A l’école pour orangs-outans dans la jungle de Bornéo

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Un jeune oran-outang tenant la jambe d'une employée d'une ONG à Ketapang, en Indonésie, le 4 août 2016 © AFP BAY ISMOYO
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Un jeune oran-outang tenant la jambe d’une employée d’une ONG à Ketapang, en Indonésie, le 4 août 2016
© AFP BAY ISMOYO

Ketapang (Indonésie) (AFP) – Ignorant les cris de ses bruyants compagnons d’école dans la jungle de Bornéo, un bébé orang-outan se balance en changeant de main, les pieds en l’air. Dans ce refuge pour animaux, des singes passés près de la mort réapprennent à vivre dans leur environnement naturel.

Otan, un orang-outan âgé trois ans, apprend à se débrouiller seul depuis qu’il a été découvert errant dans une plantation de palmiers à huile et très mal en point. Il avait inhalé une épaisse fumée provenant des gigantesques incendies qui ont ravagé l’an passé des pans entiers de forêt tropicale à Kalimantan, province indonésienne sur l’île de Bornéo.

Au Refuge international pour animaux (RIA), doté de grands enclos aménagés en pleine forêt, Otan et d’autres orangs-outans orphelins apprennent à faire des nids, à trouver de la nourriture et à éviter les prédateurs. Ils doivent prouver qu’ils sont prêts à retourner dans la jungle, où ces grands singes d’Asie n’ont jamais été aussi menacés.

En juillet, l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) a déclaré les orangs-outans en danger critique, soit la dernière étape avant l’extinction d’une espèce à l’état sauvage. Ils sont encore un peu plus de 100.000 à Bornéo, alors qu’ils étaient près de 300.000 en 1970, selon l’UICN.

Ces singes à longs poils roux pourraient même totalement disparaître de Bornéo dans les 50 prochaines années, en raison de la déforestation et des incendies qui ravagent la forêt tropicale, avertissent des experts.

« Ça fend le coeur », se désole Ayu Budi, qui dirige la clinique vétérinaire du refuge de l’ONG RIA, lequel est équipé d’abris étanches pour orangs-outans bébés et adultes.

« Quand vous les regardez, c’est vraiment triste. Il devraient être avec leur mère dans la nature et vivre heureux, mais ils sont là », dit-il.

Les 101 orangs-outans soignés par Budi, parmi lesquels 16 petits singes joueurs, reviennent de loin. Ils ont échappé à la mort et ont été nourris au biberon dans une parcelle de forêt protégée du refuge, situé non loin de la ville de Ketapang.

Budi et ses collègues leur apprennent à chercher de la nourriture en cachant des cacahuètes et du miel dans des balles en plastiques sur des cimes d’arbres, comme avec Jack, un jeune singe espiègle à la recherche d’attention.

Des milliers d’autres ont succombé au cours des 40 dernières années à Bornéo, tués par des chasseurs, brûlés par de feux de forêts ou encore morts de faim en raison de la réduction drastique de leur habitat.

« Les gens qui travaillent sur le terrain à Bornéo le savent depuis longtemps: la situation des orangs-outans est assez désespérée », confie Chris Wiggs, un conseiller du refuge.

Le nombre de singes au refuge a quasiment décuplé depuis 2009, à mesure que des pans entiers de la forêt disparaissent au profit des exploitants de palmiers à huile, de pâte à papier et de caoutchouc.

Et les incendies de forêts qui se répètent chaque année sur la partie indonésienne de l’île de Bornéo – que se partagent l’Indonésie, la Malaisie et Brunei – sont devenus une importante menace pour l’avenir des espèces.

Des paysans et sociétés agricoles mettent délibérément le feu à des parcelles pour les défricher rapidement et cultiver de nouvelles plantations de palmiers à huile, en dépit de l’interdiction de telles pratiques. Très souvent, ils ne parviennent plus à contrôler les flammes. Quelque 2,6 millions d’hectares de forêt tropicale sont ainsi partis en fumée dans les incendies l’an passé, parmi les pires de l’Histoire.

Le centre de quarantaine du refuge était alors surpeuplé d’orangs-outans désespérés comme Vijay et Moli, deux jeunes retrouvés sous-alimentés près de terrains calcinés.

Le gouvernement promet chaque année des mesures pour lutter contre ce fléau des incendies dont les fumées toxiques se propagent vers les pays voisins de la région, comme la Malaisie et Singapour. Mais les résultats se font attendre.

« Nous avons tous assez peur que cela se reproduise de nouveau, et nous nous demandons si les espèces pourront encore supporter un coup comme ça », s’inquiète M. Wiggs, en référence aux incendies de l’an passé.

« Nous devons corriger les erreurs du passé », explique la directrice de l’agence publique de protection des animaux dans l’ouest de Kalimantan, Sustyo Iriono, en insistant sur la nécessité pour l’Indonésie de restaurer les nombreuses tourbières — terrains renfermant des matières combustibles qui alimentent continuellement les feux.

Elle espère que les jeunes orangs-outans pourront vivre un jour en toute indépendance dans la jungle de Bornéo, qui ne cesse de rétrécir. « Je crois qu’ils ont encore une chance, mais si la forêt disparaît, ce sera difficile… »

© AFP

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