Fermeture d’une centrale nucléaire, mode d’emploi

La centrale nucléaire d'Emsland

La centrale nucléaire d'Emsland, le 10 avril 2023 à Lingen, en Allemagne © AFP Ina FASSBENDER

Francfort (Allemagne) (AFP) – L’Allemagne va fermer ses trois dernières centrales nucléaires, un processus qui débute samedi mais va s’étaler sur des années jusqu’au démantèlement complet des installations.

 

Débrancher

 

Le jour J, pas d’interrupteur on/off à activer mais un ralentissement progressif.

« À partir de 22 heures (20H00 GMT), nous réduirons la puissance de l’installation de 10 mégawatts par minute », explique-t-on à la centrale bavaroise d’Isar 2, située non loin de Munich.

« Lorsque la puissance du réacteur aura atteint environ 30%, plus aucun courant ne sera injecté dans le réseau à très haute tension et le générateur sera automatiquement déconnecté du réseau électrique ».

Même processus, peu ou prou, dans les turbines des centrales d’Emsland (nord-ouest) et Neckarswestheim (sud-ouest)

Cette dernière tourne déjà à « environ 70% de la capacité réelle » depuis la mi-janvier, explique Jörg Michels, responsable de la division nucléaire chez l’énergéticien EnBW, exploitant du site.

La centrale nucléaire
La centrale nucléaire de Neckarwestheim, le 9 avril 2023 dans le sud de l’Allemagne
© AFP/Archives THOMAS KIENZLE

Mettre une centrale nucléaire à l’arrêt est « un processus de routine » souvent utilisé lors d’inspections, souligne M. Michels.

« La particularité est que cela arrivera pour la dernière fois » dans ce réacteur à eau sous pression, ajoute-t-il.

Rendu moins puissant, le réacteur n’enverra plus d’eau à haute température et sous pression vers la salle des machines, où les turbines cesseront par conséquent de produire l’électricité injectée dans le réseau à haute tension.

Aucune célébration n’est prévue à Neckarwestheim, mais « la direction a décidé d’être présente » en signe de « respect aux employés » qui sont encore 650 sur le site, dit-il.

[A lire aussi L’Allemagne fait ses adieux définitifs au nucléaire ]

Refroidir et démonter

Dans les jours qui suivront, la réaction atomique en chaîne qui provient des barres de combustible va être « complètement stoppée » pour permettre « le refroidissement du cycle atomique de la centrale », prélude à son démontage, précise M. Michels.

L’Allemagne a opté pour le démantèlement immédiat des centrales après leur arrêt sans passer par une phase de mise sous cocon.

Rendus inactifs, les 193 éléments combustibles au coeur du réacteur encore hautement radioactifs seront transférés dans une piscine de stockage d’un bâtiment adjacent.

Ils y resteront immergés pendant 3 à 5 ans jusqu’à ce qu’ils soient emballés dans des conteneurs « Castor » pour être transportés le moment venu vers un lieu d’enfouissement.

centrale nucléaire
La centrale nucléaire d’Emsland, le 10 avril 2023 à Lingen, en Allemagne
© AFP/Archives Ina FASSBENDER

Le démontage un à un des éléments de la centrale commencera, lui, « au début de l’année prochaine », une fois toutes les autorisations obtenues, selon M. Michels.

« Nous sommes bien préparés », explique le responsable, alors que EnBW compte déjà quatre autres réacteurs en cours de démontage, depuis 2008 pour le plus ancien.

Le démantèlement des installations nucléaires doit durer une quinzaine d’années

 

Enfouir, mais où ?

 

Le choix d’un site d’enfouissement profond pour les déchets nucléaires allemands hautement radioactifs accumule les retards.

Selon le plan initial, la phase de recherche elle-même devait être achevée en 2031, avec le but d’avoir un site disponible d’ici 2050.

Mais fin 2022, l’organisme fédéral en charge des déchet nucléaires a proposé de repousser la recherche à un horizon bien plus lointain : jusqu’en 2046 voire 2068, selon les scénarios.

L’acheminement du premier colis radioactif vers le futur lieu sélectionné prendra encore 20 ans.

Entretemps, les déchets hautement radioactifs sont stockés dans des entrepôts temporaires conçus à cet effet.

La mine Konrad où des travaux sont en cours pour convertir l'ancienne mine de fer en une installation de stockage de déchets nucléaires
La mine Konrad où des travaux sont en cours pour convertir l’ancienne mine de fer en une installation de stockage de déchets nucléaires, en juillet 2008 à Salzgitter
© AFP/Archives JOHN MACDOUGALL

Les déchets de faible activité et à vie courte seront eux stockés définitivement dans l’ancienne mine de fer de Konrad, proche de Salzgitter (Basse-Saxe), pour une mise en service prévue à partir de 2027.

Un site de stockage définitif doit permettre de stocker les déchets nucléaires en toute sécurité pendant au moins un million d’années.

« Plus de 30.000 générations seront encore concernées par les conséquences de la technologie nucléaire qui n’a été en service chez nous que pendant 60 ans », avait déclaré en 2017 l’ancienne ministre de l’Environnement, Barbara Hendricks.

© AFP

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Un commentaire

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    • Balendard

    Reste à espérer que la France à l’encontre de la décision prise par son président sans avoir consulté l’opinion va pour finir prendre exemple sur son voisin et poursuivre une orientation comparable