Dans la capitale américaine, « Bambi » n’est plus le bienvenu

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Des biches se promènent dans le quartier de Takoma, le 22 octobre 2022 à Washington © AFP Issam AHMED

Washington (AFP) – Symbole de la nature dans la ville ou nuisance dangereuse dans un univers citadin? Dans la capitale américaine, les cervidés font de plus en plus débat, alors que leur présence inquiète, entre risque d’accident de la route et de propagation de maladies.

Victimes de la déforestation et de la chasse, les cerfs étaient au bord de l’extinction à la fin du XIXe siècle, mais c’est désormais de l’histoire ancienne: le pays en compte aujourd’hui plus de 30 millions, principalement sur la côte est.

Et à Washington, ils s’enfoncent jusque dans la ville, profitant notamment de Rock Creek Park, un écrin de verdure au coeur de la capitale fédérale, véritable poumon vert de la ville.

Un espace néanmoins en mauvaise santé et aujourd’hui menacé par la prolifération des cervidés, s’inquiète le service des parcs nationaux (NPS) qui gère le site.

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« Si cette forêt était en bonne santé, nous ne pourrions pas voir aussi loin », explique ainsi à l’AFP Megan Nortrup, responsable du NPS, en désignant les espaces dégagés qui bordent les chemins de randonnée du parc.

En l’absence de prédateurs naturels, les cerfs de Virginie, l’espèce locale, ont dévoré des plantes qui sont pourtant essentielles au maintien de la biodiversité, ainsi que les jeunes arbres, réduisant le renouvellement naturel de la forêt.

Avec des conséquences potentiellement importantes: si rien n’est fait, la forêt pourrait tout simplement disparaître d’ici une centaine d’années.

Afin de mieux comprendre leur impact, les autorités du parc ont mis en place des enclos expérimentaux visant à protéger des zones et laisser les plantes se développer librement.

« Vous ne verrez aucun jeune arbre de cette taille aux alentours, ça signifie que nous avons perdu une génération », pointe Ana Chuquin, botaniste du parc, en désignant le plant, qui n’a survécu que grâce à l’enclos.

Les cerfs sont habitués aux plantes de la région et préfèrent les manger, plutôt que les espèces invasives non locales comme le vione, arbuste fleuri particulièrement prisé dans les jardins et dont les graines se dispersent au gré du vent, des oiseaux ou de la pluie jusque dans le parc.

Or, les espèces locales d’insectes ne peuvent vivre que grâce aux plantes qu’elles ont toujours connu et leur disparition pourrait provoquer des effets en cascade pouvant mettre en péril tout l’écosystème sauvage.

 Biologistes armés

Pour contrer la menace, le NPS a décidé en 2013 de réaliser des prélèvements annuels dans la population de cervidés.

Chaque hiver, de nuit, alors que le parc est intégralement fermé, des biologistes équipés de scanners thermiques et de lunettes de vision nocturne et entraînés au maniement des armes chassent pour réduire les troupeaux.

Un programme élargi en 2020 aux autres parcs gérés par le NPS dans les environs de Washington, alors que la densité d’animaux était proche des 40 bêtes au km², soit quatre fois la limite pour une présence soutenable, selon les scientifiques.

Durant la période d’enquête publique lancée avant le démarrage du programme, des résidents ont demandé s’il ne serait pas plus pertinent de réintroduire « des loups, des coyotes et des lynx », plutôt que d’abattre les cerfs.

Le NPS leur a répondu en soulignant que les loups chassaient sur plus de 75 km² alors que Rock Creek Park dépasse tout juste les 7 km².

De plus il est « inenvisageable de réintroduire ces prédateurs compte tenu des possibles effets indésirables pour les populations urbaines ou rurales environnantes, en particulier pour la sécurité des enfants et animaux de compagnie », ajoutait le service.

La gestion de la population de cervidés commence à porter ses fruits, insiste Mme Chuquin, mais il faudra du temps pour que la forêt puisse se renforcer.

Chasse aux cerfs en ville

A l’image de Taylor Chamberlin, habitant de Great Falls en Virginie, à une trentaine de minutes de Washington, des résidents ont également décidé d’agir.

Se présentant comme un « chasseur de cerfs urbain », M. Chamberlin a débuté sa carrière en tant qu’agent immobilier, avant de réaliser qu’il avait une autre passion.

Equipé d’un arc ou d’une arbalète, il passe ses journées à faire du porte-à-porte, proposant ses services aux riverains dont les cerfs dévorent les haies et les arrangements paysagers.

« Vous n’avez pas le choix, il faut être précis », dans un tel environnement urbain, insiste Taylor Chamberlin, l’idée étant d’éviter qu’un animal blessé ne vienne se vider de son sang dans la piscine d’un voisin.

Les cerfs sont si nombreux dans les environs qu’il n’y a pas de restriction de chasse et M. Chamberlin offre le gibier à une association qui le distribue à des banques alimentaires.

Il forme également de jeunes urbains, inquiets de l’impact de l’agriculture intensive sur leur santé, à la chasse mais leur rappelle souvent: prendre une vie n’est jamais simple, même si cela permet d’être au contact du monde naturel et de réellement apprécier le repas sur la table.

© AFP

 

Un commentaire

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    • ptm73@gmail.com

    Quelle belle idée…par contre l’humain lui y a pas de problème il peut continuer à se multiplier et tout saccager !