En forêt sinistrée de La Teste, les bénévoles du feu toujours aux aguets

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Michel Boigne, 75 ans, comme les membres de la DFCI ou volontaire chasse la moindre étincelle en forêt près de la Teste-de-Buch, le 9 août 2022. © AFP PHILIPPE LOPEZ

La Teste-de-Buch (France) (AFP) – Tandis qu’une reprise du feu fait rage en Gironde près de Landiras, frappée en juillet, comme le bassin d’Arcachon, d’un incendie colossal, des bénévoles continuent de chasser la moindre petite étincelle en forêt de La Teste-de-Buch, une aide précieuse pour les pompiers.

La mine désolée, Michel Boigné observe les silhouettes fantomatiques qui se dressent autour de lui, ravagées par un incendie qui a détruit en juillet 7.000 hectares de forêt tout près de la Dune du Pilat. Un décor macabre de pins carbonisés, auquel il peine à s’habituer.

« C’est un champ de bataille, ce que je vois là me fait mal au ventre », constate amèrement ce chasseur de 75 ans, propriétaire de parcelles forestières mais aussi ramasseur de champignons.

Dans la forêt silencieuse, Michel entend les arbres craquer. À ses pieds, le sol tourbé, noir et fumant, crépite encore.

Il rouspète après cet « enchevêtrement de racines et de débris végétaux, jonché de feuilles de chêne et d’aiguilles de pin, qui crâme instantanément et se propage au gré du vent ».

Un parterre dorénavant réduit à néant, mais où le feu, sous terre, couve.

Cet ancien mécanicien de la marine est aujourd’hui membre de la Défense des forêts contre les incendies (DFCI), une association qui intervient sur les massifs forestiers et s’est mobilisée lors des feux « hors normes » de juillet, et cette semaine sur celui près de Saint-Magne, à quelques km de Landiras.

En forêt sinistrée de La Teste, une trentaine de courageux – membres de la DFCI ou volontaires – se dispersent depuis quotidiennent pour traquer d’irréductibles fumerons, faisant « gagner un temps précieux aux pompiers », selon Michel Boigné.

A bord d’un 4×4 jaune vif, il emprunte l’un des chemins ouverts par bulldozer la semaine précédente pour faciliter le passage des engins des pompiers et de l’association.

« Trois minutes d’eau »

Par la fenêtre, défilent des troncs éventrés et fumants dans des faisceaux de lumière matinale, diffusés par la poussière. Puis un tapis de cendres fraîches, des braises incandescentes, des flammes. Stop.

Sourcils froncés, Michel Boigné met pied à terre puis se dirige vers l’arrière de son 4×4. S’y trouvent une citerne à eau ainsi qu’un tuyau d’arrosage qu’il déroule jusqu’au sinistre. Il arrose un court instant les foyers au plus proche du chemin, puis saisit son téléphone portable.

« La zone est trop étendue. Je ne peux pas traiter ça tout seul, et puis je n’ai que trois minutes d’eau », constate le vétéran, qui signale ce point aux sapeurs-pompiers de La Teste-de-Buch également occupés à sillonner les environs.

La veille, Michel s’était rendu six fois au point d’eau situé à l’orée de la forêt pour remplir sa citerne d’une capacité de 600 litres.

Sonnerie de téléphone. Appelé en renfort par des chasseurs bénévoles qui ratissent la même zone, il les rejoint en quelques minutes après avoir joué de sa tronçonneuse sur un arbre tombé la nuit en travers du passage.

D’immenses troncs sont à terre, un jeu de mikado XXL rongé par les flammes. Pelletées de sable, seaux, pulvérisateurs d’eau : les quatre hommes à la peau et aux habits déjà noircis tentent d’apaiser le brasier, en vain. « On essaye de faire avec les moyens du bord mais là, ça ne suffit pas », confie Jean-Jacques Degraves. Il faut la citerne à eau de Michel.

Dans cette pinède, ce retraité de 65 ans traque le gros gibier depuis des dizaines d’années. « C’est notre patrimoine, et ça fait mal au cœur », dit-il.

À ses côtés, son confrère Denis Isidore s’essuie le front. « Tout ce travail, ça nous prend aux tripes chaque jour de 8h du matin jusqu’à n’en plus pouvoir. Nous, les retraités, bien souvent on ne tient pas toute la journée », sourit-il.

Les yeux clos, il inspire à pleins poumons l’air ambiant qui n’est pas que fumées : « Au moins, il nous reste une chose de la forêt. C’est l’odeur de résine des pins maritimes ».

© AFP

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