Les Philippines, pays le plus dangereux d’Asie pour les défenseurs de l’environnement

Philippines

Des milliers de poissons morts sont évacués suite à la pollution de l'eau, dans la baie de Manille le 11 octobre 2019 © AFP Ted ALJIBE

Manille (AFP) – Les Philippines ont encore été l’an passé le pays d’Asie le plus dangereux pour les défenseurs de l’environnement, selon l’organisation Global Witness, qui indique mercredi que le bilan dans l’archipel n’est dépassé que par celui de la Colombie.

Au total, 43 défenseurs de l’environnement ont été tués aux Philippines en 2019, la grande majorité dans les îles riches en ressources naturelles de Mindanao et Negros, précise Global Witness. Le bilan dans l’archipel était de 30 morts en 2018.

La moitié des meurtres enregistrés depuis que le président Rodrigo Duterte a été élu en 2016 étaient liés aux forces armées et aux groupes paramilitaires.

Qui sont les victimes ?

Les victimes sont des leaders autochtones, des agriculteurs, des fonctionnaires chargés de protéger l’environnement.

Plus de la moitié des décès sont liés à l’agro-industrie, selon Global Witness. Seize sont liés à l’industrie minière.

Près de la moitié des victimes ont péri sur Mindanao, où l’armée maintient d’importants contingents engagés dans la lutte contre les insurrections musulmane et communiste. L’île a vécu jusque la fin de l’année dernière sous loi martiale.

Le problème est également grave sur Negros, une île du centre de l’archipel qui est un important centre de production de sucre. Fortement militarisée, elle est de longue date un foyer de contestation de paysans qui demandent une réforme agraire afin de réduire la pauvreté et les inégalités.

« Près de 90 % des activistes tués en 2019 dans tout le pays l’ont été à Mindanao et Negros », selon ce rapport.

Parmi ces victimes, Kaylo Bontolan, leader du peuple Manobo à Mindanao, tué dans une frappe aérienne en avril alors qu’il rentrait dans sa montagne pour aider à rassembler des éléments sur les violences contre les membres de sa tribu en lutte contre un projet minier.

« A l’instar de Datu Kaylo, nombre de personnes tuées étaient des autochtones défendant leur droit à l’autodétermination sur leurs terres ancestrales », indique Global Witness.

Quel est l’enjeu ?

Global Witness relève que les Philippines sont particulièrement exposées aux conséquences du réchauffement climatique, en particulier à la récurrence des phénomènes météorologiques extrêmes comme les typhons.

Et les défenseurs de l’environnement font face à une urgence encore plus grande, avec la destruction des forêts par les groupes miniers ou forestiers.

« Les grands groupes, les hommes politiques influents et les propriétaires terriens bien installés continuent de s’enrichir en négligeant totalement les droits et le bien être des communautés locales, et la vie des défenseurs de l’environnement », indique le rapport.

Il cite l’exemple d’un projet de barrage hydroélectrique à 800 millions de dollars soutenu par la Chine et qui déplacera plus de 700 foyers de Mindanao, dont aucun n’ont été consultés.

Pire sous Duterte ?

Le rapport indique que 119 défenseurs des droits de l’Homme ont été tués au cours des trois premières années de la présidence Duterte, soit un bilan deux fois plus élevé qu’au cours des trois années précédentes.

Les activistes philippins risquent gros depuis longtemps. Mais Global Witness observe que la façon dont le gouvernement les vilipende, et la culture d’impunité depuis l’arrivée de M. Duterte au pouvoir ont certainement aggravé les choses.

Le rapport dénonce une tendance à faire passer les défenseurs de l’environnement pour des rebelles ou des sympathisants communistes afin de les délégitimer.

Global Witness s’inquiète de ce qu’une nouvelle loi contre le terrorisme ne donne aux forces de sécurité davantage de pouvoirs pour poursuivre les militants de la cause environnementale.

© AFP

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