Lundi 21 avril, la Fondation Goldman a dévoilé le nom des lauréats du Goldman Prize 2025. Parmi eux, le Mongol Batmunkh Luvsandash, a été récompensé pour avoir protégé sa terre natale de l’exploitation minière. Parfois surnommé le « prix Nobel de l’Écologie », le Prix Goldman pour l’environnement récompense tous les ans six militants écologistes pour leurs combats sur le terrain.
Le Prix Goldman est remis chaque année à l’occasion de la journée de la terre, à six lauréats répartis sur six régions du monde : l’Amérique du Nord, l’Amérique du Sud et l’Amérique Centrale, l’Europe, l’Afrique, l’Asie et les îles et nations insulaires. Le succès dans leur combat rappelle et prouve qu’on peut agir partout pour l’environnement.
Qu’est-ce que le prix Goldman ?
Créé en 1989, le Goldman Prize rend hommage « aux personnes qui se battent en première ligne pour faire face aux plus grands problèmes environnementaux de notre époque ». Depuis sa création, plusieurs Françaises ont déjà remporté un Goldman Prize. La plus connue d’entre elles est certainement Claire Nouvian, fondatrice de l’ONG Bloom. Elle remporte en 2018, le Goldman Prize pour son combat contre le chalutage profond en Europe, interdit en 2016. Il y a aussi eu, en 2020, Lucie Pinson, engagée en faveur d’une finance respectueuse du climat. Et, en 1992, Christine Jean qui se bat pour que la Loire demeure un fleuve sauvage.
Les lauréats sont récompensés à travers plusieurs catégories comme climat et énergie, justice environnementale, eau douce ou encore pollution et déchet. Parmi eux, Batmunkh Luvsandash, lauréat 2025 d’Asie, remporte le prix dans la catégorie « forage et exploitation minière ».

L’exploitation minière, une menace pour l’écosystème du désert de Gobi
Il y a plus de sept siècles, le célèbre Marco Polo découvrait le désert de Gobi et ses dunes de sable regorgeant d’une riche biodiversité. Ces steppes, Batmunkh Luvsandash les connaît bien. Cet ancien ingénieur électricien de 81 ans est né dans une famille d’éleveurs nomades de la région de Dornogovi dans le désert de Gobi. Mais aujourd’hui, des concessions minières actives s’ajoutent aux ânes sauvages d’Asie, aux 300 espèces de plantes indigènes et aux moutons argalis. Les terrains alloués aux mines représentent désormais près de 10 % de la superficie totale de Dornogovi, faisant de la région de l’Est du Gobi la région mongole avec le plus grand nombre de mines en activité. Ces dernières, fragmentent les habitats fauniques, érodent les prairies et polluent les sources d’eau déjà rares des steppes. L’exploitation minière, en plus de dégrader la nature, accentue le processus de désertification que connaît le désert de Gobi depuis plusieurs décennies déjà. Face aux conséquences du réchauffement climatique comme la raréfaction des pluies, et à l’exploitation minière des lieux, les éleveurs quittent peu à peu la région.
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Les impacts de cette exploitation minière, Batmunkh Luvsandash les a observés au cours de sa carrière d’ingénieur électricien sur des projets d’extraction.
Une carte faite à la main
C’est en 2015, lorsque le gouvernement mongol délivre des permis d’exploration minière pour une large zone située au pied du mont Hutag, sacré pour les habitants du Dornogovi, que Batmunkh Luvsandash décide de passer à l’action. Pendant plusieurs mois, l’homme alors septuagénaire arpente les steppes, le plus souvent à pied, dans le but de dessiner une carte des zones à protéger. Les cours d’eau et les sommets lui servent alors à délimiter les secteurs où il faudrait interdire les industries extractives et préserver les pratiques traditionnelles d’élevage.

Pour compléter ses connaissances personnelles des lieux et du sujet de l’exploitation minière, l’ancien ingénieur n’a pas hésité à faire appel à des organismes publics et instituts de recherche pour étayer la justification scientifique de la zone protégée.
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Sans le savoir, Batmunkh Luvsandash, dessinait une carte semblable à celle de l’ONG The Nature Conservancy qui aidait alors le gouvernement mongol à identifier les régions où la protection de la biodiversité est vitale. « Un jour, Luvsandash s’est présenté au bureau du gouvernement local avec une carte du territoire qu’il souhaitait protéger. Tout le monde était stupéfait, car sa carte, dessinée à la main, était quasiment identique au modèle SIG que nous avions créé », se souvient un technicien de la branche canadienne de l’ONG. Entre avril 2019 et avril 2022, l’engagement de Batmunkh Luvsandash a permis la protection d’un total de quatre zones recouvrant 110.000 hectares du désert de Gobi.
Cinq autres lauréats à travers le globe
Si la plupart des lauréats du Goldman Prize militent à l’origine pour des enjeux locaux, leurs combats dépassent bien souvent l’échelle locale pour rejoindre des enjeux plus grands. C’est le cas de Semia Gharbi, la lauréate tunisienne qui a contribué à dénoncer un trafic de déchets entre l’Italie et la Tunisie. Son combat est devenu une question européenne.

Laurene Allen, lauréate d’Amérique du Nord, a fait fermer, en 2023, l’usine responsable du déversement de PFAS, des produits chimiques toxiques, dans les sources d’eau potable d’une ville du New Hampshire. Le prix Goldman s’accompagne d’une dotation financière qui aide celles et ceux qui le remportent à poursuivre leurs actions. Du New Hampshire, l’état américain dans lequel elle vit, son action contre les PFAS est devenue un réseau national et régional de lutte contre la contamination par ces « polluants éternels ».
2025, l’année des océans
En cette année des océans, quatre des six candidats ont combattu pour une meilleure protection d’un milieu aquatique. Mari Luz Canaquiri Murayari, lauréate d’Amérique latine et centrale, a fait reconnaître la personnalité juridique du fleuve Marañón au Pérou. Une victoire majeure pour la cinquantenaire qui appartient au groupe autochtone Kukama pour qui le fleuve est sacré.

Un océan les sépare et pourtant, ils militent également pour la protection des milieux aquatiques dis « d’eau douce ». En Albanie, Besjana Guri et Olsi Nika ont fait campagne pour protéger la rivière Vjosa de la prolifération des barrages hydroélectriques. Ils obtiennent gain de cause après presque 10 ans de lutte. En mars 2023, le gouvernement albanais reconnaît la rivière sauvage de la Vjosa comme étant un Parc National.
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Comme une évidence
Si certains, comme Olsi Nika, ont toujours eu un lien fort avec la nature, pour d’autres l’engagement écologique est arrivé dans leur vie comme une évidence. Carlos Mallo Molina, le lauréat des îles et nations insulaire, s’installe aux îles Canaries en 2012 dans l’objectif d’y devenir ingénieur civil. Il se spécialise dans les constructions portuaires. C’est dans ce contexte qu’il réalise l’importance de la préservation des milieux marins. Ainsi, après avoir participé à la construction de zones portuaires, Carlos Mallo Molina décide de s’opposer à ces dernières. En 2021, avec son ONG Innoceana, il empêche la construction du port de Fonsalía. Le projet de création d’un terminal de bateaux de plaisance et de ferries menaçait une aire marine protégée de 445 km² dans les îles Canaries.
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Pour aller plus loin
Le site de la Fondation Goldman dresse les portraits des différents lauréats depuis sa création.
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