GoodPlanet Mag’ propose des chroniques sur les livres, films, documentaires, expositions en rapport avec les thématiques de l’écologie et du vivre-ensemble. Découvrez-les dans notre rubrique nos chroniques culturelles. Cette semaine, notre chroniqueuse, propose de découvrir le livre Les oiseaux se cachent-ils pour mourir ? Les Animaux et la Mort par Emmanuelle Pouydebat aux éditions Delachaux et Niesle. Ce bel ouvrage aborde le sujet de la mort et remet en perspective certaines idées reçues sur le sujet.

Si vous êtes un grand curieux de nature et de comportement animal, ce livre sous forme d’enquêtes scientifiques est pour vous. Un ouvrage qui bouscule les idées reçues au travers de nombreux exemples analysés de manière sérieuse et ludique à la fois, grâce aussi aux dessins pleins d’humour d’Arnaud Rafaelian.

Que sait-on vraiment de la mort chez les animaux ?

Les animaux ont-ils conscience de leur mort ? De celle des autres ?

Pleurer, faire le deuil, se suicider, enterrer ses morts… ces comportements sont-ils réservés à l’être humain ?

Pour répondre à ces questions, l’auteure passe en revue des centaines d’exemples observés chez les oiseaux, les mammifères (éléphants, grands singes, dauphins, chiens…), les céphalopodes, les insectes sociaux, etc., avec une rigueur scientifique mais un ton très vivant et souvent émouvant.

Le titre reprend la croyance populaire selon laquelle les oiseaux, contrairement aux autres animaux, iraient se cacher seuls pour mourir sans qu’on retrouve leur cadavre.

Cette croyance est très certainement un mythe : on ne retrouve presque jamais leurs cadavres simplement parce qu’ils sont très vite mangés ou décomposés.

Néanmoins on note que de nombreux animaux montrent des comportements qui ressemblent à du deuil : les éléphants caressant les os de leurs morts pendant des années, les corneilles organisant des « veillées funèbres », des mères chimpanzés restant des jours auprès du corps d’un proche, ou encore des chiens déprimés après la mort de leur maître…

Certains animaux ont même de véritables rituels funéraires comme les fourmis et les abeilles qui transportent systématiquement leurs mortes hors de la colonie.

Quant au suicide animal il est presque toujours une mauvaise interprétation humaine. Les lemmings ne se jettent pas volontairement des falaises, tandis que les dauphins échoués meurent souvent de causes physiologiques.

Dans ce bel exercice de recherche et d’écriture, Emmanuelle Pouydebat développe une grande richesse d’exemples (plus de 200 espèces citées), avec un équilibre parfait entre émotion et science.

L’être humain n’a pas le monopole de la sensibilité à la mort, rappelle l’auteur qui écrit : « si l’on définit le deuil comme une période de tristesse prolongée après la perte d’un proche, alors oui, de nombreux animaux font le deuil. » Il ajoute que « l’être humain n’est pas le seul à enterrer ses morts. Mais il est probablement le seul à leur construire des tombeaux et à leur parler pendant des millénaires. »

Au final, la conscience de sa propre mort (ce qu’on appelle la « conscience mortelle ») semble extrêmement rare et n’est prouvée que chez l’être humain et peut-être chez certains grands singes.

Emmanuelle Puydebat est docteur en biologie évolutive, primatologue et directeur de recherche au CNRS. Spécialiste de l’évolution des comportements et des morphologies animales, elle est médaillé d’argent du CNRS et chevalière de la Légion d’Honneur, membre de la Commission nationale pour la faune sauvage captive (CNCFSC, ministère de la Transition Écologique) et du Comité consultatif d’éthique du MNHN.

En résumé : un magnifique livre, à la fois touchant et éclairant, qui nous rappelle que la sensibilité à la mort n’est pas l’apanage de l’espèce humaine. Une profonde et légère lecture de vulgarisation scientifique pour moi.

Domicruz

Pour aller plus loin

Les oiseaux se cachent-ils pour mourir ? Les Animaux et la Mort, Delachaux et Niestlé, 2025, par Emmanuelle Puydebat (texte) et Arnaud Rafaelian (illustration)