Amazonie: des photos font vivre la mystique et la lutte des Yanomami

chaman Davi Kopenawa

Le chaman Davi Kopenawa, porte-parole des Indiens yanomami, le 29 janvier 2020 à Paris © AFP Martin BUREAU

Un visage frais d’enfant émerge heureux de l’onde mouvante d’un fleuve amazonien: la symbiose d’un peuple et de son environnement forestier menacé est le fil conducteur d’une exposition de la photographe Claudia Andujar à Paris.

La Fondation Cartier pour l’art contemporain, qui vient d’achever l’exposition à succès « Nous les arbres » (plus de 200.000 visiteurs), revient avec force sur l’écologie et la planète menacées, en présence de la photographe et du chaman Davi Kopenawa, porte-parole des Indiens yanomami, qui vivent dans le bassin du rio Catrimani.

C’est l’anthropologue français Bruce Albert, auteur de plusieurs ouvrages ethnographiques, qui est le commissaire de ces deux expositions.

Claudia Andujar, née en Suisse en 1931 dans une famille d’origine juive et protestante, rescapée de la Shoah, présente quelque 300 photographies. Elle s’est fait accepter des Yanomami en partageant leur vie.

Ces photos, présentées déjà à Rio dans un autre format, et qui seront aussi montrées en Suisse, en Italie et en Espagne, auraient dû être détruites à la mort de ceux qu’elles représentent. Mais les chefs yanomami ont accepté qu’elles soient le témoignage du peuple de la forêt qui voit ses droits bafoués.

La photographe va séjourner à de nombreuses reprises à partir de 1971 dans le bassin. Un missionnaire, le père Carlo Zacquini, lui fera découvrir ce peuple.

Très vite, Claudia Andujar, en s’imprégnant des mythes de ce peuple, s’éloigne de la photo documentaire. Elle adapte ses images à des techniques et effets, en y ajoutant un aspect surréel: grand angle, vaseline sur l’objectif, pellicule infrarouge, filtres. Les rayons de lumière fusent, la fumée nimbe les scènes, leurs donne une dimension transcendante, mystérieuse.

Les Yanomami sont saisis dans l’intimité sombre de leurs maisons collectives, les « yano ». Andujar documente aussi le « reahu », cérémonie d’alliance et rite funéraire, où les jeunes danseurs avalent des poudres hallucinogènes. Elle joue avec une vitesse d’obturation lente, se sert de flashs et de lampes à huile pour provoquer brillance et brouillage. Elle surimpose différentes scènes, montrant les connexions spirituelles dans la communauté.

« Urihi » = terre-forêt, « Tëpërësiki » = monstre aquatique, « Omama » = créateur des règles sociales, « Yoasi », à l’origine de la mort et de tous les maux… A côté de ces divinités puissantes et rivales, des réalités heureuses collectives, et aussi des réalités sanitaires et sociales très crues sont montrées: d’un homme décimé par une épidémie sur un brancard à une piste d’atterrissage des orpailleurs et à des bases militaires au milieu de la forêt.

–La lutte yanomami, jusqu’au 10 mai

© AFP

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