En Bourgogne, une forêt pour protéger la vigne du réchauffement

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Des vendangeurs travaillent dans les vignes du Château de Meursault, le 26 août 2025 à Meursault, en Côte d'Or © AFP ARNAUD FINISTRE

Meursault (France) (AFP) – Au Château de Meursault, en Bourgogne, les vendangeurs coupent les grappes de raisins parfois desséchés, à dix mètres d’une forêt plantée pour aider la vigne à résister aux chaleurs, une initiative novatrice dans l’arsenal des vignerons face au réchauffement. 

« J’ai commencé dans les années 80 avec des vendanges en septembre et parfois fin octobre, et depuis l’an 2000, on est déjà à une dizaine de vendanges commencées en août » : du haut de ses 62 ans, Stéphane Follin-Arbelet, directeur général des lieux constate « tout l’impact du réchauffement climatique » sur les vignes.

« On a des feuilles sèches et on sait que cette année, on a eu une canicule », montre-t-il à l’AFP devant des grappes parfois flétries par le soleil. Mais ce n’est pas tant cette vague de chaleur-là que leur « répétition » qui force à l’action, assure le responsable.

« Où va-t-on dans les trente ans à venir ? », se demande-t-il.

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Le Château de Meursault et son vignoble, le 26 août 2025 à Meursault, en Côte d’Or
© AFP ARNAUD FINISTRE

Pour aider la vigne à s’adapter et éviter que le vin devienne imbuvable car trop chargé de sucre et d’alcool, le domaine de Meursault (Côte d’Or), 67 hectares, a déployé la palette classique des vignerons dans la lutte contre le réchauffement : plantation de porte-greffes (partie enterrée de la vigne) plus résistants, recréation de haies, culture en bio…

Mais le château a voulu aller plus loin : le long d’un cours d’eau situé à seulement une dizaine de mètres des ceps, une ripisylve, forêt poussant sur les bords d’une rivière, a été plantée de 3.000 espèces environ d’arbres et arbustes.

« Cohabitation très favorable »

« La proximité d’une bordure boisée a un impact jusqu’à 100 mètres de distance », en terme de biodiversité, de vie du sol ou de température, explique Fabrice Desjours, concepteur de la ripisylve de Meursault.

Pionnier des « jardins-forêts » basé dans la Saône-et-Loire voisine, M. Desjours en a planté des hectares en Bourgogne et partout en France, où il développe ce mouvement né dans les régions tropicales du Globe.

A Meursault, quatre ans après la plantation de la forêt, « on constate qu’on a plus d’oiseaux, beaucoup plus d’insectes », confirme M. Follin-Arbelet, évoquant une « cohabitation » entre la vigne et la forêt « très favorable ». « Et dans le sous-sol, il y a des champignons qui peuvent atteindre la vigne, afin de mieux distribuer les éléments nutritifs », explique-t-il.

Consciente de leur bienfait, l’Organisation internationale de la vigne et du vin (OIV), sorte d’ONU du vin, avait encouragé la création de « réservoirs de biodiversité » dans son appel pour « le développement durable » de la vigne, lancé en octobre 2024.

Les îlots de biodiversité permettent le retour de « plusieurs centaines de catégories d’arthropodes (insectes, araignées) et de dizaines d’espèces d’oiseaux », a montré une étude portant sur des vignes de plusieurs pays européens et appelée « BioDiVine ».

Ces réservoirs offrent de plus un « rafraîchissement des vignes voisines » des arbres, « de l’ordre de 2,5°C durant la période de véraison », moment où le grain de raisin gonfle, note Vitiforest, une étude notamment menée par l’Institut Français de la Vigne (IFV).

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Stéphane Follin-Arbelet, directeur général du Château de Meursault avec des vendangeurs, le 26 août 2025 à Meursault, en Côte d’Or
© AFP ARNAUD FINISTRE

La plantation d’arbres au milieu des ceps, pratique ancestrale victime de la mécanisation, fait aujourd’hui son retour, comme par exemple au prestigieux château Cheval-Blanc, dans le Bordelais. Mais créer toute une forêt proche des vignes comme à Meursault, même de taille réduite, est pionnier.

« Plus vous mettez de biodiversité, plus vous avez d’insectes, plus le système peut se reproduire et plus il est résilient, robuste », estime M. Follin-Arbelet, sous les piaillements des oiseaux ayant déjà peuplé les arbres de la nouvelle forêt.

© AFP

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