Castres (AFP) – Plusieurs milliers de partisans de l’autoroute A69 se sont rassemblés samedi sur son tracé aux abords de Castres pour donner de la voix et défendre un projet « essentiel » pour la région, un peu plus d’une semaine après l’arrêt du chantier décidé par la justice.
La sono crache un rap qui scande « On déroule l’autoroute! », un organisateur confie en souriant: « on a fourni les paroles et l’IA a fait le reste ».
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Le morceau s’entend de loin, malgré le violent vent d’autan qui fait voler le sable du chantier où se sont rassemblés les partisans de l’autoroute contestée – entre 7 et 8.000 personnes selon les organisateurs, 3.700 selon la préfecture – derrière une banderole de tête proclamant: « Le bon sens, on finit!.
« On a été un peu assommé par cette décision mais cette manifestation est là pour montrer que notre territoire ne va pas se résigner », explique Guy Bousquet, chef d’entreprise et président de l’association pro-autoroute Via81.
Les petits drapeaux avec le slogan « A69, on finit! » s’agitent derrière lui, leur couleur bleu horizon rappelle les maillots du Castres Olympique arborés par trois joueurs du l’équipe locale de rugby venus à la manifestation.
Pierre-Yves Revol, le patron du club et par ailleurs président du groupe pharmaceutique Pierre-Fabre, influent acteur économique de la région et ardent défenseur du projet autoroutier, est là également mais ne souhaite pas s’exprimer.
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Dans le cortège, Kevin Rodriguez, conducteur d’engin sur le chantier de l’autoroute, est venu « écouter ce que les élus disent, savoir s’il va y avoir des avancées » et espérant « que les travaux vont reprendre ».
« Jeudi midi (27 février, date de la décision du tribunal sur le fond), ils nous ont dit machine à l’arrêt, fin de chantier, ça fout un coup au moral », raconte-t-il, affirmant ne pas comprendre: « c’était avant qu’il fallait se réveiller, le chantier, il est là maintenant ». La justice estime que les apports du projet sont insuffisants au regard des atteintes portées à l’environnement.
« On peut pas laisser comme ça, faut finir », abonde à ses côtés un collègue, conducteur de niveleuse qui souhaite rester anonyme et pour qui cette interruption de chantier, « ça été comme un +carjacking+ (vol de voiture, NDLR), on conduit et on vous sort du véhicule ».
Désormais au chômage technique, il veut croire que l’Etat « peut passer au-dessus (de la décision du tribunal) et que le chantier peut continuer ».
« Souci d’attractivité »
Blouse blanche parmi les chasubles bleues des pro-A69, Marie-Noël Cufi est médecin à l’hôpital de Castres-Mazamet. Elle est venue défendre un projet « essentiel ».
« Pour nous, un enjeu important c’est de rapprocher la métropole (toulousaine) pour des questions de qualité, notamment des transferts pour les patients, et puis il y a le souci de l’attractivité, on vit dans un territoire rural, enclavé et attirer des professionnels de santé est un challenge important au quotidien », explique-t-elle, estimant que l’autoroute constituait un atout sur ces deux plans.
« C’est une nécessité cette autoroute, des entreprises en ont besoin, on va pas rester figé, il faut avancer », clame encore Burno Santamaria, de Castres, salarié d’un atelier de découpe de viande à Puylaurens (Tarn), sur le tracé de l’autoroute.
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Les manifestants veulent croire qu’une voie est encore possible pour une reprise rapide des travaux.
« L’Etat fait le travail pour soutenir le chantier A69 et qu’on poursuive les travaux », s’est félicité le député du Tarn (Renaissance) Jean Terlier, faisant référence à l’appel que prévoit de former le gouvernement à la décision du 27 février, ainsi qu’à un outil procédural qu’il entend utiliser: « un sursis à exécution ». Cette procédure permettrait de suspendre la décision de première instance.
« Nous ne pouvons plus être soumis à l’aléa judiciaire », a-t-il par ailleurs ajouté, annonçant « prendre l’initiative d’une proposition de loi de validation » de l’autorisation environnementale du chantier, qui pourrait être débattue « dans les semaines qui viennent ». L’autoroute devait être mise en service fin 2025.
Le constructeur Atosca, concessionnaire désigné de l’A69 qui assurait le pilotage des travaux, était également représenté au rassemblement.
« Le moment le plus difficile dans cette opération pour moi, ça a été d’annoncer aux 1.000 personnes (travaillant sur le chantier) (…) que l’on arrêtait totalement », a dit à l’AFP Martial Gerlinger, directeur général d’Atosca.
« On entend les opposants mais la majorité silencieuse, nous on a toujours considéré qu’elle était présente », a-t-il estimé.
© AFP
3 commentaires
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PAT-22
Oui, très visiblement ils ne sont pas malgré leurs écharpes très nombreux, malgré les ouvriers au delà des élus. Ces derniers sont aussi des représentant de la loi : pensent-ils poursuivre ces tentatives d’outrepassement ? Est-il raisonnable de ne pas exécuter une décision de justice de la sorte après des années de tricheries sous couvert de nécessité prétendue !? On a pas senti de réels motifs profond de nécessité, à part de intérêts privés. J’espère qu’il n’y aura pas de surcis.
Pat-22
dan
l’état donne toujours le feu vert pour débuter les travaux avant la fin de toutes les procédures mise en place par le même état.
Puis du fait de » l’arrêt immédiat des travaux, l’état demande à ce que les travaux continuent en attendant la décision des tribunaux, se garantissant ainsi une situation de non retour…
Un cas de psychiatrie gravissime.
Comme disaient Astérix et Obélix : Ils sont fous ces romains.
Quidamus
Entièrement d’accord avec PAT-22 et Dan.
Les seules motivations que je vois c’est : « il nous faut l’autoroute parce qu’on veut plein de sous-sous, encore plus de moula ». Pathétique !
Rien que ce passage veut tout dire : « « On a été un peu assommé par cette décision mais cette manifestation est là pour montrer que notre territoire ne va pas se résigner », explique Guy Bousquet, chef d’entreprise et président de l’association pro-autoroute Via81. »
Le type est chef d’entreprise (donc conflit d’intérêt) et dit défendre son territoire en ayant massacré une forêt primaire, un atout extrêmement précieux contre le changement climatique. Ils sont à la louche 4000 et prétendent représenter leur territoire, là où plus de dix mille personnes de ce même territoire (dont des spécialistes et des experts de l’environnement) s’étaient dès le départ opposé au projet, quitte à s’attacher à des arbres. Le Bon Sens cela aurait été de ne jamais commencer et surtout de ne pas tenter le forcing malgré les interdictions successives de continuer le chantier. Autoriser la reprise du chantier maintenant créerait un dangereux précédent : les entreprises pourraient lancer n’importe quel projet insensé et décrié du moment qu’elle le finissent de force malgré les interdictions. Si la A69 ne reprend pas, c’est un signal fort comme quoi faire le forcing ne sert à rien si ce n’est à perdre de l’argent.
D’ailleurs j’espère bien que les responsables de cette destruction écologique seront condamnés à rembourser les dégâts. Là ça calmerait les autres projets du même genre. En plein changement climatique, aucun projet affectant la nature ne devrait être validé sans l’aval des ONG de protection de l’environnement.