Climat : des mesures concrètes au menu du Conseil de défense écologique

Bérangère Abba, Barbara Pompili

La ministre de la transition écologique Barbara de Pompili (g) et la secrétaire d’État à la Biodiversité Bérangère Abba arrivent à l'Elysée pour un Conseil de défence écologique, le 27 juillet 2020 à Paris © AFP GEOFFROY VAN DER HASSELT

Paris (AFP) – La Convention citoyenne pour le climat trouve un début de traduction concrète : avant les lois prévues pour 2021, le gouvernement a annoncé lundi de premières mesures « réglementaires » inspirées des propositions des 150 citoyens à l’issue du Conseil de défense écologique présidé par Emmanuel Macron, mais jugées timorées par les écologistes et des ONG.

Ce Conseil, en présence notamment de la nouvelle ministre de la Transition écologique Barbara Pompili et de la secrétaire d’État à la biodiversité Bérangère Abba, nommée dimanche soir, s’est penché en particulier sur le secteur du bâtiment, l’artificialisation des sols et les aires protégées, tandis qu’un moratoire sur les centres commerciaux attendra des dispositions législatives.

Concernant la rénovation thermique des bâtiments, qui représente 20 % des gaz à effet de serre, le gouvernement va « lutter contre les passoires thermiques en introduisant, par décret, la notion de performance énergétique dans ce qu’on appelle un logement décent » à compter du 1er janvier 2023, a fait savoir la ministre déléguée au Logement Emmanuelle Wargon, à l’issue du Conseil.

Ceci permettra aux locataires de passoires thermiques consommant plus de 500 kilowatt heure par mètre carré de chauffage par an, soit 120.000 logements locatifs, « d’exiger du propriétaire de faire des travaux, voire de soumettre le dossier au juge qui pourra décider de geler le loyer ou d’interdire la location du logement ».

Dès 2022, il sera interdit d’installer des chaudières au fuel et au charbon dans des logements neufs ou de remplacer une chaudière existante par de telles chaudières polluantes.

La France s’est engagée à avoir 30 % de sa surface terrestre protégée. Pour atteindre ce pourcentage, elle créera deux nouveaux parcs naturels régionaux, au Mont Ventoux et dans la baie de Somme-Picardie maritime – des annonces déjà faites en février – ainsi qu’une réserve naturelle nationale dans la forêt  de la Robertsau, en Alsace.

Les 150 citoyens de la Convention ont proposé 149 mesures visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre de la France, dont 146 ont été retenues par le Président Emmanuel Macron.

En particulier, ils réclament un moratoire sur les nouvelles zones commerciales en périphérie des villes, demande reprise à son compte par Emmanuel Macron. « Un département de la taille de la Drôme disparaît sous le béton tous les dix ans » et cette tendance est « une spécificité française », a rappelé Mme Pompili.

Par conséquent, le gouvernement veut « ralentir ce phénomène » avec un fonds permettant de « réhabiliter des centaines d’hectares de friches » déjà artificialisées et une circulaire envoyée aux préfets pour leur demander de veiller à la lutte contre l’artificialisation des sols dans les dossiers d’autorisation d’exploitation commerciale, voire de saisir la Commission nationale d’aménagement commercial.

Dans un second temps, « dans le cadre de la loi sur la Convention citoyenne pour le climat, les critères d’examen des autorisations d’exploitation commerciale seront renforcés et rendus opérationnels dans le respect de l’objectif de zéro artificialisation nette », a indiqué la ministre, précisant que ceci concernerait également des projets déjà en cours.

Autre décision, le gouvernement va interdire les terrasses chauffées après l’hiver prochain, délai visant à prendre en compte la crise traversée par les restaurateurs à cause du Covid-19, et obliger la fermeture des portes des bâtiments chauffés ou climatisés.

En revanche, le Conseil ne se prononcera pas sur la limitation à 30 km/h dans les agglomérations ou l’augmentation du bonus écologique pour les véhicules qui émettent peu de CO2, réclamé par la Convention, car la ministre préfère organiser d’abord des concertations avec les élus, qui démarreront dès mercredi.

Le gouvernement devrait ensuite présenter pour d’autres mesures une première version d’un projet de loi fin septembre, pour une présentation au Conseil des ministres en novembre et un examen au Parlement en janvier 2021.

Référendum ?

Une partie des mesures proposées par la Convention devrait être reprise dans le plan de relance du gouvernement qui sera dévoilé le 24 août.

Le 14 juillet, Emmanuel Macron avait dit vouloir « redévelopper massivement » le ferroviaire, et « un grand programme de rénovation » énergétique, à destination des écoles et des Ehpad dans un premier temps.

Le président de la République a aussi souhaité inscrire « le plus vite possible » la lutte contre le réchauffement climatique dans la Constitution, ce qui implique de lancer une complexe procédure de révision qui pourrait se terminer par un référendum.

Ce Conseil de défense écologique, « c’est un gadget (…),  c’est pour faire un peu de tralala, nous, nous disons : appliquez la Convention citoyenne pour le climat et dépêchez-vous parce qu’il reste moins de 600 jours, ce gouvernement est quasi fini et ce mandat est gâché pour le climat pour l’instant », a déploré lundi le secrétaire national d’EELV Julien Bayou sur Franceinfo.

Pour Matthieu Orphelin, (ex-LREM), ces annonces vont « dans la bonne direction », mais ne doivent pas s’en tenir à des « demi-mesures ». Il prend pour exemple le décret sur les critères de la décence d’un logement qui « ne correspond même pas à l’étiquette G du diagnostic de performance énergétique », soit la pire.

Clément Sénéchal, de Greenpeace France, a déploré des annonces « qui renvoie(nt) toute évolution à 2023, soit hors de ce quinquennat ». Barbara Pompili n’évoque pas « l’obligation de rénovation préconisée par la Convention citoyenne », regrette-t-il, tout comme le « simple objectif de ralentissement de la bétonisation ».

Les Amis de la Terre craignent que les entrepôts de commerce en ligne, comme ceux d’Amazon, échappent à un moratoire malgré la volonté de Barbara Pompili. « L’absence de mention d’un gel n’a rien d’un hasard, alors que le Gouvernement sait que les projets d’Amazon de 76.000m2 à Belfort et de 190.000m2 à Ensisheim pourraient être autorisés dans les prochaines semaines », dénoncent-ils.

© AFP

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5 commentaires

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    • Balendard

    Notre constitution stipule déjà comme l’a voulu Jacques Chirac que « chacun d’entre nous a le droit de vivre dans un monde équilibré et favorable à sa santé »
    On observe le résultat : d’une part le kWh électrique 3 fois plus cher que le kWh gaz et d’autre part le coronavirus.
    Il est clair que ce qu’il nous manque depuis quelques temps c’est la volonté d’agir. Ceci en diminuant notre consommation d’énergie finale sur les postes les plus importants : l’habitat et la voiture. Et ceci en ne faisant pas les choses à moitié. Ceci sans dissocier par exemple les EPAD et les mairies de l’appartement de ‘Monsieur tout le monde ».
    Ceci en changeant en quelque sorte d’échelle comme le proposait Nicolas Hulot et somme le stipule les accords internationaux de la COP21. Ceci aussi en respectant sur le plan législatif interne nos propres lois (LTECV). Cela enfin sur le plan européen en arrêtant d’importer à grand frais du pétrole et autres produits fossiles et en abandonnant pour notre plus grand bien des chaînes énergétiques gloutonnes en énergie finale. À savoir celles assurant actuellement le chauffage de l’habitat et la motorisation de nos voitures. Il suffit pour cela d’agir et de travailler en allant dans le sens de la « Solar Water Economy. »
    Nous avons les connaissances pour le faire, le problème est de savoir si nous en aurons la volonté

    • Aristide NGOMA NGOMA

    Nous soulignons et encourageons au passage que la définition de la feuille de route devrait incomber au parlement, non au gouvernement.

    • Michel CERF

    Il reste beaucoup à faire , c’est certain , mais il faut reconnaître que le Président Macron , contrairement à la plupart de ses prédécesseurs cherche à améliorer les choses , il n’est pas responsable de la courte durée du mandat présidentiel qui ne permet pas de faire rapidement certaines réformes ni du coronavirus .

    • michel nageleisen

    pourquoi les ecologistes sont telement virulent envers ce gouvernement monsieur hollande n a pas fait grand chose pour l ecologie maintenant qu on commence a aller dans le bon sens les critiques pleuvent pour empecher le gouvernement de reussir ca doit etre le spectre des prochaines elections l éternel mal francais pour la course au pouvoir

    • Rozé

    1) nous n’avions pas besoin d’attendre les conclusions de la CCC pour savoir ce qu’il faut faire pour préserver la biodiversité, éviter les pollutions, devenir sobre en énergie et en tout
    2) Au minimum, il fallait prendre toutes les demandes de la CCC sans exception; choisir c’est déjà abandonner un peu, beaucoup même
    3) les divers mouvements pro-écologie font remarquer justement que ce gouvernement comme tous ceux qui l’ont précédé ne fait rien qu’améliorer le business au détriment de la cause écologique pourtant essentielle à notre survie.
    4) on ne dit pas assez que la concentration (commerciale par hyper ou par amazon, industrielle, habitation et population dans les grandes agglos, etc …) est la cause principale de tous les désordres de notre société. Si les hommes étaient mieux répartis sur les territoires grâce à la multi-fonctionnalité de ceux-ci et à moins de spécialisation à outrance, nombre de problèmes écologiques graves disparaitraient.