Graines d’espoir: des bénévoles tunisiens au chevet des forêts du pays

bénévoles plantent des arbres

Des bénévoles plantent des arbres dans les montagnes à Siliana, dans le nord de la Tunisie, le 14 novembre 2019 © AFP FETHI BELAID

« On fait ça pour le futur. » Amin Farhat a rejoint une quarantaine de jeunes bénévoles tunisiens sur une colline pelée au cœur d’un paysage rocailleux. Mission du week-end: faire renaître une forêt incendiée en plantant de jeunes pousses de pin d’Alep.

Aux côtés de ce jeune cadre venu de Tunis, Hamdi, un étudiant de Sfax (est), se met à la tâche à peine son sac posé, après avoir parcouru 250 km pour se rendre jusqu’à la parcelle à reboiser, dans la région marginalisée de Siliana (centre).

« C’est l’occasion de s’amuser et de faire quelque chose de bien ensemble », explique cet adepte de camping et de randonnées, informé de l’opération via une des pages Facebook organisant ces sorties.

Amin et Hamdi font partie d’un réseau d’amoureux de la nature, alliés aux pouvoirs publics tunisiens autour d’un objectif ambitieux: planter 12 millions d’arbres d’ici fin 2020 à travers le pays –soit un par habitant.

« On ne peut y arriver que tous ensemble », souligne Baya Khalfallah, une des responsables de l’association Soli&Green, qui a lancé la campagne en novembre 2019.

« Pour atteindre notre objectif, nous comptons sur toutes les organisations (associatives), notre partenariat avec le gouvernement et, bien évidement, sur les bonnes consciences », ajoute-t-elle.

La plupart des bénévoles sont des citadins originaires des grandes agglomérations côtières, Tunis, Sfax et Sousse.

« On veut laisser une nature belle et protéger les ressources de notre pays », explique Amin, également militant d’une association de recyclage caritatif.

« Nombreux, efficaces, gratuits »

Soli&Green, fondée par une poignée de militants écologistes trentenaires, organise des week-ends de plantation d’arbres durant l’hiver, et oriente les organisations inspirées d’en faire autant.

Depuis novembre 2019, l’association répertorie toutes les opérations de reboisement à travers le pays et estime qu’à la mi-janvier, près d’un million d’arbres ont déjà été plantés.

Le gros du travail est effectué par l’Etat. C’est d’ailleurs le Commissariat régional de développement agricole (CRDA), organisme public, qui fournit aux volontaires une formation sommaire, des milliers de pousses et un camion citerne pour les arroser.

Mais les services publics se réjouissent de la mobilisation de la société civile.

« Quand nous travaillons avec des ouvriers, nous plantons 1.000 arbres par jour environ, mais avec les bénévoles, on peut en planter 4.000, voire 5.000 par jour. Ils sont nombreux, efficaces et c’est gratuit », argue Nizar Khlif, un des responsables du CRDA de Siliana.

« Et il y a une approche participative: ils impliquent la population locale. »

A Siliana, 40 hectares de forêt sont partis en fumée dans un incendie criminel en 2017. Le jeune incendiaire présumé a indiqué espérer que le feu pousse les autorités à recruter des gardiens de forêt, lui ouvrant la possibilité d’un emploi.

« C’était comme si on perdait un membre de notre famille », se souvient Khairi Jaied, 14 ans, venu d’un village voisin participer à la replantation.

« J’ai beaucoup de bons souvenirs dans la forêt. C’est bien de voir ces gens aider notre région à retrouver ses ressources ».

Désignant la colline caillouteuse, Khlifa Jaïdi, guide local de 46 ans venu du bourg voisin de Kesra, explique qu' »avant l’incendie, ici c’était une forêt dense ».

« Beaucoup à faire »

Le reboisement, crucial pour limiter l’érosion et lutter contre le réchauffement climatique –les arbres captant le dioxyde de carbone (gaz à effet de serre) et le transformant en oxygène–, est aussi un moyen d’assurer des revenus aux habitants.

« Les gens ramassaient des graines de pins d’Alep pour faire le zgougou (un dessert traditionnel, ndlr), et du romarin, vendu pour en extraire l’huile essentielle », détaille M. Jaïdi.

Des incendies volontaires et feux de forêts grignotent chaque année des centaines d’hectares, mais les stratégies de reboisement de l’Etat, s’associant de plus en plus aux populations locales, semblent payer.

Forêts et maquis représentent désormais plus de 1,3 million d’hectares, soit environ 8,5% de la surface du pays, contre 7,4% en 2011, selon la direction générale des forêts.

L’objectif est d’arriver à 10% en 2024.

Reboiser après des incendies, mais aussi lutter contre la désertification en plantant des palmiers et oliviers dans le sud de la Tunisie: la tâche est vaste. De quoi rebuter les bénévoles?

Les mains dans la terre, Nessim Zouaoui, entrepreneur de 26 ans, reconnaît être parfois « découragé, car il y a beaucoup à faire ».

« Je passe le plus clair de mon temps libre à nettoyer des plages et planter des arbres », dit ce militant de l’association Tounes Clean Up.

« Mais on vient d’aller voir une parcelle voisine où on avait travaillé en mars, et on s’est rendu compte qu’on avait carrément planté une forêt. C’est vraiment motivant! »

© AFP

Un commentaire

Ecrire un commentaire

    • Meryl

    Bien, mais la sauvegarde des forêts passe par la sauvegarde d’un équilibre climatique, lequel passe par la disparition des élevages et de la consommation de produits d’origine animale, 1ère cause du dérèglement du climat… Bref, là encore, le véganisme s’impose comme remède de choc aux catastrophes qui sont déjà là et ne feront que s’aggraver.