Julien Bayou, des causes militantes à l’écologie qui « porte le costume »


Le secrétaire national d'Europe Ecologie-Les Verts (EELV), Julien Bayou, en conférence de presse à Paris, le 19 janvier 2021 © AFP/Archives GEOFFROY VAN DER HASSELT

Paris (AFP) – Dans un rôle d’équilibriste à la tête d’écologistes en dynamique électorale, Julien Bayou vise en juin la présidence de la région Île-de-France, une campagne qui l’oblige à sortir de sa zone de confort de militant.

Affronter Valérie Pécresse, présidente de droite sortante à l’ambition nationale, lui donne la possibilité de se faire un nom auprès du grand public, au côté de l’eurodéputé Yannick Jadot qui l’éclipsait jusque-là.

Le chef des Verts, âgé bientôt de 41 ans, ne dit pourtant jurer que par le collectif. C’est d’ailleurs ainsi que ce fils d’un ingénieur employé aux services techniques de la mairie d’Alfortville, et dont le grand-père a été député-maire socialiste de Cessenon-sur-Orb (Hérault), s’est intéressé à la politique.

Julien Bayou a en effet créé, dans les années 2000 alors qu’il est salarié d’une fédération d’ONG, plusieurs collectifs dédiés à des causes sociales: « Jeudi noir » contre le mal logement, « Génération précaire », « Sauvons les riches »…

Cette fibre contestataire trouve un écho singulier dans son histoire familiale. En novembre 2019, Julien Bayou, invité pour un meeting parisien de soutien au « hirak » algérien, apprend d’un ami de sa mère que celle-ci, décédée prématurément, avait été à 17 ans porteuse de valises pour le FLN à Nice. Une information que le pudique Julien Bayou partage avec émotion lors du discours qu’il prononce immédiatement après, raconte à l’AFP cet ami, Tewfiq Allal.

En 2009, avec « Sauvons les riches », créé en collaboration avec les Verts, il est repéré par la patronne du parti Cécile Duflot qui le place sur sa liste pour les régionales de 2010 en Île-de-France. Devenu conseiller régional, Julien Bayou se place ainsi dans la lignée des personnalités « mouvementistes » qui ont irrigué le parti écologiste sans forcément commencer par la défense de l’environnement.

« J’ai d’abord commencé par m’engager sur des causes au thème et à l’intensité choisis », explique-t-il. « Je me suis rendu ensuite compte que sur tous ces sujets, c’était les écolos qui étaient en pointe. C’est plus tard que je suis devenu écologiste au sens de s’élever contre un système prédateur pour la nature et les hommes ».

Julien Bayou a gagné une certaine notoriété auprès des militants pour avoir exercé plusieurs fois le rôle de porte-parole dans lequel prime la « loyauté au collectif ». Le choisir comme successeur en 2019 paraissait « naturel » à l’ex-numéro 1 du parti David Cormand, un autre « duflotiste ».

Pour ce dernier, son profil « a permis de continuer à avoir un parti connecté aux mouvements » de la société civile.

« Rites »

Autre avantage: il n’a jamais ambitionné de participer à la primaire des écologistes en septembre, appréciant le rôle de médiateur de sa famille politique.

La tâche est pourtant délicate. Le probable candidat Yannick Jadot multiplie les initiatives individuelles. Son appel à une réunion des gauches, concrétisée en avril, a eu les faveurs de l’aile gauche d’EELV et mis la pression sur un Julien Bayou donnant la priorité aux régionales.

Le conseiller de Paris Jérôme Gleizes, qui l’apprécie et le connaît depuis le collectif « Jeudi noir », confie être « déçu »: « Il s’est enfermé de manière raide dans une logique identitaire en se repliant sur le pôle écologiste, une option qu’il n’avait pas défendue jusque-là ».

Cette « affirmation de l’écologie » s’est incarnée en Île-de-France, où il n’a pas cherché à s’allier avec Audrey Pulvar (liste PS) et Clémentine Autain (LFI et PCF).

Une façon de séduire l’électorat centriste ? Julien Bayou veut incarner la mue des écologistes qui ne seraient plus réduits à être des « défricheurs d’alternatives ». Le meilleur symbole en est l’abandon de son look décontracté pour une nouvelle coupe de cheveux plus courts, une barbe taillée et le costume-cravate.

« Il a bien fait », observe David Cormand: « C’est un rite de passage, une façon de signifier que l’écologie est disponible pour exercer le pouvoir, qu’il ne se complait pas dans sa zone de confort et qu’il est prêt à porter le costume ».

© AFP

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