Il est temps de débattre démocratiquement de l’avenir énergétique de notre pays

Lettre ouverte au président de la République. Par Yann Arthus-Bertrand, Isabelle Autissier, Franck Laval, Serge Orru, Jean-Marc Roirant.

Après avoir été meurtri par des tremblements de terre et un tsunami dévastateurs, le peuple japonais doit faire face à une des pires crises nucléaires depuis 1945. Les conséquences dépassent les pires scénarios et imposent compassion et solidarité. Elles sont aussi source d’inquiétude pour tous et reposent avec acuité la nécessité de discuter des choix énergétiques que notre pays doit faire pour les décennies à venir.

Ce débat est d’autant plus nécessaire que le dernier sondage IPSOS sur les Européens et le changement climatique nous rappelle que 6 Français sur 10 perçoivent ce sujet comme une menace sérieuse. Face à ce péril, il reste donc impératif de décarboner notre énergie si l’on veut maintenir en dessous de 2 degrés d’augmentation la température de notre globe, seule condition qui nous permettra d’éviter une situation climatique dramatique.

Pour la France, la solution énergétique semblait se trouver dans le développement du programme électro-nucléaire. Certes, le nucléaire est une énergie relativement faiblement émettrice de gaz à effet de serre (GES) au regard des centrales fossiles (encore que l’extraction du minerai, la construction et le démantèlement des sites ne soient pas quantifiés). Cependant, à l’aune de la tragédie japonaise, qui peut encore sérieusement envisager prendre le risque de contaminer pendant des siècles des zones entières de territoire ? Et ce pour une énergie qui n’est en rien une réponse à près de 75% des émissions de GES -comme par exemple celles issues des transports, de la déforestation ou de l’agriculture- et qui ne représente que 2,5% de la consommation finale d’électricité dans le monde. S’entêter dans l’illusion nucléaire est au-delà de toute rationalité. De même, pourquoi perdre son temps à explorer des pistes comme l’exploitation d’hydrocarbures non conventionnels (pétroles off-shore, gaz et huile de schiste, etc.) alors que l’on sait que les risques sanitaires et environnementaux sont réels, et que les bénéfices restent hypothétiques.

Nous vous appelons donc faire le pari d’un vrai débat démocratique sur l’énergie afin de discuter ensemble des choix à faire pour engager notre pays dans un avenir renouvelable au nom des générations présentes et futures.

Ce débat semble d’ailleurs à portée de mains puisque Madame Nathalie Kosciusko-Morizet, votre ministre de l’Écologie, du Développement durable, des Transports et du Logement a déclaré le mercredi 16 mars 2011 devant les parlementaires que « Le principe d’un débat [sur l’énergie et le nucléaire] est acquis ».

Si c’est le cas, il convient aussi de créer les conditions d’un débat serein et argumenté sur la politique énergétique de notre pays, politique dont les investissements et les effets se déploieront dans les prochaines décennies, bien au-delà des échéances électorales à venir.

La France a déjà expérimenté une telle méthode de débat avec le Grenelle de l’environnement et le Grenelle de la mer. Mais, cette fois-ci, toutes les questions doivent être mises sur la table, nucléaire inclus et l’agenda doit être co-construit et non imposé par le gouvernement. Nous exigeons que les modalités et les conditions d’organisation de ce grand débat soient définies selon les principes d’une gouvernance plurielle. Il conviendra d’associer dès le début et pleinement la représentation nationale. Ce n’est pas tout. Le débat devra également vivre pleinement dans nos territoires. La pluralité du débat étant un gage de démocratie.

Un cahier des charges construit en commun par tous les acteurs posera les bases et servira de référentiel tout au long des échanges.

Il devra balayer les possibilités qui s’offrent à nous : mettons dans la balance les avantages et inconvénients de chaque source de production énergétique, observons les créations d’emplois que peuvent induire un système de production énergétique décentralisé (multiples sources inépuisables réparties régulièrement), mesurons les co-bénéfices sur la santé et l’environnement, sur l’économie et le cadre de vie, et inventons un monde qui nous donne envie de nous investir ! Aujourd’hui, il y a comme un surprenant aveuglement à rester dans l’impasse de l’électro-nucléaire, alors que la sobriété et l’efficacité énergétique couplées au bouquet d’énergies renouvelables, inoffensives pour l’homme et créatrices d’emplois, sont à portée de main. Sobriété, efficacité et énergies renouvelables : voilà le trio gagnant d’une politique énergétique. Les missions de chacun devront être clairement définies, tout comme les modalités de clôture, de restitution et de mise en œuvre. Ce débat, initié le plus tôt possible, s’étalera sur une durée de 6 mois permettant ainsi à la pluralité des acteurs de s’exprimer sur l’avenir énergétique de la France.

