Un travail de fourmi: le Brésil se pose en référence du recyclage de canettes

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Shirlei Aparecida de Souza piétine des canettes vides ramassées dans les ruelles d'un quartier pauvre de Sao Paulo, le 29 juin 2023 au Brésil © AFP Miguel SCHINCARIOL

Sao Paulo (AFP) – Shirlei Aparecida de Souza piétine des canettes vides ramassées dans les ruelles d’un quartier pauvre de Sao Paulo, son gagne-pain au coeur d’un système de recyclage brésilien qui fait référence.

C’est grâce au travail de fourmi de près d’un million de personnes comme cette femme de 38 ans que le Brésil a recyclé pour la première fois autant de canettes en aluminium qu’il en a produites en 2022, selon les données de Recicla Latas, l’association qui représente le secteur.

Un recyclage qui a permis d’éviter l’émission de 15 millions de tonnes de gaz à effet de serre ces dix dernières années, affirme cette association.

Mais quand elle ramasse des canettes dès l’aube, Shirlei Aparecida de Souza pense surtout à nourrir sa famille.

Trouvées dans des poubelles, sur la voie publique ou dans des décharges, ces canettes sont vendues à des centres de collecte qui approvisionnent ensuite des usines de recyclage d’aluminium.

« En une journée de ramassage, je gagne environ 20 réais (3,70 euros), juste de quoi acheter le nécessaire, un paquet de riz, des haricots noirs et parfois de la viande », confie à l’AFP cette habitante de Jardim Lapenna, quartier populaire de la plus grande métropole d’Amérique Latine.

 « Tradition familiale »

Chaussée de tongs, cette femme noire aux longs cheveux ondulés sort tôt le matin pour tenter de ramasser un maximum de canettes et les enfouir dans un sac poubelle: il en faut près de 70 pour atteindre un kilo, vendu 1,15 euro.

C’est une rude « tradition familiale » à laquelle sa mère l’a initiée dès ses quinze ans.

« L’aluminium est revendu plus cher que d’autres matériaux, comme le carton, par exemple, et il est moins lourd à porter. C’est pourquoi il y a beaucoup de concurrence entre les ramasseurs », explique Aline Sousa da Silva, militante de l’Association nationale des ramasseurs (Ancat).

Pedro, un jeune homme de 31 ans qui ne souhaite pas révéler son nom de famille, commence sa tournée dès 04H00 du matin pour arriver parmi les premiers aux abords de l’Avenida Paulista, artère emblématique du poumon économique du Brésil.

« C’est fatiguant, mais il y a de quoi gagner sa vie honnêtement », dit-il, au volant d’une camionnette chargée de sacs.

A une quinzaine de kilomètres de là, dans un hangar de l’entreprise Latasa Garimpeiro Urbano, un camion-benne déverse des tonnes de canettes multicolores dans une machine de compactage qui les transforme en énormes cubes.

Destination finale: une fonderie, où sont fabriquées de nouvelles canettes.

Cycle de 60 jours

L’an dernier, le Brésil est parvenu à recycler l’équivalent de 100% de sa production, ce qui le place loin devant l’Union européenne (73%) ou les Etats-Unis (60%), selon les derniers chiffres publiés par ces industries.

Au Brésil, au total « 390.000 tonnes de canettes ont été recyclées, l’équivalent des 31,8 milliards d’unités commercialisées par les fabricants », dit Renato Paquet, un des responsables de l’association Recicla Latas, dont les données sont utilisées comme référence par le gouvernement brésilien.

Il faut « en moyenne 60 jours » pour qu’une canette achetée dans un supermarché voie son aluminium fournir de quoi garnir à nouveau les rayons une fois recyclé, estime Danilo Machado, superviseur de la logistique chez Latasa Garimpeiro Urbano.

Cette activité n’a cessé de croître depuis 2010, quand les fabricants ont noué un accord avec les autorités, s’engageant à poursuivre des objectifs de recyclage ambitieux.

Une croissance due entre autres à une circulation importante: chaque Brésilien en consomme 156 par an en moyenne.

Le tri sélectif a également progressé dans le pays, doté d’un vaste réseau de centres de collecte, qui fournissent des géants du secteur.

Le recyclage de canettes pèse plus de six milliards de réais par an (environ 1,1 milliard d’euros) au Brésil, mais les ramasseurs sont en grande majorité des travailleurs précaires, sans la moindre protection sociale.

Ils ont été mis à l’honneur en janvier, lors de l’investiture du président de gauche Luiz Inacio Lula da Silva. Aline Sousa da Silva, leur figure la plus emblématique, avait été choisie pour lui remettre l’écharpe présidentielle, aux côtés d’autres personnes représentant la société brésilienne.

© AFP

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