Aux Pays-Bas, des tulipes poussent grâce au bitcoin

tulipes pays bas bitcoin

Bert De Groot, 35 ans, ingénieur en bitcoins et propriétaire de Bitcoin Brabant, dans une serre chauffée par le minage de bitcoins près d'Amsterdam, le 7 décembre 2022 © AFP Valeria Mongelli

Amsterdam (AFP) – Les tulipes et le bitcoin ont tous deux été associés à des bulles financières, mais dans une gigantesque serre près d’Amsterdam, les Néerlandais ont désormais trouvé un moyen de les faire fonctionner ensemble.

Dans la serre, Bert de Groot, ingénieur, inspecte les six serveurs à bitcoins qui effectuent des calculs complexes pour générer de la cryptomonnaie, laissant échapper beaucoup de bruit, mais aussi de la chaleur.

[À lire aussi A Niagara Falls, le bruit du bitcoin couvre celui des chutes]

Celle-ci chauffe la serre où poussent des rangées de tulipes, réduisant la dépendance des agriculteurs au gaz dont le prix a grimpé en flèche depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie.

Avec une différence de 20°C entre l’air entrant et celui sortant des machines, la température atteint un niveau idéal pour la croissance des tulipes et le séchage des bulbes.

Les serveurs sont à leur tour alimentés par les panneaux solaires installés sur le toit, ce qui réduit aussi bien la facture énergétique – normalement très lourde – liée au minage du bitcoin, que les conséquences sur l’environnement.

Pendant ce temps, les producteurs de tulipes et la société de Bert de Groot, Bitcoin Brabant, gagnent de la cryptomonnaie, qui attire toujours les investisseurs malgré le récent effondrement du marché.

Tulipmania

Le philosophe Nassim Nicholas Taleb – qui a développé la théorie du « cygne noir », selon laquelle un événement imprévisible a de grandes conséquences – a comparé le bitcoin à la « Tulipmania » aux Pays-Bas.

L’amour des Néerlandais pour les tulipes a en effet provoqué le premier krach boursier au XVIIe siècle lorsque la spéculation sur la valeur des bulbes a fait exploser puis dégringoler les prix.

Au point culminant de la bulle financière, le prix d’un seul bulbe équivalait à plus de 100 fois le revenu annuel moyen du Néerlandais de l’époque. Avant qu’elle n’éclate en 1637, provoquant la faillite de banques et la perte d’économies des citoyens.

[À lire aussi Pourquoi le bitcoin consomme-t-il une énergie de « dingue » ?]

Danielle Koning, floricultrice de 37 ans et propriétaire de l’exploitation, voit d’un bon oeil l’association de la tulipe et du bitcoin, malgré leur histoire mouvementée.

« Nous pensons qu’avec cette façon de chauffer notre serre mais aussi de gagner du bitcoin, nous avons une situation gagnant-gagnant », déclare-t-elle à l’AFP.

Presque quatre siècles après la crise, les Pays-Bas sont le plus grand producteur de tulipes au monde et le deuxième plus grand exportateur agricole derrière les États-Unis. Une grande proportion des cultures se fait sous serre.

« Préserver l’environnement »

Le pays, situé en partie sous le niveau de la mer, reste bien conscient conscient des effets de cette industrie sur l’environnement.

A quoi il faut ajouter, depuis le début de la guerre en Ukraine, la flambée des coûts de l’énergie.

Or, le minage de cryptomonnaies nécessite d’énormes quantités d’électricité pour alimenter les ordinateurs qui génèrent ces précieuses devises numériques.

Une telle consommation contribue inévitablement au changement climatique.

Bitcoin et tulipes forment donc une paire parfaite selon Bert De Groot, 35 ans, dont l’entreprise fondée au début de l’année compte 17 clients, tels que des restaurants et des entrepôts.

« Cette opération est en fait carbone négative, comme le sont toutes les opérations que je construis », affirme l’ingénieur aux cheveux longs.

« Nous préservons en fait l’environnement », assure-t-il.

La société de Danielle Koning a demandé de ne pas dévoiler l’emplacement exact de la serre et de ses serveurs, qui valent chacun 15.000 euros, pour éviter d’attirer des voleurs.

 « Pour toujours »

Son entreprise possède la moitié des machines et conserve les bitcoins que celles-ci produisent. Chaque mois, les équipes de Bitcoin Brabant viennent nettoyer la poussière et les insectes dans les ventilateurs.

« Nous économisons du gaz naturel », et « deuxièmement, nous gagnons des bitcoin en les générant dans la serre », se réjouit Mme Koning.

Plusieurs entreprises agricoles néerlandaises qui produisent sous serre ont fait faillite récemment à cause de la hausse du prix de l’énergie, explique-t-elle.

Un bitcoin vaut actuellement environ 16.000 euros, beaucoup moins qu’en novembre 2021, lorsqu’il valait plus de 65.000 euros, mais Bert de Groot n’est pas inquiet : « Le bitcoin est là pour toujours ».

© AFP

À lire aussi

Explosion des NFT, en dépit de l’impact désastreux sur l’environnement

Un commentaire

Ecrire un commentaire

    • Guy J.J.P. Lafond

    Les cryptomonnaies, ce sont en effet un terrain miné d’équations complexes pour, soi-disant et en quelques sortes, tenir occupés des mathématiciens et des ingénieurs ingénieux, tous deux en mal d’argent. Des missions honorables, me direz-vous. Il serait bon d’en débattre en plein jour et sur la place publique, je pense.
    Le supposé génie derrière tout cela, c’est que nous avons des fleurs qui poussent dans un bruit assourdissant et sournois.
    Je ne suis pas sûr que les fleurs des voisins vont aimer.
    Et les fleurs, ne l’oublions pas, ne connaissent pas l’odeur de l’argent, et ne veulent pas la connaître non plus, probablement.
    À suivre,
    @GuyLafond
    https://mobile.twitter.com/UNBiodiversity/status/1395129126814691329
    Un bon papa à Montréal qui a très hâte de reprendre contact avec “sa petite fleur” à Ottawa, ON, Canada, n’en déplaise peut-être encore et encore à des juges de la Cour supérieure à Ottawa, ON, Canada.