Après 10 ans de développement, le projet de captage et de stockage du carbone Northern Lights achève sa première phase. Pour la première fois, des émissions de gaz à effet de serre issues d’une installation industrielle ont été stockées sous terre au lieu de finir dans l’atmosphère.
Lundi 25 août a débuté la dernière étape de la phase 1 du projet norvégien Northern Lights. Ainsi, le gaz comprimé dans un gazoduc sous-marin de 100 km a commencé à être pompé en début de semaine pour être stocké de manière permanente dans le réservoir Aurora à 2 600 mètres sous la mer du Nord.
Le projet Northern Lights, qui regroupe les entreprises Equinor, TotalEnergies et Shell, s’inscrit dans la technologie de captage et de stockage sous terre du carbone (CSC). La CSC est le processus de capture et de stockage du CO2 d’origine fossile, biogénique ou atmosphérique, pour empêcher son rejet dans l’atmosphère.
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Dans le cadre du projet Northern Lights, il s’agit du CO2 émis notamment par la cimenterie d’Heidelberg Materials à Brevik en Norvège et l’usine de valorisation énergétique des déchets de Hafslund Celia à Osla, la capitale du pays. Depuis lundi, ce sont des rejets de carbone tout droit venus de la cimenterie d’Heidelberg Materials qui ont été transportés par voie maritime jusqu’à un terminal intermédiaire proche de la ville portuaire de Bergen dans l’ouest du pays.
« Nous avons franchi une étape importante : nous avons injecté et stocké pour la première fois du CO₂ en toute sécurité dans le réservoir. Nos navires, nos installations et nos puits sont désormais opérationnels », a déclaré Tim Heijn, directeur général de Northern Lights. L’entreprise estime pouvoir stocker 1,5 million de tonnes de CO2 par an.
Cette première phase de Northern Lights s’inscrit dans le projet du gouvernement norvégien de CSC Longship. Le gouvernement norvégien finance les deux tiers du projet dont le coût total est estimé à 2,88 milliards d’euros. « Longship démontre qu’il est possible de réduire les émissions de l’industrie et les déchets de manière sûre et efficace. Il s’agit d’une avancée technologique majeure et d’une étape importante dans la lutte contre le changement climatique menée par la Norvège. Nous avons mis en place une chaîne de valeur complète pour la gestion du CO₂, dont l’impact sera significatif bien au-delà de nos frontières », a déclaré le ministre de l’Énergie norvégien, Terje Aasland. Des accords commerciaux ont été passés entre Northern Lights et des entreprises étrangères (Yara aux Pays-Bas, Ørsted au Danemark et Stockholm Exergi en Suède). Dans son accord avec Stockholm Exergi, Northern Lights s’engage à stocker 5 millions de tonnes de CO2 par an. Cet engagement devrait coûter 635 millions d’euros, dont 131 millions couverts par des subventions européennes.
Les technologies de CSC sont vues par beaucoup, dont la Commission européenne, comme indispensables à l’objectif de neutralité carbone pour 2050. La Commission européenne a pour objectif de stocker 50 millions de tonnes de CO2 par an d’ici 2030, afin de limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C. Pourtant, un rapport datant de 2022 du think-tank Energy Transitions Commission basé à Londres estime que la CSC dispose seulement d’un rôle « vital mais limité » dans les objectifs de décarbonation. De plus, certains mouvements écologistes craignent que les CSC permettent de continuer à utiliser des énergies fossiles. Dans un communiqué d’avril 2022, Réseau Action Climat France estime que le CSC est un outil de « greenwashing » puisqu’il « permet aux industriels de contourner la question ».
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Un commentaire
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François
En supposant que ce projet permette de stocker annuellement 50 millions de tonnes de CO2 durant 20 ans, pour un investissement global de 2,88 milliards d’euros, la capture d’une tonne de CO2 coûte 2,88 € en investissement. Il faudrait y ajouter les coûts de fonctionnement. Comment cela se situe par rapport à d’autres options (plantations par exemple) ou par rapport aux valeurs de transaction sur le marché du CO2 ?