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Albanie : la canicule précipite la tonte des moutons et des brebis

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Un berger tond des moutons dans un enclos près de Vlora, le 12 juin 2024 en Albanie © AFP ADNAN BECI

Vlora (Albanie) (AFP) – Etourdies, les bêtes attendent sous un soleil de plomb qu’on les débarrasse de l’épaisse laine qui les fait tant souffrir. Les températures anormalement élevées des derniers jours obligent les bergers de Dukat, dans le sud de l’Albanie, à tondre au plus vite.

« Les températures obligent les bergers à précipiter la tonte : les vagues de chaleurs inattendues peuvent être fatales », assure Nexhip Hysolokaj, un biologiste venu saluer ses proches mercredi à l’occasion de la tonte, traditionnellement un jour de fête en Albanie.

Les hommes se réunissent à l’aube. Il faut faire vite, les moutons peuvent mourir d’un coup de chaleur et le thermomètre dépasse rapidement 39 à 40°C dans la plaine de Dukat, terre agricole au pied des majestueuses montagnes qui veillent sur la mer adriatique.

Habituellement organisée fin juin, la tonte a lieu dès le début du mois cette année, pour protéger les bêtes d’un soleil qui peut être mortel.

Le risque est beaucoup plus élevés chez les moutons et brebis qui ne sont pas tondus, car la laine empêche la sueur de s’évaporer.

« Ils supportent le froid, mais ils ont beaucoup de problème avec la chaleur, il faut se dépêcher de les débarrasser de leur laine qui les étouffe », explique Syrja Brahimi, un berger de 64 ans, tout en taillant à grands coups de ciseaux dans le pelage des bêtes.

Il a invité ses amis dans sa bergerie, pour qu’ils l’aident à tondre son troupeau de 150 bêtes. Bientôt, il ira à son tour aider d’autres bergers à tondre et vermifuger, avant le départ en transhumance pour l’été.

Moment de fête et de partage malgré l’urgence, la tonte se fait encore au ciseau, en suivant une tradition ancestrale. Au fil des heures, le silence et la concentration du matin seulement entrecoupés de bêlements laisse la place à l’euphorie d’une journée entre amis. Café, raki (un alcool traditionnel), pain et fromage viennent soulager les bergers de la chaleur et de l’effort.

Douceur

« Il faut finir le travail avant 10H00 ,pour protéger les moutons du soleil brûlant », prévient Feim Koçi, 61 ans. « J’ai commencé à tondre mes premiers moutons à l’âge de 15 ans, un travail difficile mais que j’ai fait avec amour. Moutons et brebis sont nos enfants, notre famille, notre vie », souligne le berger, le corps trempé de sueur.

D’un coup de bras, il attrape une brebis ou un mouton. Ensuite, « il faut prendre beaucoup de précaution en utilisant les ciseaux pour ne pas traumatiser la bête en lui coupant la peau et lui faire mal », avertit Hasko Koçi, la tête recouverte d’une blouse blanche pour se protéger du soleil. « Il faut que la bête se sente rassurée. On lui parle, on la caresse… Elle doit comprendre que rien de mal ne va lui arriver ».

A côté de lui, Feim Koçi aiguise ses ciseaux. Il tond doucement : il commence par la cuisse de l’animal, puis remonte sur la poitrine. Une fois l’animal tondu, on le met vite à l’abri, sous une tente de fortune couverte de fougères.

Selon M. Brahimi, cette année, la hausse des températures n’a pas seulement précipité la tonte, elle a aussi eu un impact négatif sur la production laitière : de 65 kilos par brebis l’année dernière, on est passé à 50, affirme-t-il.

Mais les bergers tiennent bon.

« Tant qu’on est en vie, on ne rendra pas les armes. On trouvera des solutions pour sauver nos brebis et nos moutons », lance Hasko Koçi, 67 ans. « Mais ici on est tous âgé de plus d’une soixantaine d’année, il ne reste plus de jeunes dans le village, ils sont tous partis en ville ou à l’étranger ».

« Ces moutons, ils vont tous finir chez le boucher. Il n’y a pas d’autres choix », avoue à mi-mot M. Brahimi. Essayant sans succès de cacher les larmes qui viennent voiler ses yeux.

© AFP

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