Afrique du Sud: les chiens victimes des serpents, faute d’antivenin

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Mike Perry, du laboratoire spécialisé African Reptiles & Venom, s'apprête à recueillir le venin d'un serpent à Diepsloot, en Afrique du Sud, le 29 mai 2023 © AFP WIKUS DE WET

Johannesburg (AFP) – Zarza était une chienne adorée de ses propriétaires en Afrique du Sud. Mais après une morsure de cobra au museau, le puissant Staffordshire terrier transporté dans une clinique vétérinaire n’a pas pu être sauvé: impossible de trouver de l’antidote.

Le venin du serpent cracheur du Mozambique provoque la paralysie jusqu’à la mort par arrêt respiratoire, mais ses effets peuvent normalement être contrés par un antivenin administré par injection.

Le problème, disent les vétérinaires sud-africains, c’est que les doses d’antidote sont introuvables depuis des mois.

Interrogées par l’AFP, les autorités sanitaires affirment que l’approvisionnement est normal. « L’antivenin contre les morsures de serpent est disponible dans le pays », assure le National health laboratory service (NHLS), organisme public chargé de la production.

Mais les structures de soins pour animaux ne sont pas prioritaires sur les hôpitaux et « en ce moment, si vous êtes vétérinaire, vous ne pouvez pas obtenir d’antivenin », déplore Johan Marais, 65 ans, directeur de l’African snakebite institute à Pretoria.

Herpétologiste réputé, qui ce jour-là s’occupe avec désinvolture d’un mamba noir venimeux, il dit recevoir une dizaine d’appels par jour de vétérinaires et propriétaires de chiens, tous désespérément à la recherche d’antidotes.

« Si votre chien est gravement mordu par un serpent aujourd’hui, il y a de fortes chances qu’il meure », résume-t-il, en chemise blanche et lunettes de soleil.

L’Association sud-africaine des vétérinaires parle elle de « pénurie à l’échelle du pays ». Et des experts en traitement des morsures de serpent ont réclamé en avril l’aide du ministre de la Santé face à ce qu’ils décrivent comme « un risque sanitaire majeur ».

 Du serpent au cheval

L’Afrique du Sud abrite quelque 160 espèces de serpents, dont beaucoup sont venimeux. Mais le pays ne compte qu’un seul fabricant d’antivenins, qui produit deux antidotes.

L’un contre les morsures relativement rares de boomslang, long et mince spécimen vert, endémique de la région. L’autre contre les morsures de dix serpents dont le cobra du Cap, la vipère heurtante et le mamba vert.

La fabrication des antivenins est complexe, explique Mike Perry, 67 ans, qui travaille dans un laboratoire spécialisé dans l’extraction de venin, African Reptiles and Venom, installé dans la banlieue de Johannesburg.

Il faut pour cela faire cracher les serpents au-dessus d’un récipient en verre, pour pouvoir récupérer leur venin. La substance toxique est ensuite injectée en petites quantités non mortelles à des chevaux qui, avec le temps, développent une immunité.

Le plasma des équidés est ensuite prélevé et utilisé pour fabriquer les antidotes, explique M. Perry, au milieu de quelques-uns des 900 serpents que le laboratoire garde dans de petites boîtes en verre.

La chaîne du froid est cruciale tout au long du processus. Et les problèmes d’approvisionnement sont largement imputés à la crise de l’électricité qui ronge le pays et entraîne de longues coupures de courant quasi quotidiennes.

Le NHLS a reconnu en avril que le manque d’électricité avait affecté la production et les stocks. Mais l’organisation assure que la situation est désormais rétablie et que, à quelques exceptions près, toutes les commandes sont honorées.

Mais à Pretoria, la clinique vétérinaire où Zarza n’a pas pu être soignée ne constate pas d’amélioration. En désespoir de cause, le vétérinaire Dean de Kock, 53 ans, a récemment récupéré des doses d’antivenin périmées auprès d’autres établissements.

Mais « nous avons utilisé le dernier flacon dimanche soir », dit-il. Ces trois derniers mois, il a reçu 25 chiens attaqués par des serpents. Seuls seize d’entre eux ont pu recevoir un antidote.

« C’est rude », avoue-t-il. Dépité, il dit compter sur l’hiver austral, quand les serpents sont moins actifs, pour limiter les dégâts.

« Espérons qu’avant le prochain pic, au début du printemps et de l’été, nous aurons à nouveau des antivenins », ajoute-t-il.

© AFP

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