Comment le chant des baleines aiderait à percer les secrets du fond des océans

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Whale off the Table Mountain National Park, near Kommetjie, Cape Town, Western Cape, South Africa

En partenariat avec Futura

Le chant des rorquals est tellement puissant que les ondes qu’il génère peuvent révéler la composition et l’épaisseur des couches du plancher océanique à plusieurs kilomètres de profondeur.

Les chants des baleines sont mélodieux, mystérieux… et puissants, très puissants ! Le rorqual commun émet des sons dont la puissance rivalise avec celle produite par les moteurs des gros navires et qui peuvent être entendus à plusieurs centaines de kilomètres à la ronde. C’est un fait établi que ces vocalises sont utilisées par les cétacés pour détecter des obstacles et communiquer entre eux. Lorsque ces chants sont enregistrés par des scientifiques, ils sont donc spécifiquement étudiés pour suivre les migrations, identifier les individus et tenter de comprendre le sens caché dans ces communications.

Imaginez à présent que des géophysiciens enregistrent l’activité sismique au niveau de la faille de Blanco à 3.000 mètres de profondeur dans l’océan Pacifique alors qu’elle est fréquentée par des rorquals communs. Lorsqu’ils analysent leurs données, celles-ci sont envahies par des milliers de chants émis par les cétacés qui se trouvent à proximité des stations d’enregistrement. D’ordinaire, les scientifiques considèrent la présence de ces chants mêlés à leurs données sismiques comme du bruit parasite. Mais, par curiosité scientifique, deux géophysiciens de l’Université d’État de l’Oregon et de l’Institut de géophysique de l’Académie tchèque des sciences se sont pourtant décidés à analyser ces chants enregistrés au niveau de trois stations postées sur le plancher océanique.

Ils ont ainsi découvert que lorsque le chant des rorquals heurte le fond de l’océan, une partie de son énergie est transmise dans le sol sous la forme d’ondes sismiques. Ils démontrent dans la revue Science que ces ondes traversent la croûte océanique qui les réfléchit et les réfracte. Or, la croûte océanique est composée de différentes couches, dont la composition affecte différentiellement la propagation des ondes. En estimant la vitesse de propagation de ces ondes, les géophysiciens ont donc pu déterminer l’épaisseur ainsi que la nature des couches. Au niveau de la faille de Blanco, la strate superficielle a une épaisseur d’environ 500 mètres et est composée de sédiments marins. La couche sous-jacente est composée de basaltes sur une épaisseur de 1,8 kilomètre et elle repose sur une couche interne de gabbros.

Les canons ou les chants ?

À l’heure de la publication de cette étude, les résultats obtenus avec le chant des rorquals n’ont pas été strictement comparés avec des données issues de l’imagerie sismique. Cependant, la composition de la croûte océanique est similaire pour une zone située à 200 kilomètres de la faille de Blanco et pour laquelle l’imagerie sismique a été utilisée. Les auteurs sont donc confiants quant aux résultats obtenus avec l’analyse des chants des rorquals. Ils rappellent aussi que, bien que les canons à air comprimé permettent d’explorer la croûte océanique jusqu’à une épaisseur de 8 kilomètres contre 3 kilomètres par les chants des rorquals, ces derniers présentent l’avantage d’être gratuits, nombreux, accessibles et naturels et n’induisent donc pas de perturbations dans les écosystèmes marins.

Un article de Fidji Berio, retrouvez d’autres articles sur Futura.

Un commentaire

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    • Méryl Pinque

    Le chant des baleines ou le chant du cygne ?…