Bastion du pétrole aux Etats-Unis, le Texas bourgeonne de projets en énergies renouvelables

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Des employés d'Engie en visite d'un champ d'éoliennes pour le projet Limestone Wind, à Dawson au Texas (sud des Etats-Unis), le 28 février 2023 © AFP Mark Felix

Dawson (Etats-Unis) (AFP) – Des champs noircis par des panneaux solaires à perte de vue et des forêts d’éoliennes qui rompent la monotonie des plaines: le Texas, foyer historique de la production du pétrole aux Etats-Unis, se veut aujourd’hui à la pointe d’une nouvelle révolution énergétique, celle du renouvelable.

Au sud de Dallas, les comtés de Navarro et Limestone sont symboliques de cette transition: berceaux de l’industrie pétrolière texane à la fin du XIXe siècle, qui a fait la richesse de la région, ils sont aujourd’hui aux avant-postes des énergies vertes.

Un nouveau parc d’éoliennes y a été inauguré la semaine passée par l’énergéticien français Engie, avec 88 mâts et une capacité de production de 300 mégawatts (MW).

Plus à l’ouest, à Abbott, autre bourgade rurale, une ferme solaire de 250 MW a commencé à produire de l’électricité, accompagnée d’une zone de stockage d’énergie par des batteries.

Selon l’organisation American Clean Power, le Texas est l’Etat américain qui hébergeait en 2022 la plus grande part de projets d’énergie renouvelable à destination d’entreprises commerciales et industrielles. Avec 35% des capacités en énergie, il caracole loin devant le second, l’Illinois, dans le nord du pays, à 7%.

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Le vaste Etat du Sud concentre également 20% des projets en cours.

Les mâts d’éoliennes sont cependant encore loin de remplacer totalement les derricks de pétrole dans le paysage texan.

« Certes, lorsque nous pensons au Texas, nous voyons un grand Etat gazier et pétrolier. Je dirais plutôt que le Texas est riche en ressources naturelles (…) et ils sont très bons pour gérer ces différentes ressources », souligne Frank Demaille, directeur général adjoint d’Engie.

Ressources énergétiques multiples

Terre des raffineries et de l’industrie pétrochimique, le Texas dispose de son propre réseau pour alimenter ses 30 millions d’habitants, une exception aux Etats-Unis.

En 2021, une vague de froid intense provoquant des délestages sur le réseau avait entraîné des coupures pour plusieurs millions de foyers et fait plus de 200 morts, poussant cet Etat conservateur à renforcer et diversifier son approvisionnement.

Le Texas reste aujourd’hui largement tributaire des énergies fossiles, le gaz restant en tête de son mix énergétique début 2023 (42%, selon le gestionnaire du réseau Ercot) aux côtés du charbon (11%). Il accorde de plus en plus de place au renouvelable cependant, en particulier l’éolien (29%) et le solaire (11%). Le reliquat est fourni par le nucléaire et l’hydraulique.

« Nous utilisons les énergies classiques, à base de carbone, mais le Texas est aujourd’hui leader en énergie propre. Je pense que nous assisterons à l’avenir à une combinaison des deux », estime Jeff Montgomery, président de Blattner Energy, qui a réalisé 400 projets d’énergie renouvelable dans tout le pays.

« Le gaz est extrait pour être vendu à l’Europe, et la guerre en Ukraine a renforcé cette dépendance au gaz américain et surtout texan. En parallèle, ils ont développé une vraie expertise dans les énergies solaire et éolienne », détaille Frank Demaille.

L’IRA, le grand plan vert du président Joe Biden voté l’année dernière, pourrait accélérer la tendance, en prévoyant de larges subventions pour la transition énergétique.

Les impôts générés par les énergies renouvelables ont permis d’améliorer les écoles, selon certains responsables locaux.

Mais certains sont plus circonspects, à l’image de John Null, ingénieur de 42 ans résidant du comté de Navarro, pour qui les habitants proches ne profitent pas réellement des investissements réalisés dans l’éolien, alors que les gigantesques mâts apparaissent devant leurs fenêtres.

Lors de la dernière vague de froid début février, « il aurait été pratique qu’un interrupteur puisse transférer l’énergie produite ici vers la communauté » avoisinante, estime-t-il.

Des projets visant à alimenter des zones défavorisées sont en cours, comme sur une ancienne décharge où doit être construite une ferme éolienne, dans un quartier défavorisé de Houston, la quatrième plus grande ville des Etats-Unis.

« Il y a des besoins en énergie », assure Paul Curran, directeur exécutif de BQ Energy, qui devrait entamer les travaux cette année pour une installation solaire de 50MW.

Et pour cet ancien cadre de l’industrie pétrolière, les deux énergies ne sont pas en concurrence.

« Il n’y a aucun problème si vous réalisez les projets solaires ou éoliens aux bons endroits, à destination des bons marchés. C’est même bien reçu par l’industrie pétrolière et les experts », assure-t-il.

© AFP

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