À la ferme verticale Jungle, les herbes aromatiques voient la vie en rose

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Dans le ferme verticale de Jungle, à Château-Thierry dans l'Aisne, le 21 juin 2021 © AFP Eric PIERMONT

Château-Thierry (France) (AFP) – Dans un vaste entrepôt d’une zone industrielle à 100 km de Paris, herbes aromatiques et micro-pousses prospèrent sur des plateaux empilés les uns au dessus des autres, sous la lumière rosée et violacée des LED horticoles: bienvenue chez Jungle, une ferme verticale aux grandes ambitions.

Fondée en 2016 par l’ex-financier Gilles Dreyfus et l’entrepreneur Nicolas Séguy, cette jeune pousse a ouvert son premier site à Château-Thierry dans l’Aisne. Elle prévoit d’en ouvrir deux autres d’ici à fin 2022, dans l’ouest et le sud de la France. Et de devenir numéro un des fermes verticales maraîchères dans l’Hexagone.

La ferme de Château-Thierry fonctionne en hydroponie, c’est-à-dire sans terre, les plants poussant sur un substrat et recevant de l’eau chargée en nutriments. Le tout éclairé de LED horticoles, dans une atmosphère chaude et humide.

Deux « tours » de production, avec des plateaux sur dix mètres de haut, fonctionnent actuellement. « D’ici la fin de l’année, on en aura dix-neuf », déclare à l’AFP Gilles Dreyfus, le président de Jungle.

Une tour peut produire 400.000 plantes par an. Lorsque toutes les structures seront montées, la production annuelle sera de 8 millions de plantes, explique cet ancien financier de 38 ans.

Dans ses tours, Jungle fait pousser des herbes aromatiques (basilic, persil, coriandre, ciboulette) mais aussi des micro-pousses (moutarde, radis pourpre, shiso rouge, wasabi) et des salades (laitue, roquette).

Ses produits, qui jouent sur l’ultra-frais, sont destinés à la grande distribution. La société a signé un accord-cadre avec Monoprix et ses herbes sont déjà proposées dans certains magasins parisiens. Jungle négocie aussi avec Intermarché.

« Mettre la puissance de l’innovation industrielle au service de la vie végétale »: telle est la devise de Jungle. « On va répondre aux usages et aux nouveaux besoins des consommateurs avec des plantes sans pesticides, qui ont du goût, qui sont vivantes, qui sont traçables et qui, surtout, sont produites très près de là où elle sont vendues et consommées », vante Gilles Dreyfus.

Dans l’entrepôt, le parcours des graines, disposées sur un plateau, commence sur un tapis automatisé. Elles sont semées avec précision dans un petit récipient rempli de substrat.

Cap ensuite sur les chambres de germination, à l’atmosphère tropicale, où les plants resteront quelques jours. Avant de rejoindre les tours de culture pour se développer et atteindre la maturité, dans une ambiance futuriste.

Dans la tour, un ordinateur contrôle tous les paramètres (eau, nutriments, éclairage, température, humidité, CO2, ventilation) et les ajuste sans cesse en fonction du but recherché.

« En jouant sur le spectre lumineux et les différents rapports de couleurs, on peut faire fleurir une plante plus vite, la rendre plus compacte, avoir des feuilles plus grandes, modifier sa morphologie », explique l’agronome Mickaël Mitterrand, responsable de la recherche et développement chez Jungle et chef de culture.

Un robot est à la manoeuvre pour manipuler les plateaux disposés sur quinze niveaux, les faire monter et descendre et contrôler leur état sanitaire.

« On a une productivité extrêmement importante car on optimise tous les paramètres », souligne Gilles Dreyfus. « En pleine terre, vous avez 3 à 5 récoltes maximum de basilic par an. Nous, nous en avons 14 ».

Il prévoit de parvenir à la rentabilité fin 2022, lorsque le deuxième site sera à la moitié de sa capacité.

Jungle mise aussi sur la production de plantes pour les fabricants de parfum et les marques de cosmétiques. Cette activité représente déjà 30% de son chiffre d’affaires mais la société reste muette sur les fleurs produites.

La zone de production est cachée aux visiteurs. Il s’y cultive « une fleur rare », qui entrera dans la recette d’un parfum, se contente de dire Gilles Dreyfus.

Après dix ans dans la finance, il raconte avoir décidé de changer de vie en 2015 après avoir lu un article évoquant l’agriculture verticale et s’être rendu à New York pour rencontrer « le père du concept », Dickson Despommier, professeur émérite à l’Université de Columbia. Il enchaîne sur une conférence mondiale sur l’agriculture verticale en Californie.

« Je suis rentré à Paris, j’ai plaqué mon job. Et je suis parti faire le tour du monde pour voir ce qui existait déjà ». Chemin faisant il rencontre Nicolas Dupuy, devenu son associé.

Jungle vient de lever 42 millions d’euros pour prendre son envol.

© AFP

Un commentaire

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    • Francis

    De l’eau chargée en nutriments c’est à dire en engrais chimiques. De l’électricité pour l’éclairage, les pompes et peut être le chauffage. Tout cela n’a rien de bio. Pas besoin d’anti-limaces, c’est la seule différence du point de vue pesticide. Le gros avantage de cette technique est de produire pendant l’hiver. L’enrichissement artificiel de l’atmosphère en CO2 relativise l’affolement dû au réchauffement climatique: il stimule la photosynthèse et accélère la croissance des plantes.