Science du climat : encore des « mystères » à percer malgré les progrès

science du climat climatologue

Le climatologue français Robert Vautard en novembre 2017 à Paris © AFP/Archives JACQUES DEMARTHON

Paris (AFP) – Le réchauffement de la planète lié aux activités humaines est « incontestable » mais la science climatique recèle encore des « mystères majeurs » à percer, estime le climatologue Robert Vautard, évoquant notamment une sous-estimation de l’intensité des canicules.

Depuis le dernier rapport d’évaluation des experts climat de l’ONU (Giec) en 2014, la science a largement progressé.

« Aujourd’hui, nous avons de meilleurs modèles de projection du climat et de plus longues observations avec un signal du changement climatique beaucoup plus clair. Il était déjà clair, mais il est encore plus clair et incontestable aujourd’hui », explique-t-il à l’AFP avant la publication de la nouvelle évaluation du Giec dont il est l’un des auteurs.

Alors que, très récemment, il était impossible de lier un événement météo précis au réchauffement, la science dite d' »attribution » permet désormais de le faire.

« Aujourd’hui, quasiment à chaque événement, on est en mesure de dire quelques semaines, ou quelques jours après pour les plus simples, si cet événement aurait eu une probabilité beaucoup plus faible d’apparaitre s’il n’y avait pas eu de changement climatique ».

Exemple: la canicule extraordinaire qu’a connue fin juin l’ouest des États-Unis et du Canada aurait été « presque impossible » sans le réchauffement, selon les scientifiques du World Weather Attribution.

Le premier volet du rapport du Giec, qui doit être dévoilé le 9 août à l’issue d’une réunion qui démarre lundi est axé sur la science: augmentation de la température, hausse du niveau des océans, multiplication des événements extrêmes…

« Températures phénoménales »

Les mécanismes à l’œuvre lors de ces « phénomènes extrêmes qui se produisent maintenant quasiment toutes les semaines un peu partout dans le monde » sont d’ailleurs mieux connus, permettant de « mieux quantifier » leur déroulement dans le futur, explique Robert Vautard.

Malgré ces avancées, « il reste des mystères majeurs », tempère-t-il, comme « le rôle des nuages dans l’équilibre énergétique de la planète » et leur influence sur la sensibilité du climat aux gaz à effet de serre.

Mais le climatologue s’interroge surtout sur les « températures phénoménales » enregistrées en juin au Canada ou en Europe en 2019.

« Pour les précipitations, on a la chance d’avoir une loi physique qui dit que la vapeur d’eau augmente de 7% par degré de réchauffement. Les précipitations intenses vont augmenter à peu près autant (…). Mais le problème qui me soucie le plus, ce sont les vagues de chaleur », note-t-il, soulignant les « milliers de morts » provoqués.

« On sait que les vagues de chaleur se multiplient, mais on sait aussi que nos modèles sous-estiment l’augmentation de l’intensité de ces vagues de chaleur, en particulier en Europe, d’un facteur 2 », insiste le directeur de l’Institut Pierre-Simon Laplace.

Les modèles climatiques doivent être améliorés pour réduire les marges d’incertitude et gagner encore en précision. Depuis 2014, ils ont permis de développer une modélisation climatique régionale.

« Avant, on avait des modèles qui représentaient les grands phénomènes dans l’atmosphère, les océans. Aujourd’hui les modèles descendent à une échelle de l’ordre de 10 km et la génération qui arrive devrait arriver à l’échelle à peu près kilométrique ».

« Points de bascule »

Ce qui permettra de développer des projections pour des phénomènes de « petite échelle »: les tornades, la grêle ou encore les « épisodes méditerranéens », ces systèmes orageux apportant des précipitations phénoménales telles celles qui ont ravagé une partie du sud-est de la France à l’automne 2020.

« On n’arrive pas encore à bien les simuler car la résolution des modèles n’est pas suffisante » pour des phénomènes qui font « quelques kilomètres ou quelques dizaines de kilomètres ».

Quant aux « points de bascule », comme la possible fonte des calottes glaciaires ou le dépérissement de l’Amazonie, qui pourraient entraîner le système climatique vers un changement dramatique et irrémédiable, on a là encore « beaucoup d’incertitudes et de mystères ». Notamment sur le niveau de température qu’il faudrait pour les enclencher.

Il est crucial d’en savoir plus car même s’ils ont une plus faible probabilité, leurs « conséquences irréversibles à l’échelle de millénaires » seraient bien plus grandes que d’autres événements plus probables avec moins d’impacts, explique-t-il.

