Le Nobel de la paix au Programme alimentaire mondial

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Traitement pour un enfant mal nourri fourni par le PAM, le 22 juin 2019 à Sanaa © AFP/Archives Mohammed HUWAIS

Oslo (AFP) – Le Nobel de la paix a couronné vendredi le Programme alimentaire mondial (PAM) des Nations unies qui, du Yémen à la Corée du Nord, nourrit des dizaines de millions de bouches dans un monde où la faim, redoutable « arme de guerre », devrait encore progresser du fait du Covid-19.

Opérant aussi bien par hélicoptère qu’à dos d’éléphant ou de chameau, le PAM se présente comme « la plus grande organisation humanitaire », une nécessité puisque, selon ses estimations, 690 millions de personnes –-une sur 11– souffraient sous-alimentation chronique en 2019. Et sans doute davantage cette année à cause de la pandémie.

Le PAM est récompensé pour « ses efforts de lutte contre la faim, pour sa contribution à l’amélioration des conditions de paix dans les zones touchées par les conflits et pour avoir joué un rôle moteur dans les efforts visant à empêcher l’utilisation de la faim comme arme de guerre », a déclaré la présidente du comité Nobel, Berit Reiss-Andersen.

Un porte-parole de l’organisation onusienne a fait part d’un « moment de fierté » avec ce prix.

Fondé en 1961 avec son siège à Rome et financé intégralement par des contributions volontaires, le PAM dit avoir distribué 15 milliards de rations et assisté 97 millions de personnes dans 88 pays l’an dernier.

Un chiffre vertigineux mais qui ne représente qu’une fraction du besoin total. Malgré les progrès enregistrés ces trois dernières décennies, l’objectif établi par l’ONU d’éradiquer la faim d’ici 2030 semble hors d’atteinte si les tendances actuelles se poursuivent, selon les experts.

Femmes et enfants sont bien souvent les catégories les plus vulnérables.

Par définition ennemi déclaré du Nobel de la paix, la guerre peut être à la fois la cause et la conséquence de la faim: les populations vivant dans des pays touchés par des conflits sont nettement plus susceptibles d’être sous-alimentées, selon l’organisation.

« Il n’y a pas 1.000 façons de procéder », déclarait le directeur général du PAM, l’Américain David Beasley, le 21 septembre. « Le seul moyen d’en terminer avec la faim, c’est de mettre fin aux conflits ».

Le Yémen en fournit une preuve tragique. Tant les Nations unies que les ONG y tirent l’alarme sur les conséquences désastreuses du conflit qui oppose depuis 2015 le gouvernement, appuyé par une coalition militaire dirigée par l’Arabie saoudite, et les rebelles Houthis, soutenus par l’Iran.

Les combats ont fait des dizaines de milliers de morts, pour la plupart des civils selon les ONG, déplacé trois millions de personnes, et poussé le pays au bord de la famine. Deux-tiers des 30 millions d’habitants « ne savent pas de quoi sera fait leur prochain repas », selon le PAM.

L’horizon pour la planète s’est encore assombri cette année avec le choc sanitaire et économique causé par la pandémie de Covid-19, qui cause des pertes de revenus en cascade, renchérit les aliments et perturbe les chaînes d’approvisionnement.

« Nous pourrions être confrontés à de multiples famines de proportions bibliques en quelques mois », prévenait David Beasley dès avril.

La récession mondiale due au virus risque de pousser vers la faim entre 83 et 132 millions de personnes supplémentaires, estimait l’ONU dans un rapport publié à la mi-juillet.

« Le Programme alimentaire mondial aurait été un lauréat digne du prix sans la pandémie mais la pandémie et ses conséquences renforcent absolument les raisons pour ce prix », a dit Mme Reiss-Andersen devant une audience réduite à moins d’une dizaine de journalistes, Covid-19 oblige.

Face aux tentations de replis nationalistes, la présidente du comité Nobel, arrivée en béquilles à cause d’une fracture de la jambe, a souligné l’importance de trouver des « solutions multilatérales pour combattre les défis mondiaux ».

C’est la 12e fois que le prix de la paix consacre l’ONU, une de ses agences ou une personnalité qui y est liée — plus que tout autre lauréat.

Le virus va chambouler les conditions dans lesquelles le PAM empochera son Nobel.

Si la situation sanitaire le permet, le prix –un diplôme, une médaille d’or et un chèque de 10 millions de couronnes (près de 950.000 euros)– lui sera remis en personne lors de festivités au format nettement réduit le 10 décembre à Oslo.

Dans le cas contraire, il faudra se contenter d’une cérémonie à distance via des moyens numériques.

© AFP

3 commentaires

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    • Jean Grossmann

    Le Programme Alimentaire Mondial de l’ONU mérite mieux sur le plan pratique que cette prestigieuse et honorifique distinction. Ceci compte du fait que 10 % de la population mondiale étant sous-alimenté (voire plus en raison du COVID19) le besoin réel pour éviter les transferts de populations c’est l’alimentation de 700 millions d’homo sapiens soit sensiblement 10 fois plus que les 80 millions de personnes assistées sur le plan alimentaire par le PAM.

    La demande de vols long-courriers restant actuellement proche de zéro même si Homo sapiens donnait pouvoir à l’ONU pour taxer le kérosène afin d’assurer des rentrées financières au PAM cela ne nous sortirait pas du pétrin.

    L’abscence de guerre serait probablement la solution compte tenu du fait que l’on sait quand on les commence mais on ne sait pas trop quand on les termine, Machiavel ne disait-il pas à leur propos « on les commence quand on veut mais on les termine quand on peut

    • MULWA TANZI CELESTIN

    Nous estimons qu’il faut remercier d’abord ceux qui participe à la chaine de production alimentaire. C’est un grand travail que le PAM réalise. A cette occasion, nous jettons un océan de fleurs à la Directrice Générale et ses représentants dans différents où ils interviennent pour l’aide alimentaire. C’est ici que nous encourageons le partenariat pour une synergie forte avec FAO, FIDA, SLOW FOOD et d’autres organismes qui luttent pour Faim Zéro

    • Claude Courty

    « l’objectif établi par l’ONU d’éradiquer la faim d’ici 2030 semble hors d’atteinte si les tendances actuelles se poursuivent, selon les experts. »
    « Il n’y a pas 1.000 façons de procéder », déclarait le directeur général du PAM, l’Américain David Beasley, le 21 septembre. « Le seul moyen d’en terminer avec la faim, c’est de mettre fin aux conflits ».

    Quelles tendances Mmes & MMrs les experts, sinon mondialement démographiques ?!
    Et quelle autre façon de procéder, sinon en levant le tabou dont est frappé toute question de surpopulation, comme en atteste cet article ?!