UNOC 2025 : de belles promesses bleues, mais l’heure est à l’action concrète

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Bateau de pêche entre Bohol et Cebu - Philippines © Yann Artus-Bertrand

Alors que la Fondation GoodPlanet était présente à l’UNOC-3 à Nice, elle livre une analyse et un bilan du sommet. La Déclaration de Nice répond aux enjeux avec des promesses partagées mais celles-ci demeurent encore trop fragiles. Les ambitions sont urgemment à traduire en actes car le monde ne peut plus se permettre d’attendre pour agir.

Après cinq jours d’âpres négociations du 9 au 13 juin, la troisième Conférence des Nations Unies sur l’Océan (UNOC 3) s’est clôturée avec l’adoption du Plan d’action de Nice. Au total, 63 chefs d’État et de gouvernement et 174 délégations (accompagnés de nombreux scientifiques et d’ONG) ont répondu à l’invitation de la France et du Costa Rica pour prendre des engagements communs en faveur de ces espaces marins plus que jamais menacés. 

Le Plan d’action de Nice pour l’océan comprend deux axes : une déclaration politique adoptée par les États membres et plus de 800 engagements volontaires pris depuis la précédente conférence sur l’océan par des États, des scientifiques, des agences onusiennes et des acteurs de la société civile. 

“Dès novembre et la COP Climat de Belém, la communauté internationale doit acter un certain nombre d’engagements cruciaux pour faire avancer la transition écologique et solidaire et la lutte contre le changement. Les Etats devront notamment fournir de nouveaux engagements et de nouveaux objectifs chiffrés qui se doivent d’être ambitieux. L’inclusion des océans sera cruciale tant leur importance est vitale en matière de climat. C’est en particulier à la lumière de ces engagements que nous pourrons juger si la Communauté internationale a pris à Nice la mesure – au-delà des grandes déclarations d’intention – de l’urgence à agir pour préserver nos Océans. Plus tard il sera trop tard !”, estime Jean-Baptiste Poncelet, directeur du Programme Action Carbone Solidaire à la Fondation GoodPlanet.

Le bilan vidéo par la Fondation GoodPlanet


Dans un contexte d’effondrement de la biodiversité marine, de surexploitation halieutique et de pressions croissantes sur les écosystèmes marins, les États étaient attendus au tournant. Les discours ont été ambitieux, les intentions nombreuses, mais au-delà des annonces, il faut poser une question simple : le compte y est-il ? 

Protéger l’océan, c’est d’abord protéger ses zones les plus vulnérables

Le premier pilier de cette conférence était l’extension et la consolidation des aires marines protégées (AMP), un levier crucial pour lutter contre la surpêche, restaurer les écosystèmes et protéger les ressources halieutiques. L’engagement réitéré de la France d’atteindre 30 % d’AMP d’ici 2030, dont un tiers en protection stricte, va dans le bon sens. De nombreux pays – de la Colombie aux Samoa – ont également renforcé leur action en ce sens. 

Mais derrière les chiffres flatteurs se cache une réalité plus nuancée. Si la surface des AMP dans le monde pourrait désormais dépasser 10 %, seulement 4,8 % des eaux françaises bénéficient d’un niveau de protection dit fort. Et sur ce chiffre, 92 % se situent dans les Terres australes et antarctiques françaises, bien loin des pressions humaines et économiques réelles. Autrement dit : la France protège là où elle ne pêche pas. 

Le compte n’y est donc pas que ce soit en France ou à l’international. Par ailleurs, qui gère ces aires protégées, avec quels moyens, quelle gouvernance et quels contrôles ? La question du pilotage des plans de gestion, des contrôles et des fonds nécessaires à leur fonctionnement reste donc une question centrale. Le déploiement et l’opérationnalisation de ces AMP sera scrutée de prêt. Après les intentions, il conviendra de transformer l’essai. 

Haute mer : une avancée multilatérale saluée, à concrétiser de toute urgence

Autre grande attente de cette conférence : le traité sur la haute mer (BBNJ), signé en 2023 mais toujours pas entré en vigueur. L’UNOC 2025 a permis une avancée significative : 51 ratifications déposées sur les 60 nécessaires, et 15 autres promises, laissant espérer une entrée en vigueur d’ici début 2026. C’est une vraie avancée, grâce à une approche multilatérale portée par la France et le Costa Rica. 

La mobilisation autour du BBNJ montre que les États peuvent agir ensemble pour défendre un bien commun face aux logiques extractivistes et spéculatives. Mais là aussi, tout dépendra de l’opérationnalisation : les AMP en haute mer, dès qu’elles verront le jour, devront disposer de moyens humains, scientifiques et financiers à la hauteur. La question de fonds dédiés au fonctionnement des AMP en haute mer constituera donc un élément déterminant à suivre de près. 

Pour un océan gouverné avec les communautés qui en vivent

Trop souvent, les populations autochtones, les communautés locales et les pêcheurs artisanaux restent les grands oubliés des politiques de conservation. Or ce sont eux qui jouent un rôle crucial dans le maintien de la sécurité alimentaire et des moyens de subsistance, ainsi que dans la conservation et la restauration des océans. 

À ce titre, le rappel dans la déclaration finale de Nice du rôle central de ces communautés est important. Mais cela ne suffit pas. Les processus de cogestion, la reconnaissance de leurs droits, leur accès à la gouvernance des zones protégées et à la répartition des ressources restent à construire dans la durée. Sans inclusion réelle, la conservation marine ne sera ni juste, ni durable. 

Nature et climat : la mer au cœur des solutions fondées sur la nature

Enfin, la conférence a rappelé l’importance des solutions fondées sur la nature (SFN) dans la lutte contre le changement climatique. Mangroves, herbiers, récifs coralliens – tous ces écosystèmes marins jouent un rôle clé dans la séquestration du carbone et la résilience des littoraux. 

Mentionnées dans la déclaration finale de Nice, les SFN doivent désormais être pleinement intégrées aux contributions nationales des États (CDN) dans la perspective de la COP30 de Belém. Mais là aussi, la réussite dépendra de l’accompagnement financier et technique de ces politiques, notamment dans les pays les plus vulnérables. 

De l’intention à l’action 

L’UNOC 2025 a prouvé que la communauté internationale commence à prendre la mesure de l’urgence bleue. Elle a permis des avancées diplomatiques notables, réaffirmé des objectifs ambitieux, et remis la science et les communautés au cœur des débats. Reste à savoir si les États sont prêts à mettre sur la table les moyens humains et financiers à la hauteur des leurs ambitions et surtout à la hauteur de ce qu’il faut faire pour protéger les océans durablement et justement. 

UNOC 2025 : de belles promesses bleues, mais l’heure est à l’action concrète, par la Fondation GoodPlanet

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