Le rejet en mer de l’eau de Fukushima doit commencer jeudi, annonce le Japon

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Cette photo aérienne prise par Jiji Press le 14 février 2021 montre une vue des réservoirs utilisés pour le stockage de l'eau traitée à la centrale nucléaire paralysée de Fukushima Daiichi de TEPCO à Okuma, dans la préfecture de Fukushima © JIJI Press/AFP/Archives STR

Tokyo (AFP) – Le rejet dans l’océan Pacifique de l’eau traitée de la centrale nucléaire accidentée de Fukushima Daiichi (nord-est du Japon) doit commencer jeudi « si les conditions météo le permettent », a déclaré mardi le Premier ministre japonais Fumio Kishida.

Ce projet a été validé début juillet par l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) et Tokyo assure qu’il sera sans danger pour l’environnement et la santé humaine. Mais l’opération, qui doit durer des décennies, suscite aussi de vives inquiétudes et critiques, notamment de la part de la Chine.

Tokyo prévoit de rejeter très progressivement dans l’océan Pacifique plus de 1,3 million de tonnes d’eau de la centrale de Fukushima Daiichi provenant d’eau de pluie, de nappes souterraines et des injections nécessaires pour refroidir les coeurs des réacteurs entrés en fusion après le tsunami de mars 2011 qui a dévasté la côte nord-est du pays.

Ces eaux ont été traitées au préalable pour les débarrasser de leurs substances radioactives, à l’exception toutefois du tritium, qui n’a pas pu être retiré avec les technologies existantes.

Seules des doses hautement concentrées de tritium sont nocives pour la santé, selon les experts.

Aussi Tepco, l’opérateur de la centrale de Fukushima, prévoit un rejet dans l’océan étalé jusqu’au début des années 2050, à raison de 500.000 litres par jour maximum, et avec une dilution pour réduire le niveau de radioactivité de l’eau tritiée bien en deçà des normes nationales pour cette catégorie.

Craintes pour la réputation des produits

Le Japon affirme par conséquent que cette opération ne présente aucune menace pour l’environnement marin et la santé humaine. L’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), qui contrôle le projet, est du même avis et a donné en juillet son feu vert.

L’industrie japonaise de la pêche redoute toutefois des conséquences néfastes pour l’image de ses produits, auprès des consommateurs nippons comme à l’étranger.

« Notre position reste inchangée, nous sommes toujours opposés au rejet de l’eau », a déclaré lundi le représentant de l’industrie de la pêche nippone Masanobu Sakamoto à l’issue d’une rencontre avec M. Kishida.

« Je lui ai dit que la sécurité scientifique n’équivaut pas nécessairement à un sentiment de sécurité dans la société. On craint des dommages pour la réputation des produits » une fois le rejet commencé, a-t-il ajouté.

M. Kishida, qui a visité dimanche la centrale de Fukushima, a rappelé qu’un fonds de 30 milliards de yens (190 millions d’euros) était prévu pour aider les pêcheurs à faire face à un impact négatif sur l’image de leurs produits.

La Chine en particulier critique vertement le projet nippon. Pékin a interdit dès le mois dernier les importations de produits alimentaires de dix départements japonais, dont celui de Fukushima, et procède à des tests de radiations sur les denrées provenant du reste du pays.

 Situation « exploitée par Pékin »

Le Japon va demander la fin de ces restrictions commerciales en mettant en avant des « preuves scientifiques », a assuré mardi M. Kishida.

Il a aussi promis des mesures pour soutenir la filière japonaise de la pêche en encourageant sa production et la consommation intérieure de ses produits, ainsi qu’en ouvrant de nouveaux marchés à l’export.

Les restrictions mises en place par Pékin ont déjà entraîné le mois dernier un recul de 30% sur un an du volume de ses importations de produits de la mer nippons, selon des chiffres des douanes chinoises cités par plusieurs médias.

Les craintes de la Chine vis-à-vis des niveaux de radiation des eaux traitées de Fukushima sont peut-être sincères, mais son ton véhément s’explique probablement aussi par les tensions géopolitiques et économiques entre Pékin et Tokyo, décrypte James Brady, analyste du cabinet d’études Teneo.

« La nature multidimensionnelle » de la problématique des eaux de Fukushima « fait qu’elle peut être exploitée par Pékin » sous plusieurs angles, estime M. Brady, interrogé par l’AFP.

La Chine peut ainsi essayer d' »exacerber » les divisions internes au Japon sur le sujet, exercer une « certaine pression » sur le commerce extérieur nippon et même tenter de perturber le réchauffement des liens entre Tokyo et Séoul, selon cet observateur.

La population sud-coréenne s’inquiète également même si le gouvernement de Séoul, qui a récemment réchauffé ses relations avec Tokyo, n’a pas formulé d’objection au plan japonais.

© AFP

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