Ce glacier résistait au réchauffement, est-il en train de succomber?


Un campement installé au sommet du glacier du Pamir lors de l'expédition "Pamir Ice Memory", le 24 septembre 2025, à Kon Tchoukourbachi, dans l'est du Tadjikistan © AFP Prakash MATHEMA

Kon Tchoukourbachi (Tadjikistan) (AFP) – Le Groenland fond, les Alpes fondent, l’Himalaya fond, mais il existe une partie du monde où des glaciers massifs sont restés stables, voire ont gagné en masse, ces dernières décennies.

Ces glaciers-là se répartissent sur le « toit du monde », des milliers de kilomètres de chaînes de hautes montagnes en Asie centrale (Karakoram, Tien Shan, Kun Lun, Pamir). Et c’est au Tadjikistan dans les montagnes du Pamir qu’une longue et complexe expédition d’une douzaine de scientifiques financée par le Swiss Polar Institute et la fondation Ice Memory s’est rendue en septembre et octobre, accompagnée en exclusivité par un photographe de l’AFP.

Il a fallu traverser en 4X4 le Tadjikistan d’ouest en est pendant quatre jours, puis monter à pied à plus de 5.800 mètres d’altitude sur la calotte glaciaire de Kon Tchoukourbachi, un dôme de glace tout près de la frontière chinoise.

Pendant une semaine au sommet, par des températures glaciales et malgré une journée de blizzard, les scientifiques venus de Suisse, du Japon, des Etats-Unis et du Tadjikistan ont foré le glacier pour en extraire deux carottes de glace de 105 mètres, par tronçons.

Le glaciologue Evan Miles (d) et le paléoclimatologue russe Stanislav Kutuzov (g) prélèvent une « carotte » de glace du glacier du Pamir dans le cadre de l’expédition « Pamir Ice Memory » le 24 septembre 2025 à Kon Tchoukourbachi, dans l’est du Tadjikistan
© AFP Prakash MATHEMA

Ces couches de glaces compactées pendant des siècles, peut-être des millénaires, sont un trésor d’archive climatique car elles renseignent sur les chutes de neige, les températures, l’atmosphère et les poussières du passé.

« Seule l’analyse en laboratoire le confirmera, mais nous espérons que la carotte sera exceptionnelle non seulement pour la zone, mais pour toute la région, probablement 20, 25 ou 30.000 ans », confie à l’AFP Evan Miles, le glaciologue des universités de Fribourg et Zurich qui a mené l’éprouvante expédition, tout en restant très prudent.

En remontant dans le temps, les chercheurs espèrent répondre à deux questions: pourquoi ces glaciers ont-ils résisté au réchauffement général? Et cette anomalie est-elle en train de prendre fin?

« Toute cette région est unique au monde car les glaciers ont perdu très, très peu de masse depuis 25 ans, voire en ont gagnée », explique Evan Miles.

Des chercheurs pensent que l’anomalie de Karakoram, selon son nom officiel, prend fin. Les glaciers montrent en effet des signes de perte depuis quelques années, mais les scientifiques veulent déterminer s’il s’agit d’une variation naturelle, ou du début du vrai déclin.

Pour en être certain, il faut une très longue période de mesures, « ce que les carottes peuvent nous fournir », dit Evan Miles.

Une conférence de presse célèbrera lundi à Douchanbé le succès de la mission. Une carotte sera expédiée au Japon, l’autre stockée dans un sanctuaire souterrain en Antarctique à la station Concordia, par -50°C, à la demande d’Ice Memory.

Cette fondation, créée en 2021 par des universités et centres de recherche français, italien et suisse, a déjà collecté plusieurs carottes dans les Alpes, au Groenland, dans les Andes…

Pourquoi les stocker dans ce sanctuaire en Antarctique? Pour permettre « aux scientifiques du futur de les analyser avec les outils les plus modernes dans 50, 100 ou 200 ans, et d’en extraire de nouvelles informations », explique à l’AFP le climatologue suisse Thomas Stocker, ancien vice-président d’un groupe d’experts du climat de l’ONU (Giec), qui préside Ice Memory.

« Nous perdrons probablement 90% de la masse des glaciers sur Terre », rappelle-t-il. « Nous tentons de préserver une chose menacée par les activités humaines ».

© AFP

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    • Guy J.J.P. Lafond

    Le toit du monde est blanc.
    Il réfléchit presque toutes les longueurs d’onde du soleil sans les absorber.
    Le toit du monde est immaculé et il aide à protéger la vie sur Terre, qui autrement serait un four.
    Suivons le bon exemple.
    Les toits que nous avons sur nos têtes, assurons-nous qu’il y en ait de plus en plus qui soient propres et blancs comme la couleur de la neige partout sur notre si fragile planète bleue. Nos toits sur nos têtes doivent réfléchir davantage les rayons du soleil et les absorber juste un tout petit peu pour réchauffer nos coeurs.
    Autrement, il faut le rappeler constamment à ceux et celles qui nous entourent:
    Brûlons moins de noir, moins de pétrole, de charbon et de gaz! Ça génère des toutes petites particules sales et microscopiques qui retombent au sol, qui volontiers se réchauffent et assèchent autour d’eux sous l’effet conjugué du soleil et de l’effet de serre.
    Recommençons à vivre à la vitesse des arbres, vous voulez bien?
    Donnons la chance aux forêts et au plancton des océans de capter le trop plein de CO2 dans l’atmosphère. L’effet de serre en sera ainsi diminué et une partie de la chaleur terrestre pourra être évacuée plus facilement vers l’espace infini.
    La vie sur Terre est cet équilibre si fragile et si parfumé qu’il faut à tout prix protéger. La vie sur Terre, c’est aussi de la précieuse humus qui fait apparaître les perce-neige au printemps.
    Il s’agit de préserver des dosages subtiles entre des vases communicants; il s’agit de maintenir des recettes naturelles qui ont mis des millions d’années à se mettre en place. Grâce d’abord à la vie végétale qui a précédé le monde animal! Merci les plantes, merci les fleurs! Si nous sommes vivants et en bonne santé, c’est grâce à vous!
    Depuis environ un siècle, les avancées de la science et les technologies humaines nous ont bien sûr facilité la vie. Mais sommes-nous allés trop loin avec nos astuces et nos artifices?
    Mais pourquoi donc, en retour des progrès énormes que nous avons faits , l’équilibre fragile de la vie sur Terre devrait-il être sacrifié sur l’autel d’hommes si puissants, si cupides et si inconscients?
    La science, c’est aussi la recherche de la vérité… Ne l’oublions jamais.
    La société civile et civilisée, celle imaginée par l’ONU, celle devenue mondiale et consciente de son existence dans un espace infini et aussi sur une Terre définie et limée, nous dans ce si bel environnement si vert et si blanc à la fois qu’est notre Terre, eh bien nous devons tous nous poser la question sérieusement et rapidement. Chacun d’entre nous, si petit que nous soyons, comment pouvons-nous assurer une avenir serein à celles et ceux qui nous remplaceront?
    La vie a toujours été un magnifique cadeau qu’il faut redonner à la suivante et au suivant.
    C’est notre destin, à tous!
    S.v.p., action!
    Guy J.J.P. Lafond (VELO) – in
    Un esprit sain dans un corps qui a été emprisonné dans son pays, le Canada, à plusieurs reprises. Diantre!