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Des auxiliaires efficaces pour nos cultures


En complément de l’entretien avec François Prud’homme, nous republions ici un extrait de son livre 40 idées fausses sur les chauves-souris (aux éditions Quae) qui aborde la manière dont ces dernières contribuent à la lutte contre les ravageurs des cultures.

Nous l’avons vu, les chauves-souris sont des insectivores. Un insectivore utile doit donc manger des insectes nuisibles ! Parlons plutôt d’indésirables dans le cadre de certains usages. Pour lutter contre ceux que l’on appelle souvent les ravageurs des cultures, le réflexe conditionné par une société de consommation soumise aux mercantiles conseils d’industriels est de se tourner vers les nombreux produits chimiques disponibles sur le marché. Avec l’expérience et aussi quelques études épidémiologiques, il s’est avéré que ces pesticides causaient bien des dommages collatéraux. Les sols, l’eau, notre alimentation, notre santé se révèlent tous dégradés par la quantité de produits que les agriculteurs, forestiers et jardiniers ont dispersés dans la nature. L’existence de moyens naturels pour limiter l’impact des ravageurs devrait donc être une priorité. Il n’est bien sûr pas question de vouloir résoudre un problème complexe avec des réponses simplistes, mais d’apprendre à imaginer des solutions alternatives.

Nos chauves-souris peuvent être qualifiées de prédateurs généralistes (à l’échelle de l’ordre des Chiroptères, presque tous les types d’insectes peuvent être prédatés) et opportunistes (faculté d’adaptation à la présence inhabituelle et abondante d’une proie potentielle). À l’inverse d’une lutte biologique avec des prédateurs introduits hautement spécialisés, qui interviennent quand le ravageur prolifère et disparaissent quand il n’y a plus de proies, les chiroptères offrent l’intérêt de se passer d’introductions, car ils peuvent consommer le ravageur même quand il ne prolifère pas.

En revanche, on ne dispose pas d’une colonie de chauves-souris à volonté. Certains environnements agricoles ne sont pas favorables. L’effort de certains agriculteurs pour accueillir des chauves-souris doit être payant : haies champêtres maintenues ou replantées, mares, vieux bâtis, vieux arbres… Permettre à une diversité importante d’espèces de vivre dans leur environnement est un gage d’accueillir celles qui empêcheront la prolifération d’une espèce indésirable.

Les chauves-souris sont un parfait exemple de ce type d’animal, même si leur rôle exact quant à la régulation des ravageurs reste peu documenté.

Une expérience formidable a cependant étudié le rôle que tiennent en Espagne les Pipistrelles dans la régulation de la Pyrale du riz (Chilo suppressalis), petit papillon nocturne ravageur des cultures de riz. En dix ans, tout a été fait pour attirer des colonies de Pipistrelles pygmées (Pipistrellus pygmaeus) dans les rizières du nord-est de la péninsule (delta de l’Èbre), en particulier en disposant dans certaines zones de nombreux nichoirs artificiels pour combler le manque de gîtes naturels potentiels dans ces vastes espaces de culture. On a ainsi pu attirer plus de 4 500 Pipistrelles sur moins de 100 ha de rizières. Et l’expérience a été concluante : il a été observé que les Pipistrelles avaient un pic d’activité de chasse aux périodes de vol de la Pyrale et il a été prouvé par analyse moléculaire du guano récolté dans les nichoirs que la pyrale entrait bien dans leur régime alimentaire. Le prélèvement de pyrale par les Pipistrelles fut même suffisamment fort dans la parcelle expérimentale pour que l’usage de pesticides cesse, sans pour autant provoquer un rendement inférieur à celui des parcelles de la région traitées chimiquement !

Extrait de 40 idées fausses sur les chauves-souris, par François Prud’homme, édition Quae

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