La pollution engendrée par les feux d’artifice n’est plus à prouver. Pour y remédier certaines municipalités choisissent de se tourner vers les spectacles de drones, comme à Paris le 14 juillet dernier où 1100 drones ont illuminé le ciel.
Cette année encore de nombreuses communes ont annulé leur feu d’artifice du 14 juillet face au risque d’incendie accentué par les sècheresses. D’autres villes ont choisi de se tourner vers les spectacles de drones qui allient attrait de la nouveauté et diminution de l’impact environnemental. Mais les chorégraphies de drones sont-elles vraiment écologiques ?
Contrairement aux feux d’artifice, les drones ne polluent pas l’air. Ils ne produisent pas de particules fines et métalliques et sont également plus silencieux. Pourtant, les drones sont loin d’être sans danger pour la biodiversité et sans impact sur l’environnement. « Le côté lumineux reste un événement qui n’est pas commun dans une nuit noire, cela peut provoquer quelques dérangements », nuance Benoît Viseux responsable à la médiation faune sauvage de la Ligue pour la Protection des Oiseaux (LPO). Une étude publiée dans la revue Pacific Conservation Biology en 2023 estime qu’en plus de constituer une source lumineuse tout sauf naturelle, « les drones présentent leurs propres problèmes pour la faune, volant généralement à basse altitude où ils sont plus susceptibles d’entrer en contact avec la faune ».
L’importance du lieu
Le lieu où s’effectue la prestation d’un spectacle, qu’il soit à base de pyrotechnie ou d’engins volants, est un aspect à prendre en compte si on veut en minimiser l’impact. « Le site du spectacle doit être choisi en amont pour éviter le dérangement, que ce soit avec des drones ou avec des feux d’artifice. Parce que mine de rien, même un drone qui est un peu plus silencieux peut apporter un dérangement si le spectacle est trop près d’un site de reproduction. Quand on a un spectacle de drones qui est en plein milieu de Paris, on aura moins d’impact qu’un spectacle de drones qui est à côté d’un milieu forestier ou en pleine campagne », explique Benoît Viseux.
Pour lui, choisir le site du spectacle de « manière intelligente », c’est avant tout s’assurer qu’il n’y ait pas de colonies d’espèces protégées ou de lieux de reproduction dans les alentours de la prestation. En effet, le bruit et la lumière peuvent pousser les oiseaux à abandonner leur nid ou leur causer un stress si fort qu’il entraîne la mort et donc l’abandon du nid. Cet « impact n’est pas négligeable » avertit Benoît Viseux.
Des drones remplis de nickel et cobalt
Si l’impact immédiat du spectacle de drones semble moins important que celui des feux d’artifice (aucune étude n’a encore été faite à ce jour), sur le long terme, les drones ne sont pas en reste. « Il y a quand même un impact sur l’environnement, notamment au niveau de la production et fabrication des drones », affirme Benoît Viseux avant d’ajouter : « c’est un impact qu’on ne voit pas, mais qui existe ». Selon une étude sur le cycle de vie des drones parue dans le Journal of Composites Science, « la production des composants électroniques et des batteries représentent les impacts les plus importants ». Ainsi, la fabrication de leurs batteries à partir de minerais comme le cobalt, le manganèse et le nickel induit un coût non-négligeable pour l’environnement (déforestation, pollutions des océans, fort besoin en eau…) mais également d’un point de vue social (conditions de travail inhumaines dans les mines).
Une autre limite de ces batteries réside dans leur recyclage. Toujours selon l’étude du Journal of Composite Science, seulement 5 % des batteries sont entièrement recyclées dans le monde. Mais cet impact environnemental des drones s’atténue avec leur pluralité d’utilisation.
Une tradition qui perdure
Si les drones semblent aujourd’hui être une solution face à l’impact environnemental des spectacles pyrotechniques, tout le monde n’est pas prêt à dire aurevoir aux traditionnels feux d’artifice estivaux. « Ce qui ressort aussi de nos contacts avec les artificiers, c’est que ça dépend beaucoup des clients. Il y a des endroits où les habitants préfèrent voir un feu d’artifice qu’un spectacle de drones. On est confronté également à ce changement d’habitude qui doit se faire progressivement auprès des publics », explique Benoît Viseux.
Pour contenter ses habitants tout en tendant vers un spectacle plus vert, la ville de Bordeaux propose depuis 2021 un feu d’artifice « écoresponsable » sans plomb ni retombées plastiques dans la Garonne. Mais ces solutions, que ce soient les feux d’artifice « écoresponsables » ou les spectacles de drones, induisent un certain prix que toute commune ne peut pas s’offrir. La ville de Tours qui a choisi la solution des drones pour protéger notamment la reproduction de sternes, investit 150 000 euros dans son spectacle de drones. Soit 50 000 euros de plus que pour un feu d’artifice traditionnel.
Pour les communes qui voudraient trouver un compromis vers un spectacle pyrotechnique plus vert, Benoît Viseux conseille d’éviter les couleurs. « Il y a plus de métaux lourds dans les couleurs vives que dans d’autres couleurs plus classiques, moins lumineuses », le responsable à la médiation faune sauvage de la LPO fait ici référence aux couleurs comme le vert et le rouge dont les métaux lourds redescendent sur terre ou dans les eaux.
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Un commentaire
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François
Il y a aussi une autre alternative aux feux d’artifice, les rayons laser dont les mouvements et les combinaisons peuvent offrir de très beaux spectacles. Mais en termes d’écologie, quel est le préférable, ou le moins nocif?