que 55 % des métaux utilisés dans l’énergie font déjà l’objet d’un contrôle de leurs exportations.

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Augmenter la résilience de la chaîne d’approvisionnement dans les métaux devient critiques pour la transition énergétique

Les auteurs du rapport appellent à la diversification dans les approvisionnements, au développement de nouvelles technologies dans les batteries ainsi qu’à un meilleur recyclage des métaux. Ils notent que la fourniture en métaux ne se fait pas du jour au lendemain. 17 ans, en moyenne, séparent la découverte d’un gisement de cuivre et le début de son exploitation. Selon le directeur de l’IEA, il faut bâtir la résilience et la diversité de l’approvisionnement des minéraux critiques afin de garantir la durabilité de la production d’énergie au XXIe siècle. Il affirme que « même un marché bien approvisionné en minéraux critiques est vulnérable à un choc dans la chaîne d’approvisionnement provenant de conditions météorologiques extrêmes, d’un problème technique ou de perturbations sur les marchés. L’impact peut aller loin touchant les consommateurs et affectant la compétitivité des industriels ». Cité par le Guardian, il précise que pour renforcer et diversifier les approvisionnements en métaux critiques : « l’Europe, les USA, le Royaume-Uni, le Japon et la Corée du Sud disposent des technologies. L’Afrique et l’Amérique latine ont les ressources. Il est possible d’envisager une coopération internationale ». La transition vers les énergies renouvelables et basse carbone fait partie des principaux leviers d’atténuation du changement climatique. Elle fait cependant l’objet de vives critiques, car elle dépend de l’extraction minière.  En dépit de progrès dans la production d’énergies renouvelables, la production d’énergies fossiles ne diminue pas encore.

Julien Leprovost

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Pour aller plus loin

Le rapport (en anglais) Global Critical Minerals Outlook 2025 – Analysis – IEA

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    • Serge Rochain

    Nouvelle tentative d’un irréductible à l’évolution parmi les activistes de l’AIE comme on en trouve dans toutes les organisations ?
    Je ne sais pas le tonnage nécessaire de cuivre pour faire quelques centaines de milliers d’éoliennes, bien que j’imagine aisément que c’est plutôt dérisoire en regard de la quantité qui a été nécessaire pour fabriquer les milliards de Km de câbles transportant l’électricité depuis les centrales de production jusqu’au plots de centaines de millions de prises murales et de pendantes ampoules d’éclairage, au moins autant de Km pour les réseaux téléphoniques, auxquels il faut ajouter les millions de Km de tube de plomberie qui durant des décennies ont apportés l’eau courante dans tous les logements de la planète, ajoutés aussi le cuivre utilisé dans l’industrie associés à d’autres métaux dans les multiples alliages fournissant aux produits obtenus les qualités qui leur étaient demandées, comme la résonance des instruments musicaux des fanfares auxquels ils avaient même fourni le nom de « cuivres », les batteries de cuisines dont les fameux chaudrons artisans des meilleurs confitures, sans oublier les milliards de Km de fils de bobinages des millions de moteurs électriques et d’alternateurs déjà en circulation et dont on pense qu’il va être impossible d’en bobiner quelques dizaines de milliers de plus, mais je sais surtout que personne ne s’étaient livré à de si fallacieuses investigations visant à démontrer que l’on serait un jour privé de confiture pour cause de manque de cuivre….
    J’y vois surtout un signe de plus que, contrairement à tous ces usages démodés du cuivre, ceux-ci ne faisaient pas d’ombre au nucléaire.
    Mais même si ce risque était vrai, où donc est le problème puisque rien que le recyclage de tous ces objets devenus inutiles suffirait plus que probablement à produire les bobinages de ces quelques nouveaux alternateurs demandés par la transition écologique, dont le nombre, sommes toutes, est bien modeste. Je retiens donc que le risque pour la filière nucléaire doit être gigantesque pour motiver de telles dépenses d’énergie rien que pour combattre l’avancée d’un adversaire pourtant bien discret et pacifique qui ne nous veut que du bien. Mais je n’ai aucune raison de m’inquiéter, cet argument massu contre les renouvelables finira bouté hors de leur chemin comme l’ont été toutes les contrevérités distillés insidieusement par les lobby nucléaire depuis 60 ans, se défendant si mal que même le commun des mortels peut aujourd’hui, grâce à l’information officielle obligée par la loi d’être mise à disposition du public, se rendre compte que ce n’était qu’un épais tapis de mensonges.
    Non nous n’avons jamais eu l’électricité la moins cher d’Europe grâce au nucléaire (merci les comparatifs d’Eurostat), non les renouvelables ne perturbent pas la stabilité du réseau de collecte et distribution de l’énergie électrique et au contraire, en sont les meilleurs sources pour assurer le suivi des charges erratiques perturbatrices de l’exportation (merci à RTE pour les images en temps réel de ces extraordinaires variations en des temps si brefs que le nucléaire est impuissant à résoudre). Non, dans un mix électrique la limite admissible de productions renouvelables variables, n’est pas de 15% maximum, puis 30% dès que le 15 a été dépassé dans quelques pays pionniers, puis aujourd’hui 40%, mais une mise à jour de ma limite supérieure est à publier puisque déjà elle a dépassé 50% dans 20 pays européens, et atteint ou dépasse dans certains autres pays les 90%.
    Fini le mensonge à succès, facile quand on détient 100 % du pouvoir de désinformer. Aujourd’hui le lobby nucléaire en est réduit à guetter le moindre incident sur un réseau dont la fourniture est assurée essentiellement par du renouvelable pour aussitôt chanter faux dans tous les registres ; Depuis le temps qu’on vous le dit, c’est inéluctable; Vous voyez, silence total sur la cause inavouable; Il n’y a pas de fumée sans feu; Vous verrez, l’affaire sera étouffé, d’ailleurs ça commence, ils n’avoueront jamais;…..
    Eh oui, la musique se joue discrètement par sous-entendu mais sans pour autant expliquer pourquoi le renouvelable paraît plus suspect que n’importe quelle autre cause dans le shut down du réseau ibérique du 28 avril 2025, ce n’est pourtant que son nom qui est chuchoté dans les commentaires des forums internet, le lobby nucléaire continue de lancer ses bons messages sournoisement, par sous-entendu, ce qui évite d’avoir à justifier le propos. Les centaines de blackouts partiel ou total du passé datant d’une époque où la première éolienne et le premier panneau solaire n’avaient pas encore été installés, ne s’étaient donc jamais produits, comme par exemple cette catastrophe nationale française du 19 décembre 1978 ? Les journaux avaient donc inventé toutes ces pseudos catastrophes qui n’avait donc pas pu se produire, faute de coupable idéal ?
    Bonne journée.