Dans la fournaise des champs, tous souffrent : hommes, animaux, végétaux

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Récolte de colza dans la Beauce, près de Chartres le 21 juillet 2021 © AFP JEAN-FRANCOIS MONIER

Paris (AFP) – Hommes, animaux, végétaux: dans les champs et les élevages français, tous souffrent de la chaleur cette année et c’est sous la menace du feu que les agriculteurs doivent moissonner, parfois la nuit pour échapper à la fournaise.

« La paille, ça prend vite », explique Arthur de Waal. Dans son village de Bouillancy, dans l’Oise, à moins de 100 kilomètres de Paris, ce cultivateur a vu un quart de sa production annuelle de blé partir en fumée dimanche.

La moissonneuse batteuse de son voisin, qui s’attelait à la même tâche, « a mis le feu à deux endroits sur la parcelle », « le vent poussait vers la mienne et ça s’est très vite embrasé », témoigne l’agriculteur en grandes cultures (orge, colza, blé …), âgé de 35 ans et installé depuis 2013.

Avec une moissonneuse batteuse, « il faut imaginer une barre de coupe latérale qui fait huit à dix mètres de large et pour couper le blé, deux lames se croisent, comme un ciseau, du fer contre du fer, ça peut faire une étincelle et quand il y a de la paille très sèche dessus qui prend feu, ça se propage à une vitesse folle », décrit Christiane Lambert, présidente de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA).

D’un mégot de cigarette jeté près d’un champ à un engin agricole qui surchauffe, les incendies dans les exploitations se sont multipliés à cause de la chaleur et des sols secs.

« La prise de conscience date de 2019, quand il y a eu de très gros incendies sous l’effet conjugué de fortes chaleurs et de vents violents », rappelle Linda Monnier, directrice de la Fédération départementale des syndicats exploitants agricole (FDSEA) de l’Oise.

Cette année-là, l’Oise a été frappée par une série d’incendies de moisson ravageur. Un agriculteur est mort, piégé par les flammes, en pleine moisson.

Une récolte très précoce

Pour éviter l’embrasement, les heures de travail sont avancées au matin, retardées au soir, ou même effectuées de nuit.

« Les moissonneuses utilisées pour la récolte sont suivies des déchaumeurs, un outil à dents qui permet de retourner le sol » pour contenir d’éventuel départ de feu, détaille Hervé Davesne, agriculteur grandes cultures, lui aussi dans l’Oise.

A la FNSEA, Christiane Lambert constate: « L’alternance des événements climatiques change nos repères » et les moissons ont commencé cette année « avec trois semaines d’avance ».

Non sans conséquence, « les changements météorologiques diminuent le rendement des parcelles, mais aussi la qualité du produit », indique Christian Daniau, agriculteur en grandes cultures (céréales à paille, oléagineux) et président de la Chambre d’Agriculture de Charente.

Pour l’agriculteur, la récolte de blé 2022, c’est « 20 à 25% de rendement en moins » par rapport à sa moyenne décennale alors qu’il y a « un mois et demi on était très confiants, on avait le sourire et les prix étaient plutôt bons ».

Récolte en baisse, animaux gênés

La première vague de chaleur du mois de juin a accéléré la maturation des grains de blé: « Au lieu de faire six tonnes, on en fait quatre », résume Christian Daniau.

Selon le service statistique du ministère de l’Agriculture, Agreste, au 1er juillet la récolte de céréales à paille, comme l’orge ou le blé, serait en baisse de 3,4 millions de tonnes sur un an, à 48,3 millions.

Alors que ces épisodes de chaleur et leur intensité se multiplient sous les effets du réchauffement climatique, les animaux souffrent aussi.

« si les hommes peuvent comprendre qu’il fera plus frais dans quelques jours, ce n’est pas le cas des animaux qui souffrent de cette chaleur », souligne Mme Lambert (FNSEA).

Les bovins sortent par exemple de leur zone de confort thermique à 22°C degrés et les porcs à 25°C degrés. Au-delà, des problèmes de santé animale mais aussi de rentabilité économique s’ajoutent dans la balance.

Une vache laitière peut « perdre jusqu’à 20% de sa production quand les 35°C degrés sont dépassés » mais elle peut aussi « avorter et perdre (son) veau », décrit ainsi Mme Lambert.

© AFP

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