Ukraine : signature en vue de l’accord sur l’exportation des céréales, poursuite des bombardements

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Une moissonneuse-batteuse dans un champ de blé près de Mykolaïv en Ukraine le 21 juillet 2022 © AFP Ionut Iordachescu

Kiev (Ukraine) (AFP) – Un accord est sur le point d’être signé vendredi à Istanbul pour débloquer les exportations de céréales très attendu par la communauté internationale face aux risques de famines, tandis que les bombardements se poursuivent dans l’est et le sud de l’Ukraine.

La signature de ce texte majeur – âprement négocié sous les auspices des Nations unies et de la Turquie – est attendue pour vers 13H30 GMT. Elle aura lieu au somptueux palais de Dolmabahçe sur le détroit du Bosphore, en présence du secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a précisé la présidence turque.

L’Ukraine, dont la délégation dirigée par le ministre des Infrastructures, Oleksandre Koubrakov, est d’ores et déjà sur place, a toutefois fait savoir qu’elle ne parapherait un accord qu’avec les Nations unies et Ankara, la Russie devant signer un « accord miroir » distinct.

Mikhaïlo Podoliak, un conseiller de la présidence ukrainienne, a en outre averti que son pays n’accepterait aucune escorte par des navires russes concernant ses exportations ni la présence d’aucun représentant de Moscou dans ses ports, promettant une « réponse militaire immédiate » à toute « provocation » russe.

La guerre qui va entrer le 24 juillet dans son sixième mois est livrée dans l’une des régions les plus fertiles d’Europe par deux des plus grands producteurs de céréales du monde. Jusqu’à 25 millions de tonnes de blé et d’autres céréales sont immobilisées dans les ports ukrainiens par des bâtiments de guerre russes et des mines terrestres posées par Kiev pour éviter un assaut amphibie.

Un accord « très important »

L’accord prévoit la mise en place de couloirs sécurisés afin de permettre la circulation des navires marchands en mer Noire, dont Moscou et Kiev s’engagent à respecter la stricte neutralité.

Il serait initialement validé pour quatre mois, le temps de sortir ce qui s’est accumulé dans les silos d’Ukraine, puis automatiquement reconduit.

Cet accord est « très important », a souligné le Kremlin quelques heures avant sa signature.

« Il s’agit d’une part relativement modeste des céréales ukrainiennes, mais il est néanmoins très important que ces céréales atteignent les marchés internationaux », a déclaré le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov, confirmant par ailleurs que le ministre russe de la Défense Sergueï Choïgou sera à Istanbul pour signer l’accord.

Il a aussi estimé qu’il fallait « permettre aux marchés de recevoir des volumes supplémentaires d’engrais et de céréales » russes, dont l’exportation pâtit des sanctions occidentales visant Moscou pour son offensive en Ukraine.

Le porte-parole du ministère ukrainien des Affaires étrangères, Oleg Nikolenko, avait dit jeudi soir à l’AFP que Kiev n’accepterait « que des solutions qui garantissent la sécurité des régions méridionales de l’Ukraine, une position forte des forces armées ukrainiennes en mer Noire et l’exportation sûre des produits agricoles ukrainiens ».

Les Etats-Unis ont salué cet accord, même si « nous n’aurions jamais dû être dans cette situation pour commencer » et s’ils ont dénoncé le fait que Moscou « utilise les denrées alimentaires comme une arme ».

Mais, dans le sud fertile de l’Ukraine, des agriculteurs restent sceptiques. L’accord prévu entre Moscou et Kiev « donne un peu d’espoir », estime certes un agriculteur de la région, Mykola Zaveroukha, qui attend de pouvoir exporter quelque 13.000 tonnes de céréales. Mais, ajoute-t-il aussitôt, « la Russie n’est pas fiable, elle l’a démontré année après année ».

Bombardements russes

Les forces russes poursuivent leur campagne de bombardements sans relâche dans la région de Donetsk (est), qui a été au cœur de l’offensive militaire russe ces derniers mois.

La présidence ukrainienne y a recensé vendredi « cinq personnes tuées et 10 blessées dans la région au cours des dernières 24 heures ».

« Il n’y a plus rien. Les fonctionnaires sont partis. Nous devons nous débrouiller seuls pour rester en vie », a raconté Lioudmila, une femme de 64 ans qui ramassait des abricots à Tchassiv Iar, un village de la région cible d’une frappe sanglante (45 morts selon les autorités locale) le 10 juillet.

Côté prorusse, les autorités des deux territoires séparatistes du bassin minier du Donbass ont annoncé avoir bloqué le plus grand moteur de recherche sur internet du monde, Google, l’accusant de faire « la promotion du terrorisme et de la violence contre tous les Russes ».

Dans le sud, selon Kiev, les forces russes bombardent des villages le long de la ligne de front dans la région de Kherson, où l’armée ukrainienne tente de récupérer les zones prises par Moscou dans la foulée du déclenchement de son invasion fin février.

L’ONG Human Rights Watch (HRW) a accusé vendredi l’armée russe de perpétrer tortures, détentions illégales et enlèvements sur des civils dans les territoires sous leur contrôle dans le sud de l’Ukraine.

« Les forces russes ont transformé les zones occupées du sud de l’Ukraine en un abîme de peur et d’anarchie sauvage », a déclaré Ioulia Gorbounova, chercheuse sur l’Ukraine chez HRW. L’ONG précise avoir interrogé plus de 70 Ukrainiens ayant décrit plus de 40 cas de violations des droits de l’homme et documenté la torture de trois membres de la défense territoriale ukrainienne faits prisonniers de guerre et dont deux sont morts.

© AFP

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