Une nouvelle étude scientifique montre l’impact positif pour la biodiversité de l’interdiction de l’imidaclopride, un pesticide de la famille des néonicotinoïdes aussi surnommés « tueurs d’abeilles ». Ce produit a été interdit en France en 2018. Des scientifiques français et allemands ont mesuré l’impact de cette interdiction sur 57 espèces d’oiseaux sur 1983 sites entre 2013 et 2022 en utilisant comme indicateur l’abondance des populations. Leurs travaux ont été publiés dans la revue Environmental Pollution mi-novembre 2025.
Un léger rétablissement des populations d’oiseaux insectivores après l’interdiction d’un néonicotinoïde
Le titre de leur publication Léger rétablissement des populations d’oiseaux insectivores après l’interdiction des néonicotinoïdes en France, suggérant des impacts durables (Weak recovery of insectivorous bird populations after ban of neonicotinoids in France, hinting at lasting impacts) reflète l’optimisme nuancé et prudent des conclusions des chercheurs. Ils constatent en effet qu’après l’interdiction de l’imidaclopride, supposé jouer un rôle dans le déclin des populations d’oiseaux insectivores, ces dernières se portent mieux. Leur étude montre que l’écart d’abondance des populations entre les zones traitées par l’imidaclopride et les zones préservées est passé de 12,7 % (en 2013) avant l’interdiction à 9 % ensuite (en 2022). « Nos résultats ne disent pas qu’au total les espèces d’oiseaux insectivores rebondissent en France, mais qu’elles commencent seulement à récupérer dans les seules zones où l’imidaclopride a été le plus utilisé avant d’être interdit », explique le chercheur Thomas Perrot au Monde.
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Les espèces d’oiseaux généralistes et granivores, dont l’alimentation ne repose pas seulement sur les insectes, ont des écarts d’abondance de populations nuls ou non-linéaires entre les zones exposées aux pesticides et les zones épargnées. Les oiseaux généralistes et granivores semblent donc moins vulnérables à l’épandage d’insecticides que leurs congénères insectivores. En conséquence, l’interdiction des néonicotinoïdes semble favoriser la restauration des populations d’insectes dont les oiseaux se nourrissent, ce qui peut expliquer en partie leur retour.
Des résultats encourageants
Thomas Perrot, qui travaille au sein de la Fondation pour la recherche sur la biodiversité, a codirigé cette étude. Contacté par GoodPlanet Mag’, il confirme : « ce qu’il faut bien comprendre et nuancer par rapport aux articles de presse qui sont souvent très optimistes, c’est que notre publication ne dit rien sur la tendance globale de la population d’oiseaux à l’échelle française. Notre article dit juste qu’il y a un rétablissement sur les sites où il y avait beaucoup d’imidaclopride. Ce n’est pas sur l’ensemble des sites, mais seulement sur ceux où il y a eu une forte pression. On observe les premiers bénéfices. »
Laisser du temps au vivant pour qu’il reconquiert sa place
Selon Thomas Perrot, « nos résultats sont encourageants car ils montrent que, si les pressions exercées sur les écosystèmes diminuent, la biodiversité peut revenir. L’effet des pressions exercées par les pesticides n’est pas permanent ni irréversible. Pour préserver la biodiversité, il faut maintenant créer des systèmes agricoles qui se passent d’agrochimie. »
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Les scientifiques estiment que la réduction des pesticides peut jouer un rôle dans les mesures de conservation. Thomas Perrot déclare que la suite des recherches est de « regarder si les tendances d’utilisation d’un pesticide expliquent les tendances d’abondance des populations d’oiseaux. »
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Pour aller plus loin
L’étude (en anglais) Weak recovery of insectivorous bird populations after ban of neonicotinoids in France, hinting at lasting impacts – ScienceDirect
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