A Islamabad, l’ancien zoo désormais au service des animaux maltraités

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Un soigneur s'occupe des ours noirs d'Asie au centre de sauvetage de Margalla Wildlife, l'ancien parc zoologique d'Islamabad, le 27 mars 2024 au Pakistan © AFP Aamir QURESHI

Islamabad (AFP) – Avant, derrière les barreaux du zoo d’Islamabad, des éléphants neurasthéniques et des lions affamés tournaient en rond.

Aujourd’hui, le site transformé par des amoureux des animaux aide d’anciennes bêtes de foire à se refaire une santé.

« Cet endroit a radicalement changé d’ambiance depuis que le zoo a été vidé », affirme à l’AFP Rina Saeed, patronne du Bureau des animaux sauvages à Islamabad (IWMB).

Après plus de quarante ans d’existence, le zoo a fermé ses portes en 2020 sous le feu des critiques: ses derniers résidents, deux ours bruns de l’Himalaya, ont été relâchés dans une réserve naturelle, et Kaavan, le dernier éléphant d’Asie du Pakistan, un pachyderme obèse de 36 ans dont le sort avait déclenché une campagne internationale soutenue par la chanteuse Cher, a atterri au Cambodge.

Aujourd’hui, à la place, « il y a un vrai centre de réadaptation avec plus de 50 animaux », poursuit Mme Saeed.

Parmi eux, des ours arrachés aux griffes de dresseurs qui les forçaient à danser pour le chaland, ou des tigres exhibés pour exposer la richesse de leurs propriétaires.

Griffes arrachées, museau infecté

Récemment, l’IWMB a récupéré deux petits léopards arrachés à leur mère dans la nature pour être vendus, des ours contraints de se battre contre des chiens lors de combats clandestins ou des singes dressés pour danser en échange de pourboires.

Pour Amir Khalil, vétérinaire en chef de l’ONG Four Paws établie en Autriche qui a organisé l’évacuation de l’éléphant Kaavan, l’ancien zoo, où se dressent encore un guichet abandonné et des panneaux flottant au vent, « représente maintenant un espoir ».

« Cet endroit est méconnaissable », dit-il à l’AFP en auscultant Anila, un ancien ours dansant qui, comme deux autres congénères, tente de se rétablir après des années de mauvais traitement.

Ces trois plantigrades sont arrivés les griffes arrachées et le museau infecté par un anneau posé pour les obliger à danser jusqu’à épuisement.

Aujourd’hui, ils se laissent craintivement manipuler par les vétérinaires dans ce qui était l’ancienne cafétéria du zoo, au pied d’une grande roue abandonnée.

Pour Ali Sakhawat, de l’IWMB, au Pakistan, « on pense que les animaux sont des jouets ». Il en veut pour preuve le jeune tigre saisi chez un vétérinaire d’un quartier cossu de la capitale – puis relâché dans une réserve sud-africaine grâce à une collecte de dons.

Sana Raja, bénévole de l’IWMB, tente avec précaution de sortir l’ours Anila de sa cage malgré les réticences de l’animal visiblement apeuré.

« Alléger la souffrance d’êtres vivants, c’est une réjouissance pour moi », assure-t-elle à l’AFP en évoquant ces animaux que les mauvais traitements ont ravagés physiquement et qui traînent depuis de graves troubles du comportement.

« On les garde occupés pour les aider à oublier les traumas infligés par les braconniers qui les ont capturés », raconte à l’AFP Aneis Hussan, un employé de la protection de l’environnement.

Et lui dit déjà voir les résultats: « Ils ont l’air heureux, ils se baladent, grimpent aux arbres, rien à voir avec leur ancienne vie de captivité ».

La préservation de la biodiversité est un enjeu majeur au Pakistan, le cinquième pays le plus peuplé au monde qui figure parmi les plus menacés par le dérèglement climatique.

« Personne ne nous écoute »

C’est d’ailleurs le ministère du Changement climatique qui s’était saisi de la question du zoo.

Quand un juge a ordonné que tous les animaux en soient sortis – après la mort de deux lions lorsque le personnel a tenté de les faire sortir de leur enclos en mettant le feu à de la paille -, il a repris les rênes.

Il a lancé ce centre de protection des animaux qui offre un havre de paix aux animaux blessés avant le départ vers des parcs et réserves. Mais ces espaces aussi sont menacés, s’inquiète Mme Saeed.

« Le nouveau pacte pour la gestion de la nature et des animaux sauvages d’Islamabad », rare capitale bordée par une réserve pour protéger les léopards, « doit toujours être ratifié par le président depuis 2023 », se lamente-t-elle.

Alors que le dernier décret présidentiel pour la protection des ours en milieu naturel remonte à plus de 20 ans, sous le général Pervez Musharraf, « personne ne nous écoute au gouvernement », accuse Safwan Ahmad, N.2 de l’ONG Pakistan Wildlife Foundation.

Et la municipalité d’Islamabad entend relancer son zoo plutôt que de le remplacer définitivement par une réserve.

« Il y a un zoo dans presque toutes les villes du monde », plaide Irfan Khan Niazi, du département de l’Environnement de la métropole, assurant à l’AFP que les errements du passé ne se reproduiront pas.

Mais pour M. Sakhawat, le problème n’est pas là. « On peut faire autant de zoos qu’on veut pour les enfants, ce n’est pas ça qui leur apprendra que les animaux ont besoin qu’on prenne soin d’eux », dit-il.

« Les animaux sauvages sont faits pour vivre dans la nature, pas dans des cages. »

© AFP

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