Pourquoi la chute des prix du gaz ne calme pas les factures et l’inflation ?

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Les prix du gaz chutent depuis plusieurs mois en Europe, s'éloignant de leurs records du début de la guerre en Ukraine mais ce repli ne se devrait pas se refléter avant des mois sur les factures © AFP/Archives ALAIN JOCARD

Londres (AFP) – Les prix du gaz chutent depuis plusieurs mois en Europe, s’éloignant de leurs records du début de la guerre en Ukraine mais ce repli ne se devrait pas se refléter avant des mois sur les factures ou sur l’inflation.

La guerre en Ukraine a propulsé le contrat à terme du TTF, référence du gaz européen sur les marchés financiers, à un sommet historique en mars, quelques jours après le début de l’invasion russe de l’Ukraine, à 345 euros le mégawattheure.

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Le gaz britannique avait lui aussi touché son prix record, à 800 pence par thermie (une unité de quantité de chaleur).

Après être retombés, ils ont de nouveau frôlé leurs records en août dans la foulée de l’annonce de la suspension des approvisionnements russes via le gazoduc Nord Stream 1.

Depuis, le cours du TTF a perdu plus de 66% et celui du gaz britannique quelque 57%.

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Les cours de l’électricité ont connu la même envolée folle fin août, le contrat pour livraison début 2023 en Allemagne, qui sert de référence en Europe, dépassant les 1.000 euros le MWh, du jamais vu.

Contrairement au gaz, le cours de l’électricité reste en hausse de près de 175% depuis le début de l’année et les factures d’énergie ont flambé: elles ont par exemple doublé sur un an au Royaume-Uni.

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Décalage

Dans ce pays, les tarifs de l’énergie pour les ménages sont régulés par l’autorité sectorielle Ofgem et reflètent les variations de cours sur les marchés mais en décalé, car ils ne sont réévalués que tous les trois à six mois.

En outre, même si les factures sont de plus en plus salées, elles sont malgré tout largement atténuées dans plusieurs pays européens par des aides substantielles des gouvernements, contribuant aussi à déconnecter les prix et les cours de l’énergie sur les marchés.

Les factures sont actuellement plafonnées à 2.500 livres par ménage moyen et par an au Royaume-Uni, par exemple, depuis le 1er octobre et jusqu’en avril.

Cela représente une hausse de 80% par rapport aux prix en vigueur cet été mais sans les aides du gouvernement, ce tarif régulé aurait atteint quelque 3.500 livres, selon les analystes, et sans doute plus encore en janvier.

Des mesures de soutien énergétique ont été prises dans d’autres pays européens, notamment en France, où elles concernent les ménages mais aussi les entreprises et les collectivités, ou encore en Allemagne, qui a annoncé fin septembre un plan massif de 200 milliards d’euros.

« Cela veut donc dire que les prix exorbitants que nous avons observés ces 3 à 6 mois (sur les marchés) ne se sont pas encore complètement répercutés » sur les prix de l’électricité pour les consommateurs, résume Georgi Slavov, analyste de Marex.

Par ailleurs, les tarifs régulés actuels ne sont plafonnés que jusqu’en avril Outre-Manche et ils devraient augmenter par la suite, jusqu’à l’été prochain au moins, avertit Paul Dales, économiste de Capital Economics.

Prix garanti

Quant aux énergéticiens qui achètent l’électricité sur les marchés, ils la paient aussi rarement au prix comptant, car ils lissent leurs coûts avec des contrats à terme, qui leur garantissent un prix donné pendant une certaine durée – une sorte d’assurance prix.

Mais a contrario, quand les prix baissent, ce n’est plus possible d’en profiter jusqu’à l’heure de racheter des contrats.

Les compagnies aériennes achètent aussi le carburant dont elles ont besoin sur la base d’un contrat à terme, explique l’analyste indépendant Howard Wheeldon.

« Le prix pour les consommateurs restera élevé pendant un certain temps encore », poursuit-il.

D’après Paul Dales l’inflation, qui se situe à quelque 10% au Royaume-Uni, ne devrait pas beaucoup redescendre de ce seuil avant juillet.

Les cours du gaz ou de l’électricité pourraient rebondir furieusement pendant l’hiver si les températures, jusqu’à présent douces, plongent, ou en cas de nouvel événement géopolitique qui restreindrait l’offre.

Sans oublier un éventuel redémarrage de l’économie chinoise, et donc de sa demande en gaz naturel liquéfié, si le pays met fin à sa politique zéro Covid avec ses confinements qui minent l’activité.

© AFP

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Un commentaire

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    • Serge Rochain

    Pourquoi ?
    Simplement parce que l’occasion était trop belle pour accroître ses marges, qu’il serait sacrilège d’y renoncer à la première baisse du gaz !!!