Monsieur le Président, nous devons tirer les leçons de la situation dramatique que connaît le Japon en prônant la transparence pour mieux comprendre et anticiper. Le droit pour les populations à connaître les risques encourus et à choisir leur modèle énergétique est un droit élémentaire au 21ème siècle.

L’heure est grave et nous devons tous dépasser nos postures.

Agissons pour transmettre une planète vivante aux générations futures.

Yann Arthus-Bertrand, Président de la Fondation GoodPlanet

Isabelle Autissier, Présidente du WWF France

Franck Laval, Président d’Ecologie sans frontière

Serge Orru, Directeur général du WWF France

Jean-Marc Roirant, Secrétaire général de la Ligue de l’enseignement

5 commentaires

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    • renais

    avenir énergétique
    il faut faire des économies d’énergie .
    tous les gaspillages d’énergie deviennent inadmissibles .
    la planète est concerné :chaque consommateur , chaque pays .
    il faut sortir du nucléaire compte tenu du risque et de la facture
    d’électricité d’origine nucléaire .
    l’Etat doit réaménager les tarifs de l’éléctricité du fait des
    hivers plus froids .
    il faut privilégier les énergies renouvelables .
    il faut lutter contre le réchauffement climatique , diminuer les gaz à effet de serre ,la déforestation à outrance…
    il faut juguler la cupidité ,l’égoîsme et la barbarie …

    • simone-laure théron

    sortir du nucléaire
    Il faut sortir du nucléaire, lentement peut-être, mais au moins commencer à l’envisager pour protéger notre planète et ses habitants, et donner un espoir à tous.
    Pour commencer, donnons une preuve que nous sommes conscients des dépenses excessives que nous faisons en matière d’éclairage public: » les espagnols sont les européens qui dépensent le plus en éclairage public avec 118 kw/h par an et par habitant, contre 90 kw/h pour les français et 48 kw/h pour les allemands. » Adoptons la façon d’agir des allemands.

    • Manso

    Démographie Responsable
    Le choix du nucléaire a été fait, en France comme au Japon, du fait que ces 2 pays ne disposent que de peu d’énergies fossiles (le Japon importe 96% de ses besoins!).
    Il faut bien sûr sortir du nucléaire en France, mais au Japon, ce sera beaucoup plus difficile. En effet ce pays est largement surpeuplé (
    127 millions d’habitants pour une superficie de 378.000 km²) à comparer à notre pays (63 millions d’habitants pour une superficie de 547.000 km²), ce que l’on retrouve évidemment dans les densités de population (336 hab/km² pour le Japon et 115 hab/km²).
    Outre le passage aux énergies renouvelables, le seul espoir sur le long terme pour le Japon, concernant le nucléaire, mais aussi la qualité de vie en général est dans la décroissance annoncée de sa population

    • Marie-Christine

    sortir du tout nucléaire et les énergies de remplacement
    si l’on se réfère aux séismes, au tsunami et aux explosions nucléaires ayant eu lieu au japon, et si l’on prend comme repère les trois derniers ennuis nucléaires en russie, aux usa et au japon, ceux-ci apparaissent comme fort rapprochés : il va de soi que ces situations sont dangeureuses pour les populations; maintenant le nucléaire, sortir du nucléaire et toutes les énergies de substitution composent une matière assez vaste pour alimenter un grenelle à elle seule; il faut décomposer le nucléaire et parler de la constitution de l’atome par des physiciens car peu de gens dans la vie courante savent de quoi est constitué l’atome ou ne le savent plus; il faut apprendre comment commencer à sortir du nucléaire et c’est certainement très long en tenant déjà compte des catastrophes qui ont laissé des sols encore contaminés ou des silos nucléaires détruits; puis il faut apprendre à utiliser en accord avec l’environnement terrestre ou marin, ce qui est fort important, les énergies de substitution déjà connues ou qui pourraient se développer dans l’avenir!

    • scolopandre

    marée radioactive
    Réagissons ensemble, les marées noires si spectaculaires ont la vertus de se voire, provocant ainsi les réaction unanimes des peuples de tous horizons. Quel dommage qu’il n’en soit pas de même pour cette marée radioactive. Invisible et fluide, elles gagne du terrain par tous les chemin aériens, terrestres et marins sans laisser de traces apparentes. sa transparence permet à nos responsables de tous bords de diffuser largement la désinformation…..notre ministre de l’écologie qui défend le nucléaire ça ne vous choque pas? Le danger est bien là, faute de visuel, ouvrons notre conscience au drame qui se répand sans limite tout autour de notre planète. Et n’oublions pas qu’à La HAGUE les déchets radioactifs font la queue dans des piscines, pour y être traitée. La concentration de matériaux radioactif dépasse l’entendement, prête à se déverser en mer en cas de catastrophe.
    merci à tous ceux qui réagirons, car ces comme ça que nous vaincrons,indignez vous comme le dit si bien le livre du moment.