La guêpe à papier cultive la différence

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Une guêpe à papier fabrique un nid à l'aide de fibres de bois qu'elle a mâché en une forme de pulpe, le 24 avril 2020, à Montlouis-sur-Loire © AFP GUILLAUME SOUVANT

Paris (AFP) – La guêpe à papier vient d’entrer dans le cercle très fermé des animaux jugés capables de former un concept abstrait, comme celui de la ressemblance ou différence entre deux choses.

La plupart des espèces savent distinguer une chose essentielle d’une autre, comme le bon d’un mauvais fruit ou le cri d’un congénère de celui d’un prédateur. Très peu sont capables de former un concept abstrait comme celui de « pareil/pas pareil », et de l’appliquer à différentes situations.

Primates mis à part, un petit nombre d’espèces possède un tel don, notamment les corvidés, pigeons, perroquets, dauphins et canetons. Chez les invertébrés, il n’a été répertorié qu’avec l’abeille européenne.

Il faut y ajouter désormais Polistes fuscatus, la guêpe à papier, à en croire l’étude publiée mercredi dans les Proceedings B de la Royal Society britannique.

Cet insecte social est réputé pour sa capacité à distinguer sans faillir les visages de ses congénères. Une équipe de neurobiologistes de l’Université américaine du Michigan a exploré sa capacité à faire mieux.

Ils ont d’abord « appris » aux guêpes à associer une paire d’images ou d’odeurs, semblables ou différentes, à un courant électrique inoffensif mais désagréable, et la paire inverse à l’absence de choc.

Chaque guêpe s’est retrouvée dans un cube dont les parois portait par exemple une paire de couleurs identiques. Elle y restait deux minutes en y subissant un courant électrique transmis par le sol, puis après une pause d’une minute, elle était placée dans un autre cube, sans courant, où se trouvait une paire de couleurs différentes l’une de l’autre.

Moins d’un million de neurones

Les paires de stimuli, des couleurs, visages de guêpe ou odeurs, étaient changées entre chaque séance de façon à ce que l’animal n’associe pas une paire particulière au choc électrique.

Après quatre séances d’apprentissage et une pause de trois quarts d’heure, la guêpe subissait un test censé vérifier si elle avait intégré la notion de « pareil/pas pareil ».

Elle était placée dans une boîte où elle avait le choix entre se diriger vers une extrémité portant une paire de stimuli identiques ou vers celle en portant des différents. Le bon choix consistant à se diriger vers la paire de stimuli associée dans son expérience à l’absence de choc électrique.

Dans un premier temps, le genre de stimulus, -couleur, visage ou odeur-, était identique à celui de la phase d’apprentissage mais pas le stimulus lui-même, la couleur changeait par exemple. Après dix essais, et une nouvelle pause, l’expérience était renouvelée avec un genre de stimulus jamais rencontré par l’animal, comme par exemple l’odeur après les couleurs.

Dans les deux cas, la guêpe a passé le test avec plus de 80% de réussite, bien au delà de la seule chance. Un résultat complètement indépendant du genre de stimulus impliqué.

Et un exploit en considérant que la cervelle de cette guêpe, comme celle de l’abeille européenne, compte moins d’un million de neurones, quand celle du pigeon dépasse les 300 millions et celle du macaque six milliards, remarquent les chercheurs. Et qui leur fait penser que l’apprentissage du concept « pareil/pas pareil » est peut-être plus répandu chez les insectes qu’anticipé.

Au-delà ils concluent que le « système nerveux miniature des insectes n’impose pas de limite à la sophistication de leur comportement », selon l’étude.

© AFP

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