Rio+20 : quand l’ivoire vaut plus que l’or

Une corne de rhinocéros peut valoir 30 000, voire 50 000 dollars le kilo : plus que l’or. Une grosse corne peut ainsi atteindre 500 000 dollars. La médecine traditionnelle asiatique prête en effet à ces cornes des vertus aphrodisiaques ou thérapeutiques qui attirent les convoitises et, bien que les grands herbivores soient protégés et la vente de leur corne totalement interdite, la demande croissante encourage le trafic. Ainsi, en 2011, 448 rhinocéros ont été tués illégalement rien qu’en Afrique du Sud. Il n’y en avait eu que 333 en 2010, 122 en 2009, 83 en 2008 et seulement 13 en 2007.

Le 25 octobre 2011, le dernier rhinocéros de java du continent asiatique a été retrouve mort, la corne coupée. Le nombre de tigres à l’état sauvage a, quant à lui, diminué de 97 % au cours du siècle dernier ! Trois sous-espèces se sont éteintes et une quatrième n’a plus été vue depuis 25 ans. Au niveau mondial, la population sauvage est tombée à 3 200 individus environ. L’animal est chassé pour sa peau mais pas seulement : ses os sont utilisés pour fabriquer une potion miracle – le vin d’os de tigre, ou hu gu jiu – contre les rhumatismes, l’ulcère ou l’asthme, et son pénis est censé posséder des propriétés aphrodisiaques et se vend plusieurs milliers de dollars pièce…

Le braconnage a pris, ces dernières années, une ampleur inégalée. Des réseaux mafieux opèrent aujourd’hui à l’échelle internationale ; ces nouveaux braconniers se déplacent de nuit, en hélicoptère, équipés de lunettes de vision nocturne et de fusils d’assaut. Pour leur faire face, les gardes forestiers à l’ancienne ne suffisent plus.

En 2012, presque 500 éléphants ont été tués en quelques semaines dans un parc du Cameroun par quelques dizaines de trafiquants armes n’hésitant pas à tirer sur les gardes. Cette criminalité s’explique par l’ampleur des enjeux : selon la convention sur le commerce international des espèces menacées (CITES), le trafic d’animaux et de végétaux atteint 7 à 10 milliards de dollars par an. En valeur, il n’est dépassé que par la drogue et les armes. Pour autant, les risques sont beaucoup plus faibles : une personne arrêtée en possession de 1 kg de corne risque beaucoup moins que si elle détenait la même quantité de cocaïne. Et le trafic est beaucoup moins surveillé.

Car comment quelques dizaines de gardes, même très bien formés, équipés et motivés, pourraient-ils surveiller des centaines de kilomètres carrés de forêt et d’espaces sauvages ? C’est d’autant plus difficile que les braconniers peuvent s’assurer de complicités dans les populations locales, une infime partie de la valeur finale du produit pouvant représenter pour elles près d’une année de salaire. Tout cela fait qu’aujourd’hui, le combat pour sauver certaines espèces semble perdu. Faute d’alternative, certains ne voient plus d’autre solution que la légalisation : ce serait une manière de contrôler les filières, d’encourager l’élevage et de fournir aux populations locales un revenu qui les inciterait a participer a la protection des espèces. Ce qui n’est pas sans poser de problèmes.

Extrait du livre « 20 ans après… la Terre Le bilan du développement durable » rédigé par la rédaction de GoodPlanet. Ce livre sort à l’occasion du 20e anniversaire du Sommet de la Terre de Rio et disponible dès le 14 juin2012 aux éditions de la Martinière. Soutenez-nous en achetant cet ouvrage.

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