Alors que le gouvernement annonce la construction d’un deuxième réacteur nucléaire de type EPR, Stéphane Lhomme, porte-parole du Réseau sortir du nucléaire, attaque un par un les arguments avancés pour justifier une telle décision.
C’est sous prétexte de réduire la facture énergétique du pays, tout en luttant contre le réchauffement climatique, que M. Sarkozy entend faire construire en France un second réacteur de type EPR. Or, il suffit d’ouvrir les yeux pour constater que le est une réponse parfaitement inefficace aux graves problèmes du et de l’énergie : malgré 58 réacteurs qui produisent 80% de son électricité, la France est frappée comme ses voisins par l’explosion du prix de l’énergie. Les pêcheurs, les automobilistes et bien d’autres catégories sont là pour en témoigner.
Les documents annuels (1) du Ministère de l’Economie sont d’ailleurs limpides : pour 2006, « La facture payée pour un approvisionnement énergétique d’origine étrangère est le double de celle de 2003. Sans elle, le commerce extérieur de la France aurait été excédentaire de 15 milliards d’euros. Avec elle, il est déficitaire de 30 milliards« . Pour 2007 : « Hors énergie, la balance commerciale serait excédentaire de 5,6 milliards d’euros ; avec l’énergie, elle est déficitaire de 39,2 milliards.«
Les pronucléaires en sont réduits à suggérer que « sans le nucléaire, ce serait pire« . Ce qui est à la fois dérisoire – est-ce donc ça le « miracle nucléaire » ? – et faux : c’est avec le que c’est pire puisque nous avons à acquitter la facture pétrole-gaz ET la facture . Car, certaines déclarations le laissent abusivement croire, le n’est pas « gratuit« , bien au contraire :
– l’investissement de départ est pharaonique : la France est d’ailleurs très loin d’avoir fini de payer les réacteurs actuellement en service. Si l’argent public investi dans l’atome depuis 50 ans figurait sur les factures EDF, les citoyens verraient bien que l’électricité est extrêmement chère. C’est si vrai que, aux USA, c’est seulement parce que l’Etat fédéral offre des substantielles aides publiques aux compagnies privées que certaines envisagent la construction de quelques nouveaux réacteurs.
– la facture « aval » (démantèlement des installations, déchets radioactifs) s’annonce elle aussi incommensurable : EDF se veut rassurante en prétendant avoir mis de côté quelques dizaines de milliards d’euros, mais la Grande-Bretagne a fixé à 103 milliards le coût du démantèlement de ses propres installations, pourtant bien moins nombreuses que les notres. Il est évident que, tôt ou tard, il va manquer plusieurs centaines de milliards d’euros… et encore plus si de nouveaux réacteurs sont construits. Nos enfants apprécieront.
Pour enfoncer le clou, rappelons que le ne couvre que 2,5% de la consommation mondiale d’énergie : une part si faible qu’elle a une influence quasi nulle sur le et sur le prix de l’énergie. Et, contrairement à ce que l’on peut lire ici ou là, cette part va encore décliner : de nouveaux réacteurs vont hélas être construits ici ou là, mais ils seront moins nombreux que ceux qui vont fermer dans les années à venir : la moitié des 435 réacteurs en service sur Terre approchent de leur fin de vie.
Il convient aussi de regarder ce qui se passe en Chine, présentée comme le nouvel « eldorado » de l’atome. Si les Chinois construisent les 40 nouveaux réacteurs annoncés, le couvrira royalement… 4% de leur électricité, c’est-à-dire 0,7% de la consommation chinoise d’énergie. Les données sont quasiment les mêmes pour l’Inde. Aux USA, l’atome représente 20% de l’électricité, soit 4% de la consommation totale d’énergie. Et la majorité des 103 réacteurs américains vont fermer dans les 20 ans. L’atome restera dans tous cas une énergie marginale, même dans les pays les plus nucléarisés.
Le est donc incapable « d’assurer l’indépendance énergétique » d’un pays, même lorsqu’il couvre 80% de l’électricité comme en France. Et ce d’autant moins que l’uranium, le combustible des réacteurs, est importé à 100%. Son prix a déjà été multiplié par dix en quelques années et ce n’est qu’un début : les différents pays nucléarisés, Chine en tête, ont commencé à se battre pour accéder aux dernières réserves facilement extractibles.
Par ailleurs, il ne faut pas oublier les tares bien connues du nucléaire, que nous ne développons pas ici :
– risques de catastrophes : on a encore frôlé le pire pendant l’été 2006 à Forsmark en Suède et l’été 2007 lors du séisme de Kashiwasaki au Japon ;
– déchets radioactifs : malgré les belles déclarations depuis 50 ans, aucune solution acceptable n’existe, et une véritable catastrophe est en de se produire en Allemagne où des déchets ont été stockés dans une de sel qui devait pourtant assurer un confinement « parfait« . En France, l’Etat recherche actuellement un site pour y enfouir des déchets radioactifs : 3115 maires ont été démarchés… mais personne, à raison, ne veut de ce cadeau empoisonné ;
– rejets dans l’environnement : une grande étude scientifique vient de montrer en Allemagne un excès de cancers jusqu’à 50 km autour des centrales ;
– contamination de l’environnement par les mines d’uranium : la France contamine ainsi le Niger, c’est une véritable « délocalisation de la pollution » ;
– prolifération à des fins militaires : la France fait d’ailleurs un sale bisness avec des dictateurs comme Kadhafi.
Mais il est une autre vérité à connaître, bien plus réjouissante : sur Terre, les énergies renouvelables produisent beaucoup plus que le . D’ailleurs, la seule hydroélectricité produit plus que l’atome : 3000 Twh/an contre 2600. De quoi faire chanceler les idées fausses malheureusement si répandues en France, le seul pays au monde où l’on croit que le est indispensable et les énergies renouvelables négligeables.
Les perspectives de croissance de l’énergie éolienne sont exponentielles partout sur la planète, avec des productions d’ores et déjà si massives que sont balayées les objections rétrogrades sur l’intermittence de cette production. Le (thermique et photovoltaïque) lui aussi est en plein envol, en particulier dans les Etats comme la Californie qui ont compris que l’avenir était dans les renouvelables.
En combinant les économies d’énergie et les énergies renouvelables, il est possible d’assurer protection de l’environnement et indépendance énergétique : il y aura toujours du soleil, du vent, du bois, etc. Lorsque se produiront, peut-être plus vite qu’on ne le pense, de graves ruptures d’approvisionnement en pétrole, gaz ou uranium, les grands perdants seront ceux qui auront gaspillé leur argent dans des voies de garage comme le nucléaire, à commencer par ce pauvre réacteur EPR dont les deux chantiers en cours, en Finlande et à Flamanville (France), connaissent de graves déconvenues.
Enfin, il faut rappeler que, contrairement à ce qui est prétendu par ses promoteurs, l’EPR n’est pas conçu pour résister à un crash d’avion de ligne : pour avoir rendu public un document confidentiel défense, issu d’EDF, qui reconnaît cette vulnérabilité, l’auteur du présent article a été arrêté à deux reprises par la DST et risque 5 ans de prison : le nuit autant à la démocratie qu’à l’environnement.
NOTES
(1) Les bilans et factures énergétiques de la France depuis 1996 DGEMP-Observatoire de l’énergie
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