Fukushima : l’acquittement d’ex-dirigeants de Tepco confirmé en appel

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Manifestation réclamant une condamnation en appel de trois ex-dirigeants de Tepco après la catastrophe de Fukushima, devant la Haute cour de Tokyo le 18 janvier 2023 © AFP Philip FONG

Tokyo (AFP) – La justice japonaise a confirmé mercredi en appel l’acquittement de trois anciens dirigeants de Tepco, l’opérateur de la centrale nucléaire de Fukushima, jugés en 2019 non coupables de négligence pour l’accident nucléaire consécutif au tsunami de 2011, suscitant la colère des plaignants.

« Comment puis-je expliquer cette décision aux enfants de Fukushima qui ont tellement souffert? », s’est indignée Etsuko Kudo, une ancienne habitante de Fukushima âgée de 68 ans interrogée par l’AFP.

« Il y a tellement de gens qui ont dû quitter leur emploi et ne peuvent plus travailler à cause de leur surexposition aux radiations. Il est incroyable que les responsables d’un tel désastre s’en tirent sans être tenus pénalement responsables », a-t-elle ajouté.

Mme Kudo se tenait devant la Haute Cour de Tokyo avec d’autres militants et soutiens aux personnes déplacées après cette catastrophe survenue dans le Nord-Est du Japon, le pire accident nucléaire après celui de Tchernobyl en URSS (aujourd’hui Ukraine) en 1986.

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Le tribunal de première instance de Tokyo avait innocenté en septembre 2019 l’ancien président du conseil d’administration de Tepco, Tsunehisa Katsumata, aujourd’hui âgé de 82 ans, et les anciens vice-présidents Sakae Muto (72 ans) et Ichiro Takekuro (76 ans), accusés de négligence ayant entraîné la mort.

Selon les plaignants, qui avaient fait appel de cette décision, ils auraient dû cesser l’activité de la centrale de Fukushima Daiichi bien avant la catastrophe de 2011, sur la base d’informations faisant état d’un risque de tsunami dépassant ses capacités de résistance.

 Plusieurs milliers de « décès liés »

Les trois anciens responsables de Tepco, seules personnes physiques à être jugées au pénal dans le cadre de ce désastre, risquaient jusqu’à cinq ans de prison.

Les poursuites contre eux s’appuyaient sur le décès de 44 patients d’un hôpital situé à quelques kilomètres de la centrale lors de leur évacuation d’urgence dans des conditions extrêmes le 11 mars 2011 après le tsunami provoqué par un fort séisme de magnitude 9.0.

Si le tremblement de terre et surtout le tsunami ont causé la mort de 18.500 personnes, la catastrophe nucléaire en elle-même n’a fait aucune victime sur le coup.

Cependant, elle est indirectement responsable de plusieurs milliers de « décès liés », reconnus par les autorités japonaises comme des morts dues à la dégradation des conditions de vie des nombreuses personnes évacuées de la région.

Les trois anciens dirigeants de Tepco et un quatrième ancien responsable ont par ailleurs été condamnés l’été dernier au civil, à l’issue d’une procédure distincte lancée par des actionnaires du groupe, à verser des dommages-intérêts record, pour un montant de 13.300 milliards de yens (95 milliards d’euros au cours actuel).

Ce montant astronomique est évidemment bien au-delà de leurs moyens personnels. Mais la justice avait expliqué qu’il correspondait à ce que devait payer Tepco pour faire face aux coûts de démantèlement de la centrale, de décontamination des sols et de stockage de déchets et débris radioactifs, ainsi qu’aux indemnités devant être versées aux habitants affectés par l’accident nucléaire.

L’un des points épineux des travaux de décontamination et de démantèlement de la centrale, qui devraient encore durer plusieurs décennies, concerne la gestion de plus d’un million de tonnes d’eau contaminée accumulée sur le site de la centrale, issue de la pluie, des nappes souterraines et des injections nécessaires pour refroidir les cœurs des réacteurs en fusion.

Cette eau a été traitée mais le tritium, un radionucléide qui n’est dangereux pour l’homme qu’à très hautes doses concentrées, n’a pas pu être éliminé.

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Le gouvernement japonais a reconfirmé la semaine dernière qu’il comptait démarrer cette année le rejet très progressif de cette eau dans l’océan Pacifique, un projet controversé mais qui a reçu des avis favorables de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), qui le supervise, et du régulateur nucléaire japonais.

© AFP

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