L’incertitude concerne enfin l’état des forêts et des océans qui absorbent environ la moitié du CO2 émis par l’homme.

« Est-ce que cette fonction de puits de carbone va continuer à être efficace ou non? », s’interroge Robert Vautard. « C’est une inquiétude », car le carbone qu’ils n’absorberaient plus augmenterait la concentration de CO2 dans l’atmosphère et la température mondiale.

©AFP

4 commentaires

Ecrire un commentaire

    • DAOUD

    Bonjour ! si l’on tient compre des cycles des tempêtes et des précipitations de mémoire d’homme l’on a assisté au glissement des orages dévastateur du SUD ves le NORD de la planète. A+

    • DENISE laurent

    on sait maintenant que le taux de CO2 dans l’atmosphère a des cycles de 60 ans et ce depuis des millions d’années !
    Les émissions de Co2 posent effectivement de graves problèmes de pollution en ville (trop de CO2 = pas assez d’oxygène) mais en aucun cas de climat !
    Dans les rapports du GIEC il est clairement établi que le principal gaz à effet de serre c’est la vapeur d’eau (60% des effets), Les scientifiques du GIEC n’ont jamais parlé de la vapeur d’eau parce qu’ils sont persuadés que les activités humaines n’ont pas d’impact sur le taux de vapeur d’eau de l’atmosphère, erreur fatale puisque c’est la dé-végétalisation des sols (déforestation) qui coupe le cycle de l’eau sur les continents au moment où on en a le plus besoin : l’été.

    Pour retrouver un climat océanique sur toute la planète il faut que les continents soient des océans de verdures l’été. Le climat océanique est caractérisé par la faible amplitude thermique entre le jour et la nuit liée à la présence d’eau, le climat continental est au contraire caractérisé par une forte amplitude thermique lié à l’absence d’eau et donc de végétation.

    https://www.mediaterre.org/actu,20210106085019,1.html

    • Guy J.J.P. Lafond

    Merci à tous pour ces mises à jour!
    L’atmosphère terrestre est en effet un équilibre délicat.
    Restons attentifs à l’air que nous respirons et prenons mieux soins de nos types de climats.
    Avec l’augmentation du pourcentage de la vapeur d’eau dans l’atmosphère, il est clair que le cycle planétaire de l’eau se modifie. Beaucoup de glaciers, bien qu’ils continuent de fondre pour alimenter des ruisseaux et des rivières, ne se régénèrent plus autant d’année en année. Et des phénomènes de “flash flood” se multiplient.
    Il nous faudra donc tous émettre moins de pollution et de GES.
    Il nous faudra donc tous enfourcher davantage nos vélos et laisser des voitures dans le garage ou bien à la cour à la ferraille.
    Une nouvelle joute commence.
    Allons jouer dehors tout en respectant mieux les lois de la nature. Merci,

    @GuyLafond @FamilleLafond
    Un bon papa qu’on a mis en prison au Canada en 2019. Pas très gentil, ça.

    • Courteau Christophe

    La notion de puits de carbone dans les forêts n’existe pas et c’est démontré depuis les années 80.
    L’Amazonie n’est pas un puits de carbone et la meilleure preuve c’est son relargage de CO2 supérieur maintenant à sa captation.
    Les forêts sont des TAMPONS mais pas des puits.
    La seule solution pour éliminer du C du pool atmosphérique c’est la sédimentation du plancton qui va mourrir et sédimenter le C en CACO3 au des mers et océan. Problème (connu) c’est une réaction biochimique qui acidifie le milieu donc les eaux…
    Et le C n’est pas seul en cause dans le réchauffement évidemment.
    Mais à court terme il faut reboiser c’est clair et entretenir des sols enherbées au lieu de tout dévaster.
    Les sols des praires naturelles et pâturées sont d’excellents capteurs de C et régulateur du cycle de l’eau et donc comme les forêts des émissions de vapeur d’eau.
    Bref, conserver les milieux naturels…naturels le plus possible.
    Question : pourquoi ne pouvons-nous pas capter l’énergie calorifique des bâtiments des infrastructures routières des montagnes…? On travaille sur le vent sur l’énergie lumineuse mais quid de la chaleur des matériaux naturels ou non ?
    Ne pourrait-on pas transformer cette énergie pour la transformer en électricité et en profiter pour réduire le rayonnement de ces matériaux vers l’atmosphère pour refroidir les grandes agglomérations par ex la nuit l’été ?
    Merci pour ces infos en tout cas