Une lagune vire au rose en Patagonie, polluée par des produits chimiques

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Trelew (Argentine) (AFP) – Une lagune de Patagonie conservait dimanche une teinte rose due au déversement de produits chimiques par des entreprises de pêche de la région, un phénomène qui inquiète les populations locales dans cette région du sud de l’Argentine.

« Pour nous, c’est l’image de la négligence des autorités de la province. Ceux qui devraient contrôler sont ceux qui autorisent l’empoisonnement des populations », a dénoncé l’écologiste Pablo Lada, interrogé par l’AFP.

« La couleur rougeâtre ne cause pas de dommages et, dans quelques jours, elle disparaîtra », avait affirmé la semaine dernière Juan Micheloud, responsable du contrôle environnemental de la province, expliquant qu’une société transportant des effluents d’entreprises de pêche avait « été autorisée à déverser des liquides dans la lagune de Corfo ».

« Ce n’est pas possible de minimiser quelque chose d’aussi grave », lui a rétorqué Sebastian de la Vallina, responsable de la planification au sein de la commune de Trelew.

Cette lagune, qui s’étend sur 10 à 15 hectares, est située à 30 km de Trelew, ville de 120.000 habitants, dans la province de Chubut.

Cette teinte s’explique par la présence de sulfite de sodium, un agent de conservation antibactérien utilisé pour le stockage des langoustines avant exportation, qui a contaminé les eaux souterraines du fleuve Chubut.

Les habitants de la région se sont également plaints entre autres d’odeurs nauséabondes et de la prolifération d’insectes.

Ce n’est pas la première fois que cette étendue d’eau prend cette couleur car elle est un site habituel de déversement de produits chimiques par des entreprises industrielles de la région.

Mais le sujet s’est envenimé ces dernières semaines, devenant dans la ville proche de Rawson –capitale de la province du Chubut– un symbole de la lutte pour la préservation de l’environnement.

Situation « très grave »

Las de ces pollutions à répétition et de ne pas être entendus, des habitants du quartier défavorisé « Area 12 » de Rawson ont bloqué le passage de camions de transport de ces déchets qui traversaient leurs rues.

« Ce qu’il se passe à Rawson est très grave. C’est horrible. Ces liquides sont déversés sans aucun traitement dans de grandes mares artificielles construites à la va-vite pour les entreprises de pêche », a expliqué M. Lada, membre de l’ONG antinucléaire de Chubut.

Ces produits polluants « s’infiltrent jusqu’aux nappes phréatiques. Il s’agit de dizaines de camions quotidiennement », a-t-il poursuivi.

Empêchés de se débarrasser de leurs cargaisons à Rawson, les pêcheurs ont opté pour une solution alternative: demander l’autorisation provisoire de les déverser dans la lagune de Corfo, qui n’a jamais bénéficié d’un intérêt touristique ni de loisirs.

Cette initiative a provoqué un litige entre les districts de Chubut et de Trelew.

La réglementation à Chubut oblige les entreprises spécialisées dans la pêche destinée à l’exportation –en particulier la langoustine et le merlu– à préparer leurs produits sur place. Ce qui a généré plusieurs milliers d’emplois directs dans une province minée par de longues années de crise économique et politique.

Plusieurs dizaines de sociétés détenues par des capitaux étrangers opèrent dans cette zone de pêche située dans les eaux de l’océan Atlantique sous juridiction argentine.

« Le secteur de transformation de la pêche crée des emplois, beaucoup de main d’œuvre, c’est certain. Mais ces entreprises gagnent des millions et ne veulent pas payer le transport de ces effluents vers une usine de traitement à Puerto Madryn, à soixante kilomètres de distance, ni construire une usine de traitement plus proche », a déploré M. Lada.

L’économie de la province de Chubut, qui compte près de 600.000 habitants, s’appuie sur l’agriculture, l’industrie alimentaire, la pêche et le tourisme. Puerto Madryn est notamment connu pour la présence de nombreuses baleines et pingouins de Punta Tombo.

« Chubut est une province riche en ressources naturelles. C’est la quatrième plus importante d’Argentine en termes d’exportation grâce au pétrole, à la pêche ou encore l’aluminium », a noté M. Lada. « C’est inexplicable que nous connaissions une telle crise. Nous pourrions être comme Dubaï » économiquement, a-t-il ironisé.

©AFP

2 commentaires

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    • Xavier78

    Pauvre monde on laisse faire n importe quoi !

    • Maitei

    Mais oui Xavier! La France dans tout ça?

    Puerto Madryn et un sanctuaire de baleines où elles reviennent tous les ans, une immense baie circulaire un peu comme Arcachon, des écosystèmes et des paysages incroyables. C’est même le lieu unique où elles se retrouvent tous les ans dans le sud de l’Atlantique. L’activité touristique y est très intense, centrée sur l’observation des baleines bien sûr… Quelles en sont les conséquences, on en parle peu mais il y a quelques années une baleine a fini par retourner le bateau d’un photographe qui a passé sa vie á les prendre en photo – par pur hasard où fatiguées de ce tourisme qui en veut toujours plus: Toujours plus près, chacun veut toucher… Je crois bien que je suis du côté de la baleine.

    Mais dans cette petite ville il se passe encore autre chose – quand vous y arrivez par la route vous passez à côté d’Alluar. Qu’est-ce que c’est? Trois fois rien, seulement une entreprise française qui profite de la législation en vigueur pour faire la partie la plus polluante de la production d’aluminium dans la baignoire des baleines?! Quelles sont les conséquences de ces déversements dans cette baie à peine ouverte sur l’océan? Là oú Saint-Exupéry elle est venue se poser sur une petite île en forme de chapeau. Quelles sont les conséquences? On en parle pas du tout… La fin des baleines, j’espère que non.