Stupéfaction chez les scientifiques avec la découverte de plantes sous la glace au Groenland


Iceberg érodé dans le fjord d'Unartoq, Groënland (60°28'N ¬ 45°19'O).

En partenariat avec Futura

Un Groenland libre de glace. Vous pouvez l’imaginer ? C’est en tout cas ce que suggère l’étude d’une carotte de glace perdue depuis longtemps. Elle apporte aujourd’hui une preuve directe de la grande sensibilité du Groenland au réchauffement climatique.

Il vous arrive de perdre vos clés ou votre téléphone portable ? Cette histoire pourrait vous rassurer. Parce que vous n’êtes pas seul à perdre des choses. Et certains les perdent pendant longtemps. Pendant plus de 50 ans, même parfois… Comme cette carotte qui a été extraite sur une profondeur de près de 1.400 mètres de la glace du nord-ouest du Groenland par des scientifiques de l’armée américaine en 1966. Puis déplacée de congélateur en congélateur. Et finalement retrouvée… en 2017 !

Une heureuse (re)découverte. Parce que les chercheurs de l’université du Vermont qui l’ont alors examinée ne s’attendaient pas à trouver sur les quelques mètres de terre qui la terminaient, autre chose que du sable et de la roche. Mais ils y ont observé des brindilles et des feuilles parfaitement préservées. « Ce sont des fossiles, mais on dirait qu’ils sont morts hier », commente même Andrew Christ, chercheur, dans un communiqué.

C’est grâce à des analyses isotopiques que les scientifiques accèdent à des informations sur la fenêtre de temps durant laquelle les roches ont pu être exposées au soleil ou enfouies sous la glace. Certaines formes rares de béryllium, en effet, ne se forment dans le quartz que lorsque le sol est frappé par les rayons cosmiques. Des techniques de luminescence permettent, quant à elles, d’estimer le temps écoulé depuis que des sédiments ont été exposés à la lumière pour la dernière fois. La datation au radiocarbone et d’autres techniques encore ont permis de venir compléter le tableau. Et d’apporter la preuve — directe alors que le passé du Groenland était jusqu’alors plutôt connu par des indices indirects, recueillis au large — qu’à la place du paysage glacé que nous connaissons aujourd’hui, s’est dressé là un paysage végétalisé. Pourquoi pas une véritable forêt boréale ? Dans un passé relativement récent. Géologiquement parlant en tout cas.

Un Groenland libre de glace

L’étude de cette carotte prélevée à quelque 120 kilomètres à l’intérieur des terres — et à moins de 1.300 kilomètres du pôle nord — montre ainsi aujourd’hui que la majeure partie du Groenland — si ce n’est la totalité — a connu au moins deux périodes libres de glace au cours du dernier million d’années. Peut-être même des quelques dernières centaines de milliers d’années. Dans un climat à peine plus chaud que celui d’aujourd’hui. Une donnée importante pour les scientifiques qui veulent comprendre comment la calotte glaciaire réagira au réchauffement climatique anthropique.

Rappelons qu’il est modélisé que la fonte de la glace du Groenland mènerait à une élévation du niveau de la mer d’environ six mètres. De quoi engloutir un certain nombre de grandes villes côtières. Parmi lesquelles Dhaka, la capitale du Bangladesh, Miami ou encore New York. « Ce ne sera pas le problème des générations futures. C’est un problème urgent pour les 50 prochaines années », souligne Paul Bierman, géoscientifique.

Dans les années 1960, les chercheurs voyaient encore le Groenland comme une région « gelée en permanence ». Mais ces nouveaux travaux font la preuve que le Groenland est en réalité plus sensible au réchauffement climatique que le pensaient les scientifiques. Même lorsque ce réchauffement est naturel. Et bien plus lent que le réchauffement climatique anthropique en cours.

Un article de Nathalie Mayer, retrouvez d’autres articles sur Futura.

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