En marge du système bancaire traditionnel et dans la mouvance de l’économie sociale se sont développés, depuis les années 1980, des organismes de financement dits solidaires qui ont pour objectif d’offrir des services de prêts à des personnes défavorisées ne trouvant pas de soutien auprès des banques traditionnelles et d’orienter l’épargne collectée vers des activités à caractère solidaire et éthique. À ne pas confondre avec les organismes de microcrédit, les organismes de finance solidaire favorisent une approche collective de l’épargne tout en se fondant sur les grands principes de l’économie sociale et solidaire : une gestion autonome, démocratique et participative où le bienfait de la collectivité et des membres de l’organisation passe avant le profit. C’est la vocation de la Nef.
Remédier aux défaillances du système bancaire traditionnel
Créée à la fin des années 1970, l’association la Nef (Pour une nouvelle économie fraternelle) a alors pour objectif d’offrir à des projets alter¬natifs innovants le soutien qu’ils ne trouvent pas dans les réseaux bancaires classiques. Société anonyme coopérative à capital variable, elle est la propriété de ses usagers, épargnants et emprunteurs, dénommés « sociétaires ». Tous détiennent une part sociale de la société dont le montant est fixé à trente euros. Certains sociétaires s’engagent bénévolement dans une action de correspondants : ils contribuent à animer la vie coopérative locale.
La Nef exerce aujourd’hui une double activité de collecte d’épargne et de distribution de crédits agrémentée par la Banque de France. Comme dans les banques traditionnelles, les comptes à terme et les comptes d’épargne offrent un intérêt dont le taux varie en fonction de la durée de placement. À la différence qu’elle permet à ses membres d’orienter leur épargne et de partager des intérêts avec les structures partenaires de leur choix oeuvrant au respect de l’homme et de l’environnement, à travers par exemple le « Compte Epargne Nature » ou le « Compte Epargne Insertion. »
La banque de l’économie locale et alternative
Grâce à l’épargne collectée, la Nef accorde depuis plus de vingt ans des prêts à des projets en fonction de leur utilité écologique, sociale ou culturelle. Ses emprunteurs : des entreprises et associations oeuvrant dans les domaines de l’environnement (filière bio, énergies renouvelables, éco-construction), du social (logement social, insertion, commerce équitable, tourisme rural) et de la culture (édition, pédagogie, monde artistique), ainsi que des particuliers investissant dans des installations écologiques.
Banque de proximité, ancrée sur le terrain, la Nef dispose de quatre délégations régionales à Paris, Nantes, Villeurbanne et Villeneuve-sur-Lot qui emploient au total 40 personnes.
L’antenne de Nantes, très récente, est née en septembre 2007 pour répondre à la multiplication des projets en quête de financements dans la région Ouest qui couvre la Bretagne, la Basse Normandie, les Pays de Loire et le Poitou-Charente. Elle représente 15 % des socié¬taires et des emprunteurs de la Nef, et compte quatre permanents qui gèrent 140 dossiers de prêts.
« Savoir où va son argent » : une banque transparente
Si l’on comprend ce qui motive les porteurs de projets qui font appel à la Nef, on peut s’interroger sur la motivation des épargnants. On a tendance à croire que l’investissement solidaire ne rapporte rien. « C’est faux ! » répond Julien le Couturier. « Si l’intérêt perçu par l’épargnant reste inférieur à celui des banques traditionnelles, par contre il a l’assurance de savoir dans quels projets son épargne est investie ». La clé du dévelop¬pement et du succès de la finance solidaire est basée sur cette transparence. Le nombre de sociétaires a augmenté de 14 % en 2009 principalement grâce au bouche à oreille, pour atteindre 24 500 sociétaires, dont 80 % de personnes physiques.
Quand nous questionnons Julien Le Couturier sur son parcours et ce qui l’a conduit à travailler à la Nef, il évoque son envie de donner du sens à son travail : « C’est une structure qui a une activité qui me parle. On ne finance pas n’importe quel type de projets ! »
« L’argent, qui devrait être l’outil du développement humain, est devenu l’objectif premier de l’économie au risque de faire perdre tout sens aux activités économiques. »
Pour aller plus loin…
La Banque éthique européenne
Depuis janvier 2008, la Nef travaille avec ses partenaires italiens de Banca Etica et espagnols de Fiare à la constitution de la première Banque éthique européenne coopérative, la BEE. Cette banque, qui verra le jour avec la fusion des trois entités d’ici 2013, entend promouvoir un nouveau modèle de relations humaines au sein de l’économie, à commencer par les activités financières, en donnant un rôle prépondérant à l’éthique, à l’exercice de la responsabilité et à l’intérêt pour l’autre. Elle ne se créera pas en opposition aux banques traditionnelles, mais entend montrer concrètement qu’il est possible d’assumer une responsabilité de banque de plein exercice en étant transparent et respectueux de la personne et de l’environnement.
Cette bonne pratique est extraite de l’ouvrage Le Tour de France du développement durable de Bertrand Guillier, Hélène Roy et Gilles Vanderpooten, paru aux Editions Alternatives